Un projet qui a même convaincu ses opposants
Cette commune va abattre dix hectares de forêt avec la bénédiction du WWF

Dans la commune de Rheinwald (GR), une forêt d'épicéas de 109'000 mètres carrés est rasée pour faire place à une nouvelle plaine alluviale. Malgré la taille du projet, la population, la Confédération et les organisations de protection de la nature soutiennent le projet.
Publié: 21.09.2024 à 11:55 heures
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Dernière mise à jour: 21.09.2024 à 12:22 heures
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On pourrait croire qu'une tempête est passée par là, mais c'est bien la commune qui a décidé de raser 109'000 mètres carrés de forêt.
Photo: STEFAN BOHRER
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Sebastian Babic et Stefan Bohrer
Malgré le travail colossal demandé, ils ne sont que deux à raser les 109'000 mètres carrés de forêt dans la commune de Rheinwald (GR).
Photo: STEFAN BOHRER

Il s'agit de l'un des projets de déforestation les plus spectaculaires de ces dernières années en Suisse. Près de la commune de Rheinwald (GR), une forêt d'épicéas saine est défrichée sur environ un kilomètre.

Sur plus de 100'000 mètres carrés, les arbres sont abattus à tout-va. Des milliers de troncs s'empilent sur toute la longueur de la surface à défricher. Environ 15 terrains de football de forêt, principalement des épicéas, doivent faire place à une nouvelle plaine alluviale. Un projet qui coûte environ huit millions de francs.

Cependant, un détail ne manque pas d'étonner: Malgré cette intervention radicale, la population, la Confédération, les politiciens locaux et même les organisations de protection de la nature soutiennent le projet. Comment cela se fait-il? Blick part à la recherche d'indices.

Deux hommes derrière ce travail colossal

Ceux qui s'attendent à voir une armada de forestiers au vu de l'ampleur de ce défrichement seront déçus. Sur place, seuls deux hommes sont à l'œuvre. Marius Furler est garde forestier de la commune de Rheinwald. Il est «bûcheron» et surveille le défrichement pour le compte de la commune. A ses côtés, seul Jürg Simmen, entrepreneur forestier de «Rheinwald Holz GmbH», participe à cette opération de défrichage historique.

La rapidité avec laquelle on procède ici est d'autant plus impressionnante. Marius Furler abat les arbres avec sa tronçonneuse, tandis que Jürg Simmen «épluche» les arbres abattus en quelques secondes avec sa pelleteuse, les coupe et les répartit sur différentes piles en fonction de leur taille. Pour lui, le défrichage du tronçon du Rhin postérieur est un moment fort de sa carrière: «Pour un défrichage aussi important, il faudrait normalement aller au Canada.»

Pour stabiliser une autoroute, mais pas que

En quelques semaines, les deux hommes ont défriché près des deux tiers de la surface prévue. Les travaux ont débuté à la mi-août. Un rythme qui fait froid dans le dos. Jürg Simmen relativise: «Normalement, nous défrichons sur des pentes raides. Une surface vaste et plane comme celle que nous rencontrons ici est une rareté chez nous». Et elle est – si l'on peut dire – assez facile à défricher.

La raison du défrichement est tout aussi simple, comme le raconte le chef de projet Claudio Caflisch du bureau d'ingénieurs Entegra AG: «Depuis 2011, les cantons ont, selon la loi sur la protection des eaux, le mandat légal de procéder à des revitalisations.» De plus, la canalisation du tronçon de rivière au cours des dernières décennies l'a fait s'enfoncer de plus en plus dans le sol, menaçant ainsi également la stabilité de l'A13 située au-dessus.

Le projet prévoit d'élargir le lit du Rhin de 20 à 60 mètres. Cela permettra notamment de renforcer la protection contre les inondations.
Photo: zVg

La revitalisation n'est-elle donc qu'une stabilisation routière cachée? «Non», répond clairement le président de la commune Christian Simmen. «La stabilisation du tracé de l'A13 est un aspect secondaire important, mais ce n'est pas la raison». Il s'agit selon lui de la protection contre les crues et du rétablissement de l'état naturel.

Avec le soutien de Pro Natura et WWF

Blick s'est entretenu avec plusieurs anciens détracteurs du projet. Tous ont entre-temps abandonné leur scepticisme initial. Notamment parce que les organisations de protection de la nature Pro Natura et WWF ont également donné leur bénédiction.

Anita Mazzetta, directrice du WWF Grisons, est également d'accord avec le défrichement de la forêt saine «La forêt d'épicéas a été reboisée à l'origine comme mesure de remplacement pour le barrage de Sufner». On ne fait donc que rétablir l'état initial, tel qu'il était il y a des décennies.

Des travaux pour «protéger la nature»

Il y a environ 60 ans, un barrage a été construit à Sufers. La forêt ayant disparu, la commune de Rheinwald a été reboisée. C'est ainsi qu'est née la forêt qui est actuellement à nouveau défrichée.

Le nouveau tronçon de rivière sera trois fois plus large que les 20 mètres actuels. Le WWF a été impliqué dans la planification dès le début. «Les travaux sont une mesure de protection de la nature. Au lieu d'une forêt d'épicéas monotone, on crée un paysage alluvial qui doit offrir un habitat approprié à encore plus d'êtres vivants», explique Anita Mazzetta.

Un projet d'immeuble collectif avec le bois coupé

Au niveau national, la revitalisation de Rheinwald n'est que la pointe de l'iceberg. La Suisse appuie sur l'accélérateur dans ce domaine. Rien qu'entre 2011 et 2019, quelque 160 kilomètres de cours d'eau ont été revitalisés.

Des plans existent déjà pour l'utilisation du bois abattu, comme le dit le président de la commune Simmen: «Une partie considérable, notamment les branches et les cimes, sera transformée en bois de chauffage.» Mais avec une autre partie, notamment les gros troncs, on a d'autres idées en tête: «Nous prévoyons de construire un immeuble collectif avec le bois.» Le conseil municipal doit certes encore donner son accord: «Un tel projet prestigieux serait toutefois un phare écologique dans la région.»


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