La conseillère nationale socialiste Priska Seiler Graf n'y va pas de mains mortes: «Il est révoltant qu'un haut cadre militaire appelle publiquement à la violation du droit international humanitaire», estime la présidente de la commission de sécurité du Conseil national. «Cela ne peut pas être toléré!»
Mais que s'est-il passé pour en arriver là? Cet énervement tire son origine d'une intervention de Thomas Vogel dans le magazine «Schweizer Soldat». L'officier a demandé un fort réarmement de l'armée suisse.
Le colonel de l'état-major général y fait référence à la guerre en Ukraine et aux armes qui y sont utilisés et que l'armée suisse n'a pas en sa possession. Il évoquait entre autres les drones, les mines antichars et l'artillerie à roquettes, mais aussi des armes à sous-munitions. Ces dernières étant totalement proscrites par le droit international.
Des propos punissables
Thomas Vogel est catégorique: l'armée suisse devrait maintenant acheter tout ce qu'elle peut obtenir. «Mais que faisons-nous à la place? Nous tombons dans les redoutables discussions helvétiques». Mais Thomas Vogel ne fait que se moquer de ces discussions, rapporte le «Wochenzeitung».
L'article de Vogel a fait réagir le Parlement. Priska Seiler Graf a voulu demander au Conseil fédéral ce qu'il pensait du fait que des cadres de l'armée s'engagent publiquement pour l'achat d'armes à sous-munitions. En effet, celles-ci ne sont pas seulement proscrites, elles sont même interdites en Suisse. La loi sur le matériel de guerre en interdit l'acquisition, le stockage ou la transmission. Le «Wochenzeitung» fait remarquer que les propos de Thomas Vogel, incitant à acheter des armes à sous-munitions, sont même punissables.
La réponse du Conseil fédéral jugée décevante
Le Conseil fédéral se distancie toutefois du colonel. «L'officier de milice cité s'est exprimé à titre privé dans ce média indépendant de l'armée», écrit le gouvernement dans sa réponse. Cela ne reflète pas la position du Conseil fédéral. Il rejette les armes à sous-munitions. Et cela est aussi clairement réglementé dans l'armée suisse.
Après avoir ratifié la convention sur les armes à sous-munitions en 2012, la Suisse a fait détruire de grands stocks. Une décision qui a également été remise en question par le conseiller national UDC David Zuberbühler, qui avait suggéré une nouvelle acquisition en raison de la guerre en Ukraine. Mais le Conseil fédéral ne veut rien savoir. L'utilisation d'armes à sous-munitions a «de graves conséquences humanitaires en raison de l'effet indiscriminé, du nombre élevé de bombes non explosées, mais aussi de l'effet direct ou indirect».
Malgré le rejet du Conseil fédéral, la députée socialiste Priska Seiler Graf reste insatisfaite. «Cet officier s'oppose publiquement à la position officielle de la Suisse. Ce n'est tout simplement pas possible», estime-t-elle. Entre les lignes, le Conseil fédéral laisse même entendre qu'il s'en moque. «C'est très lâche! J'attendais du Conseil fédéral qu'il le réprimande». Mais au moins, l'interdiction des armes à sous-munitions ne sera pas remise en cause.