Nous sommes au printemps 2007, quelques mois avant le début de la crise financière mondiale. Credit Suisse (CS) est à son zénith: l'action coûte plus de 90 francs et l'entreprise a une valeur boursière de près de 100 milliards de francs. Le banquier d'investissement Brady Dougan est nommé au poste de CEO.
Lorsque la crise de 2008 frappe de plein fouet le monde bancaire et financier, CS se relève relativement bien de l'effondrement de la grande banque américaine Lehman Brothers. Or, depuis, rien ne va plus: les opérations d'investissement ont été encouragées par la direction du groupe. Depuis, la grande banque n'a fait que décliner. Actuellement, l'action ne vaut que quatre francs et CS n'est évalué qu'à dix milliards de francs.
Près de 1,6 milliard pour la direction du groupe
Cette semaine, la nouvelle direction de la banque a annoncé des mesures radicales. L'ancienne équipe dirigeante, qui a provoqué ce fiasco en commettant des erreurs stratégiques, est partie depuis longtemps. Et profite certainement de la montagne d'argent qu'elle a reçu de CS.
Blick l'a calculé: entre 2007 et 2021, les membres du conseil d'administration et de la direction du groupe CS ont empoché environ 1,6 milliard de francs entre salaires et bonus. Les anciens CEO Brady Dougan (2007-2015, 160 millions) et Tidjane Thiam (2015-2020, 90 millions) ainsi que le président de longue date du conseil d'administration Urs Rohner (2011-2021, 50 millions), ont reçu à eux seuls autour de 300 millions de francs de la part de CS.
Pas de rentabilité des investissements
Michael von Felten, président de l'Association suisse des employés de banque, est choqué. Il critique en particulier le fait qu'aucun des anciens dirigeants n'ait jamais pris ses responsabilités. «Cela pèsera encore longtemps sur la banque, assure-t-il. Pour véritablement faire table rase, il faudrait qu'un Urs Rohner, par exemple, se lève et dise: 'J'ai fait des erreurs et je rembourse une partie de mes indemnités'.»
Marc Chesney, professeur de finance à l'université de Zurich, critique à son tour le fait que, dans le cas de CS, le principe numéro un du libéralisme soit mis de côté: «Ceux qui ont pris des risques doivent en assumer la responsabilité. Mais dans le cas de CS, qui est toujours 'too big to fail', ce sont les contribuables sur qui cela retombe, pas la direction. En conséquence, les contribuables devraient également être représentés au conseil d'administration de CS.»
Le CS ne voit pas la nécessité d'agir
Interrogé à ce sujet, CS indique que les règles internes sont «régulièrement contrôlées et, le cas échéant, adaptées». Actuellement, la banque ne voit pas la nécessité d'agir: «La rémunération du management reflète une multitude de facteurs et doit également être considérée dans le contexte des marchés, d'autres circonstances externes et de la performance de l'entreprise», a déclaré un porte-parole.