C'est une vertu suisse: une protection existe pour chaque étape de la vie. Vieillesse, maladie, invalidité, chômage, accident, voire même parentalité. Tout est assuré. Mais ce système a un prix. En 2022, les assurances sociales ont encaissé près de 205 milliards de francs et dépensé près de 180 milliards, comme le montrent les derniers chiffres de la Confédération.
Le secteur le plus important est la prévoyance vieillesse: environ 50 milliards ont été versés à l'AVS et près de 80 milliards aux caisses de pension. Plus de 30 milliards de francs ont été injectés à l'assurance maladie obligatoire. D'autres milliards de francs viendront s'y ajouter dans les années à venir.
Des milliards pour la 13e rente
L'AVS est la pièce maîtresse de «l'Etat social», car tout le monde, ou presque, en profite. Elle est précieuse à la population, comme l'a montré le net oui à la votation du 3 mars. Rien que pour ce projet, les dépenses de l'AVS augmenteront de 4 à 5 milliards de francs par an à partir de 2026.
La prochaine extension sera bientôt à l'ordre du jour. Si le Centre fait aboutir son initiative pour la suppression de la pénalisation du mariage dans l'AVS et qu'elle est acceptée par les électeurs, 3 milliards de francs supplémentaires seraient nécessaires.
Mais la Suisse cherche aussi à faire des économies. Le Conseil fédéral souhaite supprimer les rentes de veuve à vie pour les verser uniquement pour une durée limitée. La Confédération et l'AVS pourraient ainsi économiser 1 milliard de francs. En outre, la commission sociale du Conseil national souhaite supprimer les rentes pour enfants des parents ayant atteint l'âge de la retraite. Cela permettrait d'économiser plus de 200 millions. Le Conseil national se prononcera jeudi sur cette question.
350 millions pour réduire les primes – ou des milliards?
Les électeurs ont le pouvoir de décider si le développement social va se poursuivre. Le 9 juin déjà, l'initiative du PS pour l'allègement des primes sera soumise aux urnes. Celle-ci vise à plafonner les primes d'assurance maladie à 10% du revenu du ménage. Coût pour la Confédération et les cantons: 4,5 milliards de francs.
Dans un sondage Tamedia, 64% des personnes interrogées se prononcent en faveur de l'initiative, contre 21% seulement qui s'y opposent. Si l'initiative échoue, le contre-projet indirect du Parlement entrera en jeu. Les cantons ne devront alors débloquer que 350 millions supplémentaires pour la réduction des primes.
2 milliards pour la réforme des caisses de pension
Les événements s'enchaînent. A l'automne, la prochaine bataille sur les retraites sera la réforme des caisses de pension. Le point central est l'abaissement du taux de conversion minimal dans le régime obligatoire LPP de 6,8% aujourd'hui à 6,0%. Cela entraînerait une baisse des rentes. Des mesures de compensation doivent permettre d'éviter autant que possible les situations difficiles, sans aucune assurance toutefois.
Ce seraient principalement les cotisations salariales supplémentaires des employés et des employeurs qui permettront d'alimenter le deuxième pilier: à partir de 2025, cela représente en moyenne 2,1 milliards de francs par an. Mais rien n'est sûr, puisque les syndicats combattent le projet par référendum. Dans un sondage Sotomo, 56% des personnes interrogées rejettent la réforme.
Comment financer l'extension des prestations sociales?
Avec la 13e rente AVS, des sources de revenus supplémentaires seront nécessaires, du moins à moyen terme. Il existe en tout cas une foule d'idées sur la manière de financer l'extension des prestations sociales.
- Pourcentages salariaux: Certaines assurances sociales sont déjà cofinancées par des pourcentages salariaux. Il est donc logique que ceux-ci soient également en ligne de mire pour un financement supplémentaire. Par exemple, 1% de salaire supplémentaire pour l'AVS rapporterait plus de 4 milliards de francs. Il existe en outre une certaine marge de manœuvre pour les cotisations salariales, puisque les contributions sociales ont baissé dans d'autres domaines, par exemple grâce à la diminution du nombre d'accidents dans l'assurance-accidents. En outre, une chute se dessine pour l'assurance chômage, qui est financièrement solide. Les pourcents de salaire ainsi économisés pourraient être redirigés vers la caisse de l'AVS, sans que cela se ressente dans le porte-monnaie des travailleurs.
- Taxe sur la valeur ajoutée: Une augmentation de la TVA est aussi une option. Un point de pourcentage supplémentaire rapporterait 3,5 à 4 milliards de francs.
- Impôt sur les transactions: Le Centre a évoqué l'idée d'un impôt sur les transactions du marché financier. Une telle taxe pourrait s'appliquer aux transactions boursières ou aux transferts d'argent. Le Département des finances estime grossièrement le potentiel à 5 milliards de francs.
- Impôt sur les successions: Le Parti vert'libéral remet sur la table sa vieille revendication d'un impôt national sur les successions «sur les héritages élevés». Une initiative populaire rejetée en 2015 aurait rapporté 3 milliards de francs.
- Impôt fédéral direct: Il serait également envisageable d'augmenter l'impôt fédéral direct si la Confédération devait injecter de l'argent supplémentaire. Avec 29 milliards de francs, il s'agit déjà aujourd'hui de la principale source de revenus de la Confédération.
- Budget fédéral: Il serait peut-être possible d'économiser l'un ou l'autre milliard de francs dans d'autres domaines du budget fédéral, qui atteint désormais 80 milliards de francs par an.