Son arrivée s’est faite en catimini. Aucune annonce pour le transfert de Simona Lucarno cet été à Sion. Ce n’est pourtant pas tous les jours que le club valaisan recrute quelqu’un de l’AC Milan.
Cette scientifique est venue étoffer le staff médical, après six saisons passées au sein du mythique club lombard. Jusque-là, l’Italienne est restée dans l’ombre, occupant un poste inédit en Super League à sa connaissance: cheffe du département de science sportive.
A seulement 35 ans, la Piémontaise a déjà vécu plusieurs vies. Cette ancienne boxeuse de très haut niveau a notamment passé deux ans dans l’armée transalpine. Elle lève le voile sur sa mystérieuse mission au FC Sion pour Blick, depuis le camp d’entraînement des Sédunois en Espagne.
En quoi consiste votre travail au FC Sion?
Les données occupent de plus en plus de place dans le football moderne. Il faut parvenir à les trier, les hiérarchiser afin d’en tirer des informations utiles. L’idée de créer ce département est venue de notre docteur Luca Pulici. En tant que cheffe du département de science sportive, je collabore notamment avec le préparateur physique. Nous mettons en place la stratégie et des instruments pour récolter un maximum d’informations sur nos joueurs à l’entraînement, comme en match. C’est la première étape, construire une base de données. Ensuite, il s’agit de les faire parler avec des algorithmes.
De quels instruments bénéficiez-vous?
Ce sont surtout des objets connectés. Actuellement, nous utilisons des GPS. Mais il y a également des protège-tibias qui récoltent des données techniques, sur les passes, les centres ou les tirs. Pas seulement leur nombre, mais aussi la force donnée au ballon ou la localisation sur le terrain. Cela permet de développer de manière encore plus précise les entraînements ou le retour de blessure d’un joueur par exemple. Un autre exemple: une ceinture qui surveille la fréquence cardiaque des joueurs. Il nous permet, au-delà du simple rythme du cœur, de connaître l’intensité des courses et d’évaluer le statut de fraîcheur.
Vous voyez donc la barre de fraîcheur d’un joueur comme dans le jeu vidéo FIFA?
Oui, on peut imager cela comme ça. Nous pouvons par exemple alerter le staff des entraîneurs qu’un tel a besoin de plus de temps de récupération pour éviter une blessure.
Avec vous, plus aucun joueur ne peut donc tricher à l’entraînement?
Exactement, je suis presque comme une policière (rires). Plus sérieusement, je ne suis pas là pour surveiller les joueurs, mais au contraire pour leur donner des indications qui leur permettent d’être le plus performant possible. Les données sont utiles, mais il faut être capable de les mettre en contexte et de les questionner aussi. Ce serait dangereux de perdre l’aspect moral et humain au profit des chiffres bruts. Il faut laisser une partie de magie au football.
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Entre les maladies et ses blessures, Mario Balotelli n’est pas dans sa meilleure forme ces derniers temps. Comment est-ce que votre travail est perçu par un joueur comme lui?
Les données ont ce pouvoir d’être égalitaires, froides. Je peux aider Balotelli comme n’importe quel autre joueur. Il est déjà habitué d’avoir ces outils vu les clubs dans lesquels il est passé. Je fournis des renseignements qui doivent leur permettre d’adapter sa préparation, affiner son état de forme. Ensuite, la gestion des joueurs est uniquement du ressort du staff d’entraîneur. Cela me convient très bien comme ça.
En plus des joueurs du FC Sion, est-ce que votre regard pourrait se porter sur les autres équipes, que ce soit les adversaires ou de potentielles cibles de recrutement?
Exactement, je pourrais travailler avec le directeur sportif et la cellule de recrutement. C’est un nouvel horizon qui reste encore à explorer dans ce type de données. Il existe des entreprises qui vendent des données collectées durant les matches de différents championnats européens. En les achetant et en les analysant, nous pourrions faciliter le travail de recrutement, rendre la décision finale la plus objective possible. Mais là aussi, il y a une part de sensibilité, d’impondérable. Nous n’avons pas réponse à tout.
