Jeudi, le Parlement a approuvé la hausse progressive du budget de l’armée suisse jusqu’en 2024. Les dépenses militaires, qui avoisinent actuellement les 5,4 milliards de francs, devraient atteindre les sept milliards en 2030. Le Conseil des États a emboîté le pas au Conseil national en approuvant cette augmentation.
Cet argent supplémentaire doit permettre d’accélérer la modernisation et l’équipement des formations de l’armée, a souligné le conseiller aux États UDC Werner Salzmann.
Reste la question du financement de cette augmentation: d’où vont provenir ces milliards supplémentaires? Pour la ministre de la Défense Viola Amherd, la question n’a pas lieu d’être. Aucune restriction économique ou augmentation d’impôts ne devraient être appliquées pour financer cette hausse, a assuré la conseillère fédérale au Conseil national en mai: «Personne ne doit souffrir des dépenses supplémentaires de l’armée.»
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Les finances risquent de se retrouver dans le rouge
Cette déclaration a laissé les spécialistes des finances perplexes. Pour 2023, le plan financier de la Confédération présente certes une marge de manœuvre de 300 millions de francs… Mais ce coussin disparaîtra dès la première augmentation des fonds de l’armée. Si, en 2024, l’armée reçoit encore davantage de moyens, les chiffres menacent de se retrouver dans le rouge.
Le vote de Viola Amherd au Conseil des États jeudi était attendu avec impatience. Dans la petite chambre, elle n’a soudain plus rien dit sur le financement, mais seulement sur les besoins «urgents» de l’armée.
Récemment, le ministre des Finances Ueli Maurer avait déclaré dans une interview au «Tages-Anzeiger» qu’il serait difficile de respecter le frein à l’endettement: «Le budget ne peut pas contenir tout ce qui a été décidé par le Parlement.»
Moins d’argent pour l’éducation?
«Sans augmentation d’impôts, l’augmentation du budget de l’armée risque d’entraîner des coupes rigoureuses dans les domaines de la formation, de l’agriculture, de la coopération internationale ou de la culture», alerte de son côté le conseiller aux États socialiste Daniel Jositsch. Le cinquantenaire n’émet pas ces craintes par hasard.
Werner Salzmann a déclaré à la «NZZ» que la Confédération pourrait dépenser moins que prévu dans le domaine social, les hautes écoles et l’aide au développement au cours des prochaines années. «Il n’y a pas de menaces de coupes, mais nous devons freiner quelque peu la croissance de ces dépenses au profit de l’armée», a préconisé le conservateur à Blick. En ce qui concerne l’agriculture, son parti n’est pas prêt à parler de coupes.
Même le politicien du centre Peter Hegglin part du principe que l’on ne pourra pas «éviter de fixer des priorités dans les différents domaines d’activité». Les Verts craignent qu’il manque désormais de l’argent pour le financement des énergies renouvelables ou l’aide au développement. La bataille pour les fonds fédéraux devrait donc commencer.
D’onéreux projets à n’en plus finir
La politique financière des prochaines années reste toutefois liée à de nombreuses incertitudes. Il est par exemple difficile d’estimer aujourd’hui les coûts que la Suisse devra assumer pour la prise en charge des réfugiés ukrainiens et la manière dont les dettes liées à la pandémie de Covid-19 seront épongées.
D’autres projets risquent de mobiliser des milliards supplémentaires. Une majorité de centre-gauche au Parlement veut augmenter les budgets pour les réductions de primes. Des discussions pour diminuer le coût de l’énergie pour les citoyens devraient également être au centre des répartitions budgétaires.
L’impôt minimum sur les grandes entreprises de l’Organisation de coopération et de développement économiques pourrait apporter un peu d’aide. Mais pour l’instant, les propositions d’économies provenant des politiciens restent rares.