Elisabeth Baume-Schneider ferait bien de profiter au maximum des Fêtes, car son entrée en matière au Conseil fédéral s'annonce musclée. Dès le 1er janvier, elle prendra les rênes du Département fédéral de justice et police (DFJP), dans un timing on ne peut plus délicat: l'Europe est aux prises avec le plus grand flux de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale.
Près de 70'000 Ukrainiens ont cherché refuge dans notre pays, selon les chiffres de fin novembre. À cela s'ajoute une immigration «régulière» en hausse depuis des mois. En septembre, 2681 demandes d'asile ont été déposées, un chiffre qui n'avait plus été atteint depuis la crise des réfugiés de 2015.
Et les chiffres continuent d'augmenter: pour l'année en cours, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) s'attend à un total de 22'000 demandes d'asile, soit 7000 de plus que l'année précédente. Et la vague n'est pas près de s'aplatir, selon les spécialistes.
Sur Elisabeth Baume-Schneider
Un flot de nouvelles et d'anciennes revendications
Forcément, l'UDC ne se fait pas prier pour exploiter politiquement le phénomène. Depuis des années, le parti a fait de l'asile son thème de prédilection. Et comme la gauche est à nouveau à la tête du département en charge, il est plus facile de critiquer.
Voulant sans doute surfer sur cette thématique jusqu'aux élections fédérales de 2023, l'UDC accueille la nouvelle conseillère fédérale socialiste Elisabeth Baume-Schneider avec un catalogue de revendications en matière d'asile. Un réchauffé, pour la plupart, d'anciennes exigences, saupoudré de nouvelles qui sont pour certaines en conflit avec le droit en vigueur... Tour d'horizon.
Plafond pour les demandes d'asile: Selon l'UDC, le Conseil fédéral devrait fixer un plafond chiffré pour l'acceptation des demandes d'asile, correspondant à la moyenne des années 2020 et 2021. C'est ce que demande le conseiller national saint-gallois Mike Egger. En raison de centres d'asile surpeuplés, la Confédération renvoie aujourd'hui des milliers de demandeurs d'asile dans les cantons avant que leur demande ne soit traitée.
Des zones de transit: En collaboration avec les cantons qui ont une frontière avec l'étranger, l'UDC veut que la Confédération crée des zones de transit aux frontières, avec des hébergements et des salles de procédure. «L'entrée en Suisse ne doit être autorisée qu'en cas de décision d'asile positive», souhaiterait le conseiller national argovien Andreas Glarner. En attendant, les demandeurs d'asile devraient rester dans l'une des zones, afin que ceux qui recevraient une décision négative soient directement renvoyés dans leur pays d'entrée.
Suppression du statut S: L'accueil temporaire des personnes considérées comme ayant besoin de protection se fait sans procédure d'asile. Mike Egger est convaincu que cela a conduit à une surutilisation des structures d'accueil à tous les niveaux de l'État. A cela s'ajoute, selon lui, une inégalité de traitement par rapport à tous les autres demandeurs d'asile. La suppression du statut S est nécessaire «pour l'acceptation et la crédibilité de l'Etat social et du système d'asile», estime le jeune élu saint-gallois.
Mais le catalogue de revendications de l'UDC va encore plus loin. Le parti souhaiterait supprimer complètement le système d'asile suisse par le biais de plusieurs propositions:
Arrêt de l'accueil: Le vice-président de l'UDC Marcel Dettling présente ici deux variantes. L'une serait un arrêt immédiat de l'accueil, car en 2022, près de 100'000 réfugiés seront déjà entrés dans le pays. Il propose en outre de n'accueillir que le nombre de demandeurs d'asile qui quittent le pays en contrepartie de leur admission temporaire (actuellement près de 45'000). Marcel Dettling veut ainsi faire pression sur les autorités: au cours des dix dernières années, seules 120 personnes qui n'ont pas obtenu l'asile ont effectivement quitté le pays.
Suspension du droit d'asile en cas de statut S: La conseillère nationale argovienne Martina Bircher est convaincue que le statut S, qui n'est pas compliqué et qui est prolongé jusqu'en mars 2024, conduit à une «culture de bienvenue» pour les réfugiés du monde entier. En septembre, pour la première fois, plus de personnes auraient déposé une demande d'asile qu'une demande de statut de protection S — une tendance à la hausse. «Les communes et les cantons atteignent partout leurs limites de capacité», avertit Martina Bircher. C'est pourquoi aucune demande d'asile ne devrait plus être acceptée tant que le statut S est en vigueur.
Arrêt de l'entrée dans l'espace Schengen-Dublin: Andrea Glarner voudrait faire rejeter toutes les demandes des personnes qui entrent en Suisse en provenance des États Schengen-Dublin. Cela concernerait tous les pays environnants. L'entrée en Suisse ne serait alors possible plus que par avion. Et ce n'est pas tout: «Les personnes pour lesquelles la Suisse n'est pas entrée en matière doivent être hébergées dans des logements spéciaux, dans des endroits aussi peu attrayants que possible.» Elles ne recevraient que l'aide d'urgence, mais ni l'aide sociale ou d'autres prestations.
«Avec ces plans, nous voulons aider le Conseil fédéral», assure Martina Bircher. L'actuelle ministre de la Justice, Karin Keller-Sutter, a toujours cherché une solution à l'échelle de l'UE, plaide Marcel Dettling. «Mais ceux qui espèrent que tous les États membres parviendront à se mettre d'accord croient au père Noël», selon le Schwytzois.
La Suisse a besoin, selon l'UDC, de ses propres solutions en matière d'asile. «Nous ne voulons pas seulement critiquer, mais présenter des propositions concrètes afin de faciliter l'entrée en fonction d'Elisabeth Baume-Schneider», résume Mike Egger. La Jurassienne sera-t-elle reconnaissante de ce cadeau de Noël anticipé?