Mais est-ce que vous vous êtes déjà opposée au recrutement d’un joueur à Sion?
Non, c’est un aspect que nous voulons développer à l’avenir. La création de la base de données interne nous prend du temps et nous devons encore l’améliorer. Agir dans le recrutement, c’est l’un de nos objectifs futurs, peut-être dès la saison prochaine. Au sein du FC Sion, nous voulons aussi pouvoir travailler avec les jeunes de l’académie, des M15 aux M21.
Sur un plan personnel, comment en êtes-vous arrivée à vous spécialiser dans ce domaine?
J’ai toujours aimé le sport. C’est la passion de ma vie, avant de devenir le fil rouge de ma carrière. Quand j’ai arrêté ma carrière sportive, je voulais rester dans le monde du sport, pour vivre les émotions fortes que seul le haut niveau peut t’offrir. En Italie, le football, c’est plus que du sport. C’est un facteur culturel, très important dans la vie de millions de personnes. En presque six saisons à l’AC Milan, j’ai pu découvrir toutes les nuances du rôle du préparateur physique, du terrain à l’analyse plus technique. J’ai ensuite décidé de me dédier à l’analyse des données.
Vous avez vous-même été athlète?
Oui, plus jeune. J’ai commencé à faire de la boxe en compétition à 17 ans. J’ai porté le maillot de l’équipe d’Italie durant deux ans. J’ai rejoint le programme de sportifs d’élite de l’armée, vivant dans une caserne à Rome. J’ai été championne d’Italie en 2008 et médaillée de bronze au niveau européen l’année suivante. La boxe m’aide encore beaucoup aujourd’hui dans ma vie et mon travail. Ce sport m’a enseigné la discipline, l’éthique de travail et de l’entraînement. En tant que femme dans un environnement masculin, c’est crucial d’être rigoureuse pour être prise au sérieux.
Le football justement, c’est un milieu très masculin. Les femmes sont encore rares dans les staffs de Super League.
Oui, et je suis très fière d’être arrivée à ce niveau-là. Mon profil est forcément une curiosité parce que nous sommes encore peu de femmes, c’est vrai. Mais, je me réjouis que ça ne soit plus un sujet. Si tu travailles bien et que tu es compétente, ton genre ne devrait rien changer. Tout ce qui compte, c’est ce que tu peux amener à l’équipe. Avant d’arriver à Sion, j’ai parfois vu certaines portes se refermer, mais ce n’est plus une limite restreignante aujourd’hui.
L’été dernier, vous avez quitté l’Italie pour le Valais. Comment se passe cette nouvelle vie?
C’est vrai. J’ai tout lâché et je me suis dit: «vas-y!». Mon mari est resté à Milan, tandis que mes parents sont dans le Piémont. Sion n’est pas si loin du nord de l’Italie. J’ai aussi la chance d’avoir des proches qui comprennent ma détermination et me soutiennent. Je me sens bien en Valais où il fait bon vivre. L’accueil au sein du club a aussi été parfait.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
---|---|---|---|---|---|
1 | FC Zurich | 14 | 7 | 26 | |
2 | FC Bâle | 14 | 20 | 25 | |
3 | FC Lugano | 14 | 6 | 25 | |
4 | Servette FC | 14 | 2 | 25 | |
5 | FC Lucerne | 14 | 4 | 22 | |
6 | FC St-Gall | 14 | 6 | 20 | |
7 | FC Lausanne-Sport | 14 | 2 | 20 | |
8 | FC Sion | 14 | 0 | 17 | |
9 | Young Boys | 14 | -5 | 16 | |
10 | Yverdon Sport FC | 14 | -10 | 15 | |
11 | FC Winterthour | 14 | -21 | 11 | |
12 | Grasshopper Club Zurich | 14 | -11 | 9 |