C'est à chaque fois la même rengaine lorsqu'une scène litigieuse débouche sur un arbitrage lacunaire faute de moyens techniques. Faut-il que les patinoires de National League soient équipées de davantage de caméras – notamment sur les lignes bleues – et qu'une salle de centralisation des images soit crée? En NHL, cette «Situational Room» existe à Toronto et plusieurs officiels y regardent les matches afin de réagir rapidement en cas de scène litigieuse.
L'intérêt de cette solution? Permettre aux arbitres sur la glace d'obtenir un soutien externe et, du même coup, de bénéficier de meilleures conditions de visionnage loin du stress de la patinoire. «Nous y avons évidemment réfléchi, précise Denis Vaucher, CEO de la National League. C'est intéressant. Mais selon la réalité suisse, ce n'est pas quelque chose de réaliste.»
Le principal problème, selon le dirigeant, n'est pas forcément financier, mais humain. «Imaginez une soirée comme celle de ce mardi avec sept rencontres en simultané. Nous serions obligés d'avoir plusieurs personnes – une par match – capables de prendre de telles décisions. Cela peut s'agir d'anciens arbitres ou de personnes formées. Mais la réalité du moment en Suisse, c'est que nous peinons déjà à trouver suffisamment de personnes pour superviser les arbitres dans les patinoires. Et si l'on compte les tournus éventuels, cela demanderait une vingtaine de personnes formées à cet exercice.»
1,6 million de mise en service
S'il paraît logistiquement compliqué de mettre une telle organisation sur pied, Denis Vaucher précise également l'aspect financier d'une telle installation. «Au moment où ces discussions ont commencé, nous avions fait des estimations, poursuit notre interlocuteur. Rien que la création de cette 'Situational Room' avec toute la technique qui va exister reviendrait à près de 1,6 million de francs. Et le premier match n'a pas encore eu lieu.»
Il faut ensuite compter la location des lieux, les outils, la gestion des outils et, évidemment, le salaire des arbitres. «C'est vraiment un chiffre calculé pour avoir un ordre de grandeur. Mais pour tous ces points, il faut compter environ 750'000 francs par saison.»
Et les lignes bleues?
Depuis quelques saisons, les coachs ont l'opportunité de demander aux arbitres le visionnage de scène des hors-jeu ainsi que des actions de but. Fréquemment, les images ne sont pas satisfaisantes, surtout en ce qui concerne le hors-jeu avec des caméras qui ne sont pas situées au bon endroit. Denis Vaucher tient à préciser une chose: «Cette possibilité a été mise sur pied pour éliminer les erreurs flagrantes pour un hors-jeu d'un mètre et non pour des cas se jouant au centimètre. Ce point est souvent oublié lorsque l'on se plaint de la qualité des images à disposition.»
Comme pour la «Situational Room», une estimation a été effectuée pour l'installation de quatre caméras par patinoire (deux sur chaque ligne bleue) ainsi que toute la gestion technique qui en découle. «Parce que vous vous doutez bien qu'on ne va pas pouvoir mettre des Go-Pro et que ça fonctionne, remarque Denis Vaucher. Le flux de chacune des caméras doit être intégré à celui de la diffusion. Techniquement, c'est possible, bien sûr.» Coût de l'installation? «Entre 900'000 francs et 1 million», détaille le CEO de la National League.
«Pas avant quatre ans»
Mais là aussi un coût est à envisager: financier et humain, à nouveau. «Si le réalisateur du match dispose de quatre flux supplémentaires, il aura de la peine à gérer tout seul. Il faudra donc un assistant sur chacun des matches, ce qui va engendrer des coûts de production supplémentaires qui ne sont pas pris en compte dans le contrat que nous avons signé avec MySports.» Là encore, les chiffres peuvent refroidir les partisans de cette technologie. «On peut estimer le surcoût à 250'000 francs par saison.»
Pour l'heure, Denis Vaucher ne voit pas d'issue possible. «Nous avons un contrat de cinq ans et il en est à sa première année. Est-ce que cela sera pris en compte lors de la négociation? Peut-être. C'est ce qui se passe notamment en Finlande et en Suède.»
Pour le dirigeant, le «paquet» pourrait tourner aux alentours des 2,5 à 3 millions de francs pour la première année puis 1 million par saison supplémentaire. «Les chiffres ont été présentés aux clubs lors de la dernière assemblée des directeurs sportifs, nous précise-t-il. Et même si la volonté était présente, le problème de base ne serait toujours pas résolu: qui serait présent pour faire cette tâche?»
Au final, l'avancée technologique dans le hockey suisse ne semble pas être prévue de sitôt. «Pas avant quatre ans et le nouveau contrat de télévision, conclut Denis Vaucher. Et à ce moment, il faudra que les clubs en acceptent le prix, ce qui n'est pas acquis.»