Le conseiller fédéral Ignazio Cassis a indiqué mercredi que la Chine et l'Inde se sont montrées ouvertes à contribuer à la conférence que la Suisse organise sur la paix en Ukraine. De plus, sur le front des accords de libre-échange avec ces deux pays, les choses pourraient évoluer dans l'année à venir.
La Chine a «pris connaissance» de l'invitation suisse au sommet sur la paix en Ukraine, a déclaré le chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) lors d'une conférence de presse à Pékin. A l'issue de rencontres avec le vice-président chinois Han Zheng et le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, Ignazio Cassis a dit attendre «avec impatience» la réponse de la Chine qui s'est déclarée prête à «donner un coup de main».
Mais, en soirée, Pékin a quelque peu douché cet optimisme. Interrogé sur l'initiative suisse lors d'une conférence de presse régulière mercredi, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères, Wang Wenbin, a déclaré que la Chine continuera à promouvoir les pourparlers de paix et à oeuvrer pour un règlement politique de la crise à sa manière.
L'Inde paraît plus ouverte au projet suisse. Tout en sachant que le chemin est difficile et incertain, l'influent membre du groupe d'Ignazio Cassis. Même s'il n'y a pas de temps à perdre au vu des destructions qui continuent en Ukraine, il est trop tôt pour annoncer où et quand se tiendra l'événement, a toutefois ajouté le conseiller fédéral.
Un «pas» vers la paix
Le chef de la diplomatie suisse a précisé le concept qui sous-tend ce sommet de haut niveau organisé à la demande du président ukrainien: il s'agit d'un «pas» vers la paix, une occasion de discuter les conceptions de différents pays sur les formes que pourrait prendre la paix en Ukraine. Il ne faut cependant pas s'attendre à ce que la conférence débouche sur une «solution» définitive, a averti Ignazio Cassis. «C'est un processus.»
«La Chine nous a dit très clairement que son but est de terminer cette guerre», a dit le conseiller fédéral. «Ce qui m'intéresse, c'est de bénéficier du soutien de la Chine à la recherche d'une solution, sachant que cette dernière garde une bonne relation avec la Russie», a-t-il ajouté.
Il n'y aura pas de conférence de paix conclusive sans la Russie, a souligné Ignazio Cassis. Moscou a dit à maintes reprises rejeter le scénario d'un sommet sur la paix organisé par la Suisse, ne la considérant plus comme une médiatrice neutre.
Intensification des relations avec Pékin
Durant ses deux jours en Chine, Ignazio Cassis a également évoqué un large éventail de questions bilatérales, notamment les liens économiques, les visas et les droits humains. A travers ses échanges, il a notamment constaté le «succès» de la visite effectuée par le Premier ministre Li Qiang à Berne en janvier.
Sur la modernisation de l'accord de libre-échange conclu il y a dix ans avec l'Empire du milieu, Ignazio Cassis a dit «pouvoir imaginer» que le 75e anniversaire des relations bilatérales Suisse-Chine qui sera célébré l'année prochaine «pourrait être une belle date pour relancer de nouvelles négociations». Tout dépend cependant du travail qui peut être effectué par les ministères compétents d'ici-là, a-t-il toutefois temporisé.
Ignazio Cassis a aussi remercié son homologue pour la décision chinoise de supprimer les visas pour les Suisses voulant se rendre en Chine. A cet égard, il a rappelé que la Suisse a concédé un «petit signe très apprécié», qui consiste à faciliter l'octroi de visas aux employés d'entreprises chinoises opérant en Suisse.
Respect des droits humains
Quant à la question sensible des droits humains en Chine, que tout pays occidental se doit d'aborder lors de visites à Pékin, M. Cassis a assuré en avoir beaucoup parlé avec son homologue. Ces droits et le respect des minorités sont des thèmes sur lesquels la Chine a l'intention «de faire des pas» en avant, a-t-il dit.
Interrogé par Keystone-ATS, le chef de la communication du DFAE Nicolas Bideau a lui indiqué que les ministres avaient notamment évoqué les droits religieux de la minorité ouïghoure au Xinjiang. Ce sujet sera «thématisé dans le cadre du prochain round du dialogue sur les droits de l'homme entre la Suisse et la Chine», a-t-il encore écrit.
La Société pour les peuples menacés, elle, est critique face à l'intensification des relations entre les deux pays malgré «une dégradation massive et de plus en plus flagrante» des droits humains en Chine. L'ONG suisse dénonce la répression dont sont notamment victimes les minorités tibétaines et ouïghoures.
«Les préoccupations économiques ne doivent plus prendre le pas sur les droits humains», plaide l'ONG. Pour elle, «les intérêts commerciaux et les droits humains doivent faire l'objet de réflexions communes».
Avancée économique en vue avec l'Inde
Du côté de New Delhi, il y a de «bonnes chances» que l'accord de libre-échange avec l'AELE soit signé avant les élections législatives d'avril dans ce pays, selon Ignazio Cassis. Cela fait 16 ans que les quatre Etats membres de cette association européenne de libre-échange, dont la Suisse fait partie, travaillent sur le projet, a-t-il rappelé.
Dans le cadre de sa tournée asiatique, le chef du DFAE s'est également rendu en Corée du Sud. Il est attendu jeudi aux Philippines, dernière étape de son voyage.
(ATS)