Projets d'armement à la peine, financement de l'armée peu clair, chaos organisationnel: depuis plusieurs mois, le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) est sous le feu des critiques. De quoi exaspérer l'Union démocratique du centre (UDC) qui a décidé ce week-end de jeter un pavé dans la mare en s'en prenant ouvertement à la conseillère fédérale centriste Viola Amherd, en charge du département.
Le parti conservateur a ainsi exigé sa démission, estimant qu'elle représentait désormais un «risque pour la sécurité de la Suisse». Une réclamation très mal accueillie par le Centre, qui l'a rejetée avec indignation.
Les autres partis représentés au Conseil fédéral ont également rejeté toute idée de démission. Cet appel est «juste ridicule», estime Cédric Wermuth, coprésident du Parti socialiste (PS) et conseiller national du canton d'Argovie. Pour lui, il s'agit d'une «tentative de détourner l'attention de la politique bourgeoise de gaspillage d'argent dans l'armée» à laquelle l'UDC aurait pleinement participé.
Un revendication «inappropriée» pour le PLR
Le président du Parti libéral-radical (PLR) Thierry Burkart estime pour sa part que cette demande de démission est contraire à la tradition politique suisse et qu'elle est donc «inappropriée». Le chef du parti de droite estime que c'est au Parlement d'intervenir pour remédier aux défaillances du DDPS. Les Chambres fédérales avaient d'ailleurs sommé Viola Amherd d'élaborer une stratégie globale pour l'Armée, rappelle-t-il. Pour l'heure, le Conseil fédéral n'a toujours pas établi de planification pour redresser les capacités de défense du pays.
La délégation des finances du Parlement a lui aussi tiré la sonnette d'alarme face au nombre toujours plus élevé de projets d'armements en difficulté. «Les problèmes sont connus depuis longtemps», peste Cédric Wermuth. «Mais le Parlement à majorité bourgeoise a sciemment détourné le regard et approuvé nonchalamment ces acquisitions.» Une situation qu'il impute également Conseil fédéral: «Lui aussi aurait dû demander depuis longtemps des éclaircissements sur les raisons pour lesquelles des milliards ont été perdus.»
L'élu socialiste voit d'un bon œil le fait que la délégation des finances se saisisse enfin du problème. Il estime néanmoins que la Commission des finances devra elle aussi se pencher sur la question, alors que le prochain processus budgétaire doit bientôt commencer. «On ne peut pas simplement économiser sur les plus pauvres pour donner encore plus d'argent à l'armée, surtout si celle-ci est incapable d'estimer les coûts nécessaires à son extension.»
«Mettre de l'ordre dans ce chaos»
«Il n'est pas acceptable que les énormes problèmes du DDPS soient simplement comblés par des centaines de millions supplémentaires», résume Cédric Wermuth. «Il faut enfin mettre de l'ordre dans ce chaos.» Une reprise en main qui nécessite selon lui de ne plus augmenter le budget de l'armée. «On injecte ici des milliards dans un trou noir.»
L'élu de gauche dénonce par ailleurs une surprotection du département par les partis de droite: «Pour tout autre département, des demandes de CEP (ndlr: commission d'enquête parlementaire) auraient été formulées depuis longtemps, et à juste titre». Cédric Wermuth ne mâche pas ses mots: «Injecter de l'argent dans l'armée maintenant, c'est détourner l'argent du contribuable, on sait d'avance que l'on va le jeter aux orties.»