Pour le Conseil fédéral, les choses sont claires: d'ici la fin de l'année, quatre Ukrainiennes sur dix ayant fui leur pays devraient avoir un emploi en Suisse. Aujourd'hui, on peut dire que l'objectif n'est pas encore atteint. Selon le Secrétariat d'État aux migrations, à peine 30% ont un emploi. On ne sait pas combien peuvent en vivre.
Le Conseil fédéral veut maintenant serrer la vis. En septembre, le gouvernement a annoncé que les Ukrainiens ayant fui leur pays pourraient «être obligés de participer à des mesures d'intégration». Des réductions de l'aide sociale sont même possibles.
Alina (26 ans) a fui l'Ukraine en mars de l'année dernière pour venir en Suisse. Elle avait en poche un Bachelor et beaucoup de motivation pour trouver un travail dans ce pays. «J'ai envoyé plus de 1000 candidatures, car je ne voulais pas être un fardeau pour les services sociaux». Elle a essuyé autant de refus.
Dès que le chef a appelé, tout est allé très vite
Lorsqu'après avoir demandé trois fois, elle a obtenu une promesse d'embauche dans une chaîne de café internationale, ce sont les autorités qui ont laissé Alina en plan. «En tant qu'Ukrainienne, j'ai besoin d'un permis de travail en Suisse, j'ai attendu plus d'un mois pour l'obtenir». Heureusement, son patron n'a pas donné le poste à quelqu'un d'autre pendant ce temps.
Il a même décroché lui-même le téléphone pour elle et a fait une réclamation auprès du canton de Berne, qui avait mis beaucoup de temps à délivrer le permis. «Après l'appel téléphonique, tout est allé très vite, l'autorisation est arrivée en un jour». Alina se réjouit donc que le Parlement supprime à l'avenir l'obligation d'autorisation pour les Ukrainiens et la remplace par une obligation d'annonce.
«En Ukraine, les entreprises frappaient à ma porte, ici je n'ai reçu que des réponses négatives, beaucoup n'ont même pas réagi à ma candidature», raconte Alina. La jeune femme garde l'espoir de trouver un jour le travail de ses rêves. En attendant, elle travaille dans un café.
Des mois d'attente pour un cours de langue
Miroslava (56 ans) a fui en Suisse il y a plus de deux ans déjà. Pendant 23 ans, cette historienne a travaillé comme enseignante en Ukraine, puis dans l'immobilier. Aujourd'hui encore, elle a du mal à trouver un emploi durable en Suisse. Elle a déjà travaillé en tant qu'employée temporaire dans une usine, où elle faisait le ménage. Ses connaissances en allemand n'étaient pas suffisantes pour obtenir un meilleur emploi. Depuis un accident de vélo, elle ne peut toutefois plus travailler physiquement.
«Jusqu'à présent, l'État suisse ne m'a pas beaucoup aidée, ce sont des particuliers et des ONG qui m'ont toujours soutenue», explique Miroslava. Son voisin l'a par exemple aidée à rédiger des lettres de motivation. Mais même avec cette aide, elle a eu du mal à prendre pied dans la vie professionnelle. «Une fois par mois, je rencontrais une assistante sociale et je lui disais que je voulais apprendre l'allemand».
Il a fallu neuf longs mois à Miroslava pour obtenir une place dans un cours d'allemand. Un cours intensif pour débutants. Travailler en parallèle était difficile. «J'ai toujours pensé que je retournerais à Lviv. Aujourd'hui, je dois dire que je veux rester à long terme.»
«Nous voulons être utiles»
Miroslava aimerait bien aider sa famille et ses anciens élèves sur le front. «Le fait que je ne puisse pas les soutenir financièrement jusqu'à présent me fait mal», raconte-t-elle. Beaucoup de ses connaissances et de ses élèves sont morts à la guerre.
Victoria (45 ans) a également dû faire preuve de persévérance dans sa recherche d'emploi. Elle travaille aujourd'hui à 60%, répartis sur cinq jours de travail. Elle fait la vaisselle, le ménage et aide aux travaux de cuisine. Elle dit qu'elle et ses trois enfants ne peuvent pas vivre de ce salaire. Lors de procédures de candidature, elle a dû s'entendre dire à maintes reprises que les entreprises ne voulaient pas embaucher de personnes avec un statut S. «Pourtant, nous pouvons et voulons être utiles, c'est important pour nous», raconte Victoria.
Avec ses trois enfants et les frais de garde locaux, elle ne peut toutefois pas travailler à temps plein. Elle rêve de retrouver un jour un emploi dans un laboratoire médical. «Pour cela, j'ai besoin de meilleures connaissances en allemand, mais je m'applique à apprendre pendant mon temps libre.»