À quoi ressembleront les athlètes suisses lors de cette cérémonie d'ouverture et plus généralement durant cette compétition parisienne? La collection «été-été 2024» a été dévoilée en mai dernier par Swiss Olympic en partenariat avec Ochsner Sport et ON, la marque de Roger Federer. Blick a sondé plusieurs acteurs du milieu de la mode en Suisse pour en savoir plus sur ce qu'ils pensent du design des tenues. Leurs retours sont généralement très positifs.
«Je trouve que cette tenue ne fait pas très suisse, remarque Nicholas Hänny, CEO de la marque suisse Nikin. Mais je le dis dans le bon sens du terme. La Suisse a trop souvent l'image d'une certaine rigidité, c'est tout le contraire des tenues qui ont été proposées. Pour tout dire, je suis vraiment fan de ce qui a été réalisé.»
Un avis que partage Daniela Correia, styliste de mode. «Le fait que ce soit un mélange de couleurs et de designs de tous les cantons est une idée tellement unique, apprécie la Valaisanne. Tout le peuple suisse se sent ainsi inclus de cette façon.»
Plus de Jeux olympiques
«C'est formidable, s'enthousiasme à son tour Nicolas Rochat CEO de Mover Sportswear, marque basée à Lausanne. Ce dégradé multicolore est très moderne. Esthétiquement, c'est très réussie et dans l'air du temps.» Celui qui a racheté la société en 2004 ajoute un éclairage pratique: «Ces dégradés sont plus faciles à réaliser désormais grâce aux avancées technologiques. En comparant à l'international, on voit d'ailleurs que les Français ont également utilisé cette technique. Mais je trouve leur dégradé bien moins réussi. La Suisse sort clairement du lot.»
Michael Ingram, fondateur de la marque d'habits de sports Revario, est un peu moins dithyrambique. «Je comprends que l'on veuille montrer une suisse moderne et ouverte, précise-t-il. Et je vois évidemment ce qu'ils ont voulu faire. Je suis toutefois moins emballé. Est-ce que je porterais ces vêtements? Non. Mais je préfère retenir que ce sont des vêtements d'une collaboration entre deux marques suisses et c'était une excellente idée.»
Plus grande réflexion souhaitée
Si Nicolas Rochat et Michael Ingram ne sont pas forcément d'accord sur l'aspect subjectif de l'esthétisme, les deux spécialistes sont d'accord sur des aspects plus écologiques. «Je trouve dommage que l'on n'utilise pas davantage la plateforme représentée par les JO pour mettre davantage en avant la cause environnementale.» Selon nos informations, les vêtements sont en effet fabriqués au Portugal.
«Je trouve dommage, c'est que l'on ne pousse pas la réflexion plus loin par rapport à ces vêtements, enchaîne Michael Ingram dont la société est basée à Fribourg. D'où viennent-ils? Comment sont-ils faits? Ce n'est hélas pas un aspect suffisamment regardé. Une marque comme ON, qui a pour objectif de concurrencer Nike ou Adidas, pense davantage à la production de masse et je trouve cela dommage.»
Il faut dire que les deux marques sondées sont particulièrement sensibles à ces causes. «Les JO devraient être la plateforme pour apporter des solutions, précise Nicolas Rochat dont la marque, Mover Sportswear, confectionne des habits sans plastique. Un gros tiers des micro-particules présentes polluantes proviennent des vêtements. On ne fait pas suffisamment le lien entre habits et pollution, mais il est bien réel. Ce serait génial que l'on crée une collection plus responsable afin de prouver que l'on peut courir vite sans avoir du plastique sur soi.»
Concernant l'aspect «fast fashion», Daniela Correia atténue la critique. La spécialiste précise: «Ce que j'aime particulièrement, c'est que la coupe est moderne et intemporelle, ce qui est une bonne chose de pouvoir garder une pièce aussi durable dans notre garde-robe. De plus, la marque ON étant un synonyme de qualité à travers le monde, je pourrais même imaginer que les gens achètent ces merveilleuses pièces qui ne sont pas liées aux Jeux olympiques en raison de la conception et qualités des tissus.» Et la Romande de sourire: «Personnellement, j’adorerais pouvoir porter ces jaquettes durant mes joogings.»
«Ce serait un honneur»
Pour Nicholas Hänny de Nikin, un autre aspect est à mettre en avant: l'image de la Suisse. «Ce qui me plaît surtout, c'est que l'on a une très belle opportunité de mettre sur le devant de la scène notre grand savoir-faire helvétique. C'est courageux d'avoir fait ce pari, mais je pense qu'il est excellent. La Suisse a tout à gagner de se montrer ouverte, moderne et innovante. Il y a même un petit aspect effronté qui me plaît.» Il apporte un seul bémol: «Je sais ce qu'ils ont voulu faire avec les couleurs et je comprends l'idée. Mais je ne le remarque pas et c'est un peu dommage. Mais rien de plus.»
Se verrait-il, un jour, oser une telle collaboration à l'avenir? «Pour une marque basée en suisse, c'est le plus grand honneur qui soit. Nous avions eu des discussions pour un tel partenariat au niveau des Special Olympics, (ndlr les Jeux pour les personnes déficientes mentales), mais cela ne s'était finalement pas fait. Mais nous serions très ouverts.» Les prochains JO d'hiver pourraient-ils être une opportunité? «Nous sommes en tout cas ouverts», rigole le Nicholas Hänny.