Il n'y a de domaine de la vie qui suscite autant de mythes et de légendes que l'alimentation. On verse du jus de citron sur la viande séchée des Grisons pour favoriser l'absorption de fer et on veille à ne pas manger de myrtilles et de bananes dans le même temps, car leurs effets bénéfiques sur la santé s'annuleraient mutuellement. Mais comment distinguer le vrai du faux? Chantal Coenegracht, diététicienne au sein de l'Association suisse des diététicien-ne-s (ASDD), nous répond.
«Ce n'est pas tout à fait correct: les myrtilles contiennent de nombreuses substances végétales secondaires, c'est-à-dire des colorants, des parfums et des arômes naturels. Celles-ci ont généralement un effet bénéfique sur la santé cérébrale et sur le système cardio-vasculaire. Il existe plus de 100'000 substances de ce type qui n'ont pas encore toutes fait l'objet de recherches approfondies. Mais je n'en connais aucune qui se croise avec les effets bénéfiques d'une banane.»
Vitamine C et fer, comment ça marche?
La viande des Grisons marinée avec du jus de citron suscite également le scepticisme de l'experte. «La vitamine C favorise surtout l'absorption du fer végétal, également appelé fer non-héminique ou fer trivalent, car celui-ci doit d'abord être transformé dans l'intestin. Le fer contenu dans les produits d'origine animale est du fer héminique et est très bien absorbé par le corps.» C'est pourquoi, dans ce cas, il n'est pas nécessaire d'ajouter de la vitamine C.
Ce qui inhibe effectivement l'absorption du fer végétal, ce sont les produits laitiers, le café et le thé noir. Si l'on boit toujours du café le matin en mangeant du pain complet, on absorbe moins bien les substances stimulantes contenues dans les céréales. «Mais en général, les aliments se complètent plus qu'ils ne s'opposent. Plus l'alimentation est variée, meilleur est l'équilibre», conclut Chantal Coenegracht.
Effets secondaires indésirables
Certains aliments peuvent aussi avoir une influence sur l'effet des médicaments. Alors que les bananes et les myrtilles n'ont pas d'interaction, le pamplemousse, lui, est un fruit qui n'est pas du tout apprécié dans les hôpitaux. «Dans l'établissement où j'ai travaillé, nous avons complètement supprimé le pamplemousse du menu», explique Chantal Coenegracht. «Cet agrume a trop d'influences sur l'absorption et le métabolisme de différents médicaments.»
En effet, le pamplemousse inhibe une certaine enzyme dans le foie qui dégrade les médicaments anti-cholestérol et les médicaments cardiovasculaires. En raison de la dégradation plus lente, le médicament reste donc plus longtemps dans le corps et s'accumule avec le temps. L'effet du médicament est alors renforcé, comme si l'on avait pris une double dose.
Le millepertuis, une plante médicinale également prescrite comme médicament, a le même effet sur les antidépresseurs, les immunosuppresseurs et les antihypertenseurs. Le millepertuis stimule certaines enzymes qui accélèrent la dégradation des hormones, ce qui peut rendre inefficaces les contraceptifs comme la pilule.
Il faut aussi faire attention aux produits laitiers, qui peuvent inhiber l'effet des antibiotiques en raison de leur teneur élevée en calcium, ainsi que les aliments riches en protéines, qui influencent les médicaments contre la maladie de Parkinson. Dans ce cas, un intervalle d'environ deux heures entre le repas et la prise du médicament est suffisant. Comme les médicaments et les aliments sont dans la plupart des cas absorbés par l'estomac et traités par le foie, il faut toujours s'informer sur leurs interactions. Cela vaut donc la peine d'en parler à un médecin ou à un spécialiste.