La position suisse ne tient pas pour Moscou
Sergueï Lavrov a envoyé un crochet à Cassis et son sommet pour la paix

La Suisse s'efforce d'organiser un sommet pour la paix entre Kiev et Moscou. Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis vient de proposer à son homologue russe Sergueï Lavrov un rôle de médiateur suisse. La réponse de ce dernier n'a pas été tendre.
Publié: 25.01.2024 à 12:57 heures
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Dernière mise à jour: 25.01.2024 à 13:18 heures
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Le chef de la diplomatie de Moscou Sergei Lavrov (à gauche) et son homologue suisse Ignazio Cassis se sont rencontrés mardi en marge du Conseil de sécurité de l'ONU.
Photo: Keystone
Daniel Kestenholz, Etienne Daman

En marge d'un débat ouvert au Conseil de sécurité de l'ONU, une rencontre a eu lieu mardi à New York entre le ministre suisse des Affaires étrangères Ignazio Cassis et son homologue russe Sergueï Lavrov. Ignazio Cassis a confirmé la rencontre sur X. Des photos montrent les deux hommes se serrant la main.

A son issue, Ignazio Cassis n'a pas fait de déclarations concrètes sur le contenu de l'entretien avec Sergueï Lavrov. A l'entendre, les deux hommes auraient simplement discuté de «plusieurs sujets importants». Derrière l'apparente cordialité partagée par le Conseiller fédéral, Sergueï Lavrov a finalement révélé ce qui aurait été abordé lors de leurs échanges.

Alors que la Suisse s'efforce d'organiser un sommet de paix entre Moscou et Kiev, comme l'ont annoncé la semaine dernière à Berne la présidente de la Confédération Viola Amherd et le président ukrainien Volodymyr Zelensky, la Russie a été on ne peut plus claire: ce sera «niet». Mercredi en conférence de presse, le chef de la diplomatie russe s'est attaqué sans détours à la Suisse, à sa neutralité et l'a même soupçonnée de russophobie. Une gifle pour Ignazio Cassis, envoyé à New-York pour poser les jalons en direction de la paix dans le conflit entre la Russie et l'Ukraine. Sa mission est un échec.

«Nous sommes toujours prêts et toujours là pour vous»

«Le ministère suisse des Affaires étrangères a proposé sa médiation à la Russie», titre un rapport de l'agence de presse russe Ria Novosti sur la rencontre Lavrov-Cassis. «J'ai rencontré le ministre des Affaires étrangères de la Suisse et il a tenté de me convaincre qu'ils pouvaient servir d'intermédiaire dans n'importe quelle affaire, comme par le passé», a déclaré Lavrov.

«J'ai essayé de lui expliquer que le médiateur devait être neutre», a poursuivi le ministre russe des Affaires étrangères. «La Suisse était autrefois célèbre non seulement pour sa neutralité militaire, mais aussi pour sa neutralité au sens large, qui lui permettait d'accepter avec succès différents processus de négociation.»

Le ministre suisse des Affaires étrangères lui aurait «fait savoir que la Suisse restait prête à jouer le rôle de médiateur». «Il m'a dit: 'Nous sommes toujours prêts et toujours là pour vous'». Du côté de la Suisse, personne n'a confirmé pour l'heure que Sergueï Lavrov citait correctement Ignazio Cassis.

Lavrov rappelle Cassis à l'ordre

Mais le ministre russe ne s'arrête pas là: «Il a dit qu'ils étaient à notre service, mais je lui ai souligné que la stratégie nationale de la Suisse, approuvée pour 2024 à 2027, stipule que la Suisse est prête à construire la sécurité européenne – pas avec la Russie, mais contre la Russie.»

En octobre, Moscou avait réagi avec «indignation» à un «projet antirusse de stratégie de politique étrangère de la Suisse». Le projet de ladite stratégie de politique étrangère de la Suisse pour les années 2024 à 2027 a été présenté fin septembre et devrait être finalisé début 2024 après des consultations dans les cantons et les commissions de politique étrangère des Chambres fédérales.

Le rapport de Ria Novosti reproche à la Suisse de ne pas être membre de l'UE ou de l'OTAN, mais d'avoir «adhéré à presque toutes les sanctions européennes contre la Fédération de Russie» depuis le 24 février 2022.

Point d'achoppement des milliards russes bloqués en Suisse

Selon les données de Moscou, la Suisse aurait gelé des avoirs russes privés à hauteur de 7,6 milliards de francs. Il y a un an, Credit Suisse a annoncé qu'il avait bloqué ou gelé plus d'un tiers des avoirs russes enregistrés en Suisse. 17,6 milliards de fonds bloqués ou gelés correspondent à plus d'un tiers de tous les avoirs russes déclarés en Suisse.

En mai, la Confédération a également confirmé que Berne avait déclaré 7,4 milliards de francs suisses de réserves et d'actifs de la banque centrale russe comme «actifs non négociables». Le rapport indique par ailleurs que «Berne est prête à participer à des discussions internationales sur la saisie des avoirs gelés de la banque centrale russe.»

Des milliards de dollars russes bloqués en Suisse ne devraient guère favoriser un rôle de médiateur de la part de Berne. De hauts représentants russes ont par ailleurs souligné à plusieurs reprises que la Suisse avait perdu son statut de pays neutre. Ainsi, Guennadi Gatilov, le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations unies à Genève, a souligné que l'attitude de la Suisse vis-à-vis de l'Ukraine avait des répercussions négatives sur le rôle international de Berne. Selon lui, la Suisse a renoncé à son statut de pays neutre pour se ranger du côté de Kiev et de ses sponsors de l'OTAN.

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