En tant que nouveau chef de file sur le marché suisse du logement, l’UBS essuie de nombreuses critiques. La grande banque gagnera-t-elle trop de pouvoir sur le marché immobilier avec le rachat de Credit Suisse? Les spécialistes du secteur immobilier craignent qu’elle ne commence à peser bien trop lourd.
Après l’acquisition de Credit Suisse, l'UBS deviendra le nouveau numéro un sur le marché du logement helvétique. Elle doublera ainsi Swiss Life, qui était jusqu’à présent le plus grand propriétaire de logements du pays.
Aujourd’hui, UBS possède environ 37’000 logements. Ces chiffres prennent en compte de tous les biens immobiliers que la banque détient, comprenant ses fonds immobiliers et ses fondations de placement. Quant à Credit Suisse, elle comptait 35’317 logements dans son portefeuille, selon son rapport annuel.
Sur Credit Suisse et l'UBS
La nouvelle UBS domine le marché
Certains de ces biens immobiliers font partie de la fondation de placement du Credit Suisse. Or, celle-ci n’est pas directement concernée par la fusion. Mais même si tous les immeubles ne passent pas à l’UBS, il est clair que l’acquisition fait de la banque le plus grand acteur du marché. Un peu plus de 60’000 logements locatifs devraient ainsi tomber entre les mains de l’UBS.
Difficile de se faire une idée. Qu’est-ce que ce chiffre représente à l’échelle de l’ensemble du marché? Il s’agirait d’environ 3% de ce dernier, d’après les experts en immobilier. Mais cela suffirait selon eux à faire de l’UBS la puissance dominante parmi les investisseurs institutionnels.
Les spécialistes s’inquiètent. «Un nouveau risque de concentration sur le marché immobilier vient d’émerger», s’alarme Hans R. Holdener, CEO et fondateur du fonds immobilier suisse Helvetica. D’où vient le risque? Il estime que la banque possède désormais la moitié de tous les biens immobiliers qui se trouvent entre les mains d’investisseurs institutionnels. «Ce qui ne devrait tout simplement pas être le cas», assène-t-il. Et les autorités ne lèvent pourtant pas le petit doigt. «L’autorité de surveillance des marchés financiers doit enfin se sortir les mains des poches et agir!», tonne-t-il. Comment? «Il faut un plan pour réduire le pouvoir de la nouvelle UBS sur ce marché», répond-il.
Danger des loyers excessifs
Le fondateur de Helvetica n’est pas le seul à craindre le poids de la nouvelle banque sur le marché immobilier. La conseillère nationale des Vert-e-s Natalie Imboden demande, elle aussi, que la Confédération se penche sur ce sujet. Elle exige davantage de transparence.
La Bernoise a en tête plusieurs questions: «Combien de logements exactement appartiennent à l’UBS? Et à combien s’élèvent les rendements que la banque perçoit sur les loyers? Comment empêcher les loyers excessifs?», énumère-t-elle. Natalie Imboden souhaite poser ces questions directement au gouvernement. Elles sont contenues dans une interpellation que la politicienne écologiste a déposée le 12 avril.
Face à cette situation qu’elle juge problématique, la conseillère nationale ne mâche pas ses mots. «Avec cette nouvelle banque, on assiste à la naissance d’un monstre de rendement», assène Natalie Imboden auprès de Blick. Le problème: personne ne sait combien de rendement les banques obtiennent avec leurs constructions de logements. «Cela doit changer!», s’insurge-t-elle. Que craint-elle? «C’est simple: il existe un grand risque d’abus de pouvoir.»
Si un acteur aussi important que l’UBS continue à miser sur des rendements élevés pour les loyers, d’autres pourraient lui emboîter le pas, décrit-elle. Ce serait dévastateur, avance-t-elle, d’autant plus que la grave pénurie de logements qui fait rage actuellement en Suisse joue largement en faveur des bailleurs. Natalie Imboden veut à tout prix éviter une nouvelle hausse des loyers.