La bourde à 4 milliards sur l’AVS n’est pas passée inaperçue cette semaine. Pour rappel, ce mardi 6 août l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a reconnu s’être trompé dans le calcul des dépenses à long terme de l’AVS. Une erreur qui a mis en pétard les socialistes, les Vert-e-s — qui, dès le lendemain, ont annoncé faire recours contre la votation de 2022 sur l’âge de la retraite des femmes – et la libérale-radicale Jacqueline de Quattro qui exige une enquête.
Alors faut-il voter à nouveau sur l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes comme le demande la gauche? L’Union démocratique du centre (UDC) ne l’entend pas de cette oreille.
Dans un communiqué, le comité des femmes UDC romandes estime que «revoter sur cette question serait un non-sens total et démontrerait une fois de plus l'hypocrisie flagrante de la gauche. Celle-ci prône l’égalité homme-femme, mais uniquement lorsque cela favorise les femmes, au détriment de l'équité et de la justice.» Et d’ajouter que «permettre aux femmes de partir plus tôt à la retraite que les hommes est une mesure profondément inégalitaire et discriminatoire envers ces derniers.»
Blick a passé un coup de fil à Marie-Bertrande Duay, la présidente des femmes UDC romandes. Interview.
Marie-Bertrande Duay, en dénonçant l’hypocrisie de la gauche dans votre communiqué, vous n’y allez pas un peu fort?
Non, pas du tout. La gauche revendique l’égalité entre les femmes et les hommes. Or, elle exige également que les femmes partent à la retraite plus tôt que les hommes. Avant cette votation AVS21, une retraite à 64 ans pour les femmes et à 65 ans pour les hommes, relevait d’une grave carence dans notre système légal et d’une majeure inégalité de traitement. Alors oui, c’est hypocrite d’aller se battre contre cette votation.
Pourquoi, vous opposez-vous à un nouveau vote sur le relèvement de l’âge de la retraite?
Premièrement, l’argument principal de la gauche pour appeler à un nouveau vote repose sur cette erreur de calcul de 4 milliards de francs commise par l’OFAS. Néanmoins, je tiens à relever que si le déficit prévu jusqu’à 2033 ne s’élèvera pas à 7 milliards comme il avait été prédit, il reste de 4 milliards! À mon sens, cette erreur de calcul, même si elle reste extrêmement fâcheuse, ne remet pas en cause la votation.
Une erreur à quelques milliards quand même…
La seule fois que le Tribunal fédéral (TF) a invalidé un scrutin, c’était en 2019 sur l’initiative du PDC «Non à une pénalisation du mariage». Les chiffres avancés par le Conseil fédéral étaient faux et n’avaient pas permis à la population de former son opinion.
Justement, sur AVS21 la population a-t-elle pu vraiment former son opinion de manière éclairée si les informations fournies étaient erronées? En ce sens, le recours des Vert-e-s contre le vote de 2022 n’est pas si farfelu.
Le TF devra procéder à une pondération des intérêts entre la sécurité du vote ou l’erreur. Il doit analyser si l’erreur en question était essentielle. Donc que ce soit 4 milliards ou 7 milliards, pour monsieur et madame tout le monde, il s’agit d’un déficit. De plus, il faut encore prouver que ce déficit était un élément central dans la décision de vote. Par exemple, j’ai voté oui au relèvement de l’âge de la retraite des femmes, non pas pour une question de déficit, mais d’égalité de traitement entre hommes et femmes.
Pourtant, en Suisse, les femmes gagnent encore 18% de moins que leurs homologues masculins.
Elles gagnent moins pour des raisons objectives. Car elles travaillent plus à temps partiel que les hommes. Néanmoins, cette tendance recule selon les statistiques de la Confédération. Les hommes font de plus en plus de temps partiel. D'ici à quelques années, on peut imaginer que la situation va s’équilibrer. Il n’y a que 7% des cas où on ignore pourquoi une femme gagne moins qu’un homme, où on n’a pas trouvé de motifs objectifs. Ce n’est pas quelque chose d’institutionnalisé.
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Dans votre communiqué, pour rejeter un départ à la retraite des femmes à 64 ans, vous avancez que ces dernières «sont souvent employées dans des secteurs moins physiques comparés à ceux dominés par les hommes». Vous pensez aux infirmières, aide-soignantes ou encore aux nettoyeuses?
Oui, c’est un travail très physique, je le concède. Mais une grande proportion de femmes exerce des métiers moins physiques que ceux des hommes. Donc il ne fait aucun sens qu’elle obtienne une retraite une année avant ces derniers.
Donc, un nouveau vote, on l’aura compris, c’est un grand non?
Exactement, mais je me réjouis de voir l’analyse du TF.