La loi est sans équivoque: «Suisse Tourisme (...) doit promouvoir la demande pour la Suisse en tant que pays de voyage et de tourisme.» Conformément à cette loi, Suisse Tourisme dépense la plus grande partie de son budget pour la promotion, soit plus de 50 millions de francs par an. Avec l'augmentation mondiale des flux touristiques, le secteur est en proie à un vif débat quant à la pertinence actuelle de cette mission.
Monika Bandi, directrice du centre de recherche sur le tourisme à l'université de Berne, estime par exemple qu'«à l'ère de la communication numérique, la question se pose de savoir comment adapter ce mandat et donc la loi fédérale.»
Le Cervin a-t-il vraiment besoin de Federer?
L'Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoit un quasi doublement des arrivées de touristes internationaux au cours des dix prochaines années. Ce qui ne devrait donc pas passer inaperçu en Suisse.
Monika Bundi appelle à un débat sur la nécessité du marketing touristique en Suisse, et, le cas échéant, sur sa forme. «La promotion est tout à fait judicieuse pour les régions touristiques périphériques comme le Jura ou le Safiental», explique l'experte. En revanche, elle s'interroge sur le besoin de campagnes publicitaires mondiales pour les destinations emblématiques comme le Cervin.
C'est une critique à l'égard des responsables de Suisse Tourisme, qui persistent à promouvoir des destinations très populaires comme le Cervin à l'échelle mondiale. Récemment des spots publicitaires sont sortis avec des célébrités telles que Roger Federer et Robert De Niro.
Mieux répartir les touristes
Jürg Stettler, directeur de l'Institut du tourisme et de la mobilité à la Haute école de Lucerne (HSLU), appelle également à un changement de mentalité: «Il est prévisible, dans quelques années, que les visiteurs en provenance de marchés lointains représenteront plus de 20% des touristes en Suisse. Dans ce contexte, il convient d'examiner de quelle manière Suisse Tourisme doit faire de la publicité supplémentaire sur ces marchés.»
Le directeur estime aussi que la Suisse doit discuter de la question de l'opportunité et de la manière d'investir dans le marketing touristique. «Il serait judicieux d'orienter les flux de touristes et de mieux les répartir dans le temps et dans l'espace», ajoute-t-il.
Suisse Tourisme ne ferme pas la porte à une adaptation générale de son mandat. «On peut en discuter», déclara son directeur Martin Nydegger dans une interview accordée à Blick. Il tient cependant à clarifier, que la gestion de la demande et l'orientation des flux touristiques figurent déjà en tête de la stratégie de l'organisation.
Le professeur lucernois Jürg Stettler confirme que Suisse Tourisme empreinte davantage cette direction, mais souligne la difficulté de gérer les flux touristiques: «Les réseaux sociaux ne respectent pas les concepts touristiques», remarque-t-il. Il est donc difficile de prévoir où se trouvera le prochain lieu prisé pour prendre des selfies.