La Saudi National Bank sera bientôt l’un des plus gros investisseurs de la grande banque suisse en difficulté, Credit Suisse. Une banque sous le contrôle d’une famille royale pour laquelle la démocratie et les droits de l’homme ne sont pas des priorités. Tout le contraire de Credit Suisse, qui s’engage à respecter, tant bien que mal, les valeurs fondamentales libérales du monde occidental.
Désormais, les deux partenaires, inégaux en termes de valeurs, veulent atteindre un objectif commun: conduire la banque vers un avenir prospère et restaurer sa réputation ternie.
L’homosexualité passible de prison
Alors que les droits des femmes en Arabie saoudite ont connu de (légers) progrès ces dernières années, le tableau reste sombre en ce qui concerne les droits des homosexuels, des lesbiennes et des personnes trans. Les relations sexuelles entre personnes de même sexe peuvent être punies de prison, de coups de bâton et, en théorie, de peine de mort.
A l’inverse, sur la page d’accueil de la banque, on peut lire sous le mot-clé «diversité»: «Il est de notre devoir d’utiliser notre plateforme et notre voix pour faire avancer la diversité, la justice et l’inclusion par le biais d’un engagement social.»
Les valeurs de la banque ne sont manifestement pas compatibles avec celles des nouveaux investisseurs du Proche-Orient. Cela risque-t-il de nuire à la réputation du Credit Suisse?
Une réputation déjà ruinée
Pas vraiment, estime l’expert du domaine Bernhard Bauhofer: «En raison de la chaîne interminable de scandales et de crises, l’image et la réputation de la banque sont déjà tellement détruites qu’il ne faut pas s’attendre ici à une nouvelle détérioration de ces facteurs mous.»
C’est également l’avis d’Esther-Mirjam de Boer, de Get Diversity. Elle souligne que les équipes diversifiées présentent des avantages, notamment dans l’industrie financière: «Des études montrent que les banques ayant des équipes mixtes s’exposent à moins d’amendes et de cas juridiques.» La diversité est donc payante. Un calcul que les Saoudiens, en tant qu’investisseurs stratégiques, devraient également faire, estime-t-elle. Autrement dit, les Saoudiens seraient mal avisés de toucher aux valeurs de Credit Suisse.
La banque suisse sponsorise entre autres la grande fête de la communauté LGBTQIA + qui a lieu chaque année en juin à Zurich. «Nous discutons toujours en interne pour savoir quels sponsors nous conviennent», explique Mentari Baumann, présidente du Zurich Pride Festival, interrogée par Blick. «Il n’y a pas de solutions simples. En principe, nous choisissons des sponsors qui s’engagent pour des collaborateurs/trices queer.» Ce qui semble justement être le cas pour Credit Suisse.