Blé, huile d'olive, café...
Le changement climatique fait monter les prix de plusieurs aliments

La sécheresse en Espagne et en Italie fait chuter les rendements des cultures. Des économistes renommés mettent en garde contre la persistance de prix élevés en raison du changement climatique.
Publié: 01.05.2023 à 18:04 heures
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En 2022, la production d'huile d'olive a diminué de moitié en Espagne, le plus grand pourvoyeur de ce produit au monde. Les plus importantes plantations se trouvent en Andalousie, comme ici dans la région de Jaén.
Photo: Getty Images
Beat Schmid

La météo en Espagne est devenue folle. Des températures allant jusqu'à 40 degrés poussent les gens sur les plages dès la fin du mois d'avril – et les agriculteurs ont de profondes rides d'inquiétude sur le front. Après une année 2022 marquée par la sécheresse et la canicule, ils risquent déjà de connaître leur deuxième année de faibles rendements.

L'Espagne produit la moitié de l'huile d'olive mondiale. Au cours des douze derniers mois, sa production a diminué de moitié pour atteindre environ 780'000 tonnes. Cela a des conséquences sur les prix: ils ont augmenté de près de 60% depuis juin dernier. Sur les marchés des matières premières, la tonne se négocie actuellement à approximativement 5400 francs – un prix jamais atteint auparavant.

Un printemps des plus secs

La faute au manque de pluie qui dure depuis trois ans en Espagne et qui pourrait bien ne pas s'arrêter cette année. Le mois d'avril sera probablement le plus sec depuis le début des relevés. Selon les données du service météorologique espagnol, le mois de mars était déjà le deuxième mois le plus chaud de ce siècle – et le deuxième plus sec. Les pluies sporadiques en Andalousie et dans d'autres régions devraient être loin d'être suffisantes.

Les analystes préviennent qu'un été particulièrement sec pourrait entraîner des récoltes encore plus faibles cette année. Et donc une nouvelle hausse des prix.

Le changement climatique fait grimper l'inflation

Nicolai Tangen dirige le plus grand fonds souverain du monde, Norges Bank Investment Management, qui gère les énormes revenus du pétrole norvégien. Au total, cet ancien gestionnaire de «hedge funds» est responsable d'un volume de placement de 1300 milliards de dollars.

Dans le «Financial Times», il a déclaré cette semaine que l'inflation était difficile à maîtriser. La hausse des coûts du travail se répercute déjà sur le renchérissement. «Mais nous voyons aussi les effets du changement climatique sur l'inflation», a-t-il ajouté. La hausse des prix, comme ceux de l'huile d'olive, mais aussi des pommes de terre et du café, sont pour Nicolai Tangen des signes clairs que l'inflation va continuer à augmenter dans les années à venir.

Le changement climatique sous la loupe

Le changement climatique alimente-t-il l'inflation ? L'économiste Klaus Abberger, du Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l'EPFZ, le confirme. «Dans l'ensemble, le changement climatique devrait plutôt stimuler davantage les hausses de prix», déclare celui qui dirige le domaine des enquêtes conjoncturelles au sein de ce centre.

«Les climatologues nous prédisent que les phases météorologiques extrêmes seront plus fréquentes», ajoute-t-il. Ce n'est pas seulement le cas en Espagne, mais aussi en Italie: «L'année dernière, la sécheresse dans la plaine du Pô a nettement influencé la disponibilité et les prix de la semoule de blé dur.» En 2022, l'Italie a connu son année la plus sèche depuis le début du XIXe siècle.

«Selon l'endroit où les phénomènes météorologiques se produisent, différentes denrées alimentaires peuvent être affectées», explique l'économiste. Pour le blé, la situation reste en outre tendue en raison de la guerre en Ukraine, ajoute-t-il: «Ainsi, d'éventuelles pertes de récolte peuvent avoir des répercussions très immédiates.»

Migros et Coop ont augmenté les prix

Dans les magasins suisses, les prix de l'huile d'olive ont déjà été augmentés. «Des ajustements de prix ont dû être effectués en raison de l'augmentation des prix de l'emballage, du transport et surtout des matières premières», explique à Blick un porte-parole de Coop. Son collègue de Migros confirme que la situation est tendue: «Cela a malheureusement aussi un impact sur les prix.»

Actuellement, le stock d'huile d'olive est toutefois garanti chez Migros, précise le porte-parole. Une bouteille de Monini Classico coûte aujourd'hui 14,95 francs le litre. L'huile d'olive Don Pablo d'Espagne est disponible au prix de 9,50 francs le litre.

«L'inflation de la cupidité»

Nicolai Tangen, du fonds souverain norvégien, met en garde contre un autre phénomène. Il l'appelle «inflation de la cupidité» – c'est-à-dire que les producteurs, les transformateurs ou les détaillants profitent de la situation et augmentent les prix de manière excessive.

«Je trouve que le mot cupidité est un peu fort», rétorque l'économiste Klaus Abberger. Mais ce que l'on constate effectivement sur le plan macroéconomique, c'est que le secteur des entreprises a pu «assez bien protéger ses marges» malgré la hausse des coûts des produits intermédiaires ou de l'énergie. Cela signifie que de nombreuses entreprises ont pu, selon lui, non seulement répercuter sur leurs clients les coûts plus élevés des intrants (les éléments entrant dans les processus de fabrication, au niveau purement agricole comme au niveau des services), mais également imposer une majoration de leurs propres prestations: «Cela ne va pas de soi dans de telles situations.»

Une autre possibilité serait que les entreprises amortissent leurs coûts de prestations intermédiaires plus élevés avec leur propre marge. Mais cette fonction d'amortisseur du secteur des entreprises n'est «pas très prononcée», dit Klaus Abberger: «Au contraire, les entreprises ont même pu en partie augmenter leur marge.»

Les détaillants suisses font-ils de même? Logiquement, personne ne l'admettrait, même si c'était le cas. «Coop s'engage pour des prix équitables et conformes au marché», explique le porte-parole. L'entreprise examinerait très attentivement toute demande de prix de la part des fournisseurs. «Si nous ne sommes pas d'accord avec la politique de prix d'un fabricant, nous retirons des produits de notre assortiment en dernier recours.» Actuellement, on trouve encore de l'huile d'olive dans les points de vente.

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