Le Conseil fédéral entame la dernière ligne droite de l'accord avec l'Union européenne (UE). Les textes définitifs de l'accord seront probablement paraphés en mai. Avant l'été, le gouvernement national veut mettre en consultation non seulement le nouveau paquet de négociations, mais aussi les mesures d'accompagnement nationales qui y sont liées. En ce qui concerne la protection des salaires, il a déjà tranché le nœud gordien et ainsi rallié la gauche et les syndicats à sa cause.
Un autre gros morceau
Mais la Confédération doit encore s'attaquer à un gros morceau pour apaiser la classe moyenne: comment la Suisse peut-elle se protéger si la libre circulation des personnes entraîne de graves problèmes économiques et sociaux?
La solution pourrait venir d'une nouvelle clause de sauvegarde. Une clause que la Suisse pourrait appliquer unilatéralement contre la volonté de l'UE et imposer avec ses propres mesures.
Quatre indicateurs en ligne de mire
Le ministre suisse la Justice Beat Jans souhaite clarifier rapidement la mise en œuvre de la politique intérieure. Selon les informations reçues, il devrait bientôt présenter son concept au Conseil fédéral – probablement à la mi-mai. A cette occasion, Beat Jans veut définir des critères concrets pour déterminer quand la clause de sauvegarde doit être mise en jeu, comme l'a également rapporté la «NZZ». Le magistrat socialiste pense à un «mécanisme de déclenchement national». Celui-ci serait réglé par un nouvel article 21b de la loi sur les étrangers.
La mise en œuvre de cet article fait actuellement l'objet de vives discussions en coulisses. Il semblerait que des valeurs seuils fixes pour quatre indicateurs soient en ligne de mire: si l'immigration nette, le chômage, l'emploi frontalier et le taux d'aide sociale augmentent trop fortement, le Conseil fédéral devrait être contraint d'examiner l'activation de la clause de sauvegarde. Les valeurs seuils concrètes seraient probablement fixées par le Conseil fédéral dans une ordonnance. On ne sait pas encore comment les paramètres seront définis précisément.
Il serait par exemple envisageable que le Conseil fédéral examine la clause de sauvegarde si le taux d'aide sociale dépasse 4%, sachant qu'il oscille actuellement autour de 3%. La même chose pourrait s'appliquer au taux de chômage. Le Conseil fédéral devrait en tout cas agir dès qu'une seule valeur seuil est dépassée.
D'autres domaines envisagés
Mais il ne faut pas s'arrêter aux quatre indicateurs durs. D'autres domaines sont en discussion et doivent être intégrés dans un concept de monitoring. D'ici la fin de l'année, Beat Jans devra donc définir quels critères seront utilisés dans des domaines tels que le marché du travail, le logement, les transports, la sécurité sociale et éventuellement d'autres champs d'action.
Dans ce domaine, le Conseil fédéral ne devrait pas agir de manière contraignante, mais conserver une plus grande marge de manœuvre par le biais d'une formulation potestative. En outre, il est également question d'un droit de proposition cantonal.
Agir au niveau des cantons
En ce qui concerne les mesures de protection, Beat Jans ne veut pas uniquement agir au niveau national. Des mesures purement régionales ou spécifiques à une seule branche pourraient aussi être envisagées. Si, par exemple, le nombre de frontaliers au Tessin est jugé trop élevé, il serait possible d'agir uniquement dans le canton.
On pourrait envisager des plafonds, des contingents ou une priorité effective des travailleurs indigènes pour les postes à pourvoir. Il serait également possible de renforcer le contrôle des conditions de travail et de salaire. Le cas échéant, la durée de recherche d'un emploi pourrait être limitée pour les étrangers et le droit de séjour pourrait être retiré même en cas de chômage involontaire.
La question reste de savoir quelles mesures seront exclusivement du ressort du Conseil fédéral et lesquelles devront être soumises au Parlement. Selon les informations, Beat Jans tâte actuellement le terrain auprès de quelques parlementaires pour savoir quelle option ils considèrent comme la plus judicieuse. Il est toutefois clair qu'en cas d'urgence, le Conseil fédéral donnerait d'abord la priorité aux mesures compatibles avec l'accord sur la libre circulation des personnes.
L'UDC n'y croit pas
On ne sait pas encore si Beat Jans parviendra à imposer une clause de sauvegarde forte. Celle-ci serait surtout un argument important pour le Parti libéral-radical (PLR) et le Centre afin de rassembler leur base derrière eux.
Pour la gauche en revanche, elle a moins d'importance, car elle se concentre principalement sur une protection salariale efficace. Toutefois, la clause de sauvegarde est considérée comme un levier important dans la lutte contre l'initiative des 10 millions de l'Union démocratique du centre (UDC).
Beat Jans ne peut de toute façon pas marquer de points auprès de l'UDC. Celle-ci rejette avec véhémence le «traité de soumission à l'UE», comme elle appelle le paquet. Elle ne croit pas non plus que le Conseil fédéral aille au-delà d'un simple examen de la clause de sauvegarde et la considère donc comme une simple manœuvre de diversion. L'UDC mise sur ses deux initiatives populaires contre la Suisse à 10 millions d'habitants et pour une meilleure protection des frontières.