A 30 ans, Salim Khelifi est parti à l'aventure. Pour Blick, l'ailier vaudois raconte sa vie en Australie, lui qui y évolue depuis bientôt deux ans.
Salim Khelifi, comment se décide-t-on à traverser le globe pour partir jouer en Australie?
Mon contrat à Zurich se terminait et j'avais envie de voir autre chose, d'aller dans un pays un peu exotique. J'ai parlé avec Léo Lacroix qui jouait ici l'année dernière et il m'en a dit que du bien. J'ai une offre de Perth Glory et cela s'est fait grâce à un contact local de mon agent.
Cela fait bientôt deux ans, comment vont les choses pour vous?
Cela se passe très bien, même si le changement, le fait d'aller dans un pays aussi grand et aussi loin de la Suisse, n'a pas été facile. Je ne pensais pas aimer autant l'Australie. J'ai signé un an à Perth Glory à la base et au bout de cinq matches, on m'a proposé de prolonger et je n'ai pas hésité à signer trois ans. Perth est une ville magnifique, la plus belle que j'ai vue de ma vie. C'est une expérience magnifique. Depuis janvier, je suis prêté à Melbourne Victory jusqu'à la fin de la saison.
Vous seriez-vous imaginé jouer là-bas un jour, il y a 10-15 ans?
Non, je ne savais même pas qu'ils jouaient au foot ici (rires). J'aurais quand même voulu venir visiter, car j'aime beaucoup la nature et l'aventure. Mais jouer au foot, jamais. Là, je peux faire les deux et c'est fantastique.
Qu'en est-il du niveau du championnat?
J'ai été surpris, c'est un peu le même niveau que la Super League. Il y a vraiment de bonnes équipes ici. La plupart comptent quelques étrangers de très bon niveau. Un club comme Melbourne Victory pourrait jouer facilement dans le top cinq de Super League.
Le nombre de joueurs extracommunautaires y est-il limité?
Tu peux avoir maximum cinq étrangers et les clubs font venir des joueurs de très bonne qualité. Daniel Sturridge (ndlr: ancien joueur de Chelsea et Liverpool notamment) était à Perth l'année avant que j'arrive. Où je suis maintenant, Nani (ndlr: joueur passé par Manchester United ou encore le Sporting) était là l'année dernière. Cette saison, je joue avec Damien Da Silva, qui était capitaine du Stade Rennais.
Il y a donc de gros moyens?
Oui. Les clubs mettent les moyens pour faire venir les étrangers. Il y a quelques clubs, dont Melbourne Victory et Melbourne City, qui fait partie du City Football Group, qui ont des gros budgets. À Melbourne, j'ai les meilleures infrastructures que j'ai eues de toute ma carrière. Le stade est magnifique, au milieu des buildings de la ville. On s'entraîne juste à côté et nous avons tout ce qu'il nous faut. C'est même mieux que ce que j'ai connu en Allemagne par exemple.
Cet investissement sur les étrangers augmente la pression sur vos épaules.
Exactement. Nous devons légitimer notre salaire qui est deux-trois fois supérieur à celui d'un joueur australien. Nous devons montrer nos qualités et apporter un plus à l'équipe.
Est-ce que cela vous plaît d'avoir ce rôle?
Bien sûr. Je viens d'avoir 30 ans et ai accumulé une belle expérience. Après, c'est quand même différent du foot européen, il n'y a pas de relégation ici. Mais tout de même, tu veux gagner le championnat et/ou te qualifier pour la Ligue des champions asiatique.
Quel est le niveau des joueurs locaux? Ces règles concernant le nombre d'étrangers ne favorisent pas toujours la progression des joueurs du cru.
Il y a beaucoup d'internationaux australiens, des joueurs de qualité. Leur niveau monte chaque année.
Quel est l'engouement autour de la A-League?
Melbourne Victory est le club qui compte le plus grand nombre de fans. C'est similaire à un FC Zurich par exemple. Lorsque l'on joue contre Melbourne City, c'est assez chaud. Dans les autres clubs, les affluences tournent autour des 10'000 spectateurs par match. Le rugby et le footy sont les sports nationaux et il y a toujours 90'000 spectateurs pour ces rencontres. Mais le football prend gentiment.
Quel est le style de jeu adopté par les équipes?
Très différent de la Super League. C'est très physique et cela joue beaucoup en contre-attaque. Quand je suis arrivé ici, j'ai eu de la peine à m'adapter. Tu cours énormément, c'est moins tactique. Je me suis demandé ce que je faisais ici au début (rires).
Avez-vous une anecdote à raconter?
Je ne me suis jamais entraîné comme cela auparavant. La préparation dure quatre mois et ils mettent beaucoup d'importance sur les statistiques. Par exemple, avant un entraînement, le staff va décider que nous allons devoir courir sept kilomètres. Une fois passé le nombre décidé, l'entraînement s'arrête. Ce ne sont pas des vacances ici et tous les autres étrangers avec lesquels j'ai parlé partagent cet avis.
Quels sont vos objectifs cette saison?
Nous voulons gagner le championnat. Melbourne Victory est le plus grand club australien et je pense que, même si nous ne sommes que troisième pour l'instant, nous sommes la meilleure équipe cette saison. Même s'il y a aussi d'autres bons clubs qui auront leur chance. Participer à la Ligue des champions asiatique est également un de mes objectifs.
L'Australie est immense et un club néo-zélandais prend également part au championnat. Les déplacements doivent donc être très longs.
Perth est la seule équipe de la côte ouest. Pour aller à Melbourne, il y a quatre heures de vol et deux heures de décalage. Donc chaque deux semaines, quand je jouais là-bas, nous avions un gros voyage au programme. Et la saison prochaine, il y aura un club néo-zélandais supplémentaire dans le championnat. Il nous faudra environ 10 heures de vol pour aller à Wellington.
Les conditions météorologiques sont aussi plus extrêmes qu'en Suisse.
C'est difficile. Surtout quand tu vis à Perth, la ville la plus chaude d'Australie. Il fait parfois jusqu'à plus de 40 degrés durant l'été. C'est très sec et les jours de pluie sont rares. C'était compliqué au début, mais avec le temps, je me suis habitué.
Il doit être compliqué de jouer au foot dans ces conditions.
La plupart des joueurs ont des crampes dès la 70e (rires). En Europe, cela ne m'arrivait jamais. Ce n'est pas facile. Nous avons heureusement beaucoup de pauses pour boire et des matches organisés le soir.
Comment remplissez-vous vos journées, si loin de votre famille et de vos amis?
Dès que j'ai un ou deux jours de congé, je pars visiter la ville ou la région. Chose que je ne faisais pas forcément en Suisse, où je privilégiais le repos. Il y a toujours quelque chose à faire ici.
Gardez-vous un œil sur le Lausanne-Sport?
Oui, bien sûr. Je ne peux toutefois pas voir les matches à cause du décalage horaire. Depuis cet hiver, ils enchaînent les bons matches et ça me fait plaisir de voir le club de mes débuts s'établir en Super League. Aussi pour Ludovic Magnin que j'ai connu à Zurich.
À l'issue de la saison, vous allez retourner à Perth où il vous restera un an de contrat. Avez-vous déjà pensé à la suite?
J'aimerais bien pouvoir rester encore quelques années en Australie. Mais on ne sait jamais dans le foot. Cela serait un rêve de finir ma carrière au Lausanne-Sport.