Le réflexe est le même pour tout le monde, qu’on soit accro au football ou qu’on ne guigne que d'un œil les grands matches. Tel un chat obnubilé par la lumière rouge d’un pointeur laser, notre regard est en général attiré vers le ballon... Objet de toutes les convoitises sur le terrain, emblème d’un sport qui en porte le nom.
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Un habile grand écart
«Ne regardez pas la balle!» Cette injonction un brin insultante est la première des 52 règles établies dans un savoureux guide britannique au nom clairvoyant: «Comment regarder le football». Qui d’autres que les Anglais pour penser à un tel fascicule? Mais, ce livre (qui vient de sortir de l’autre côté de la Manche), c’est du très sérieux.
La preuve? Il est édité par le célèbre et vénérable éditeur Penguin Books. La maison, fondée en 1936, s’est associée au média spécialisé Tifo. Le résultat est aussi jouissif qu’abordable pour n’importe quel public. Un grand écart qui balaie tous les aspects du football, des plus basiques (pourquoi on joue à 11 contre 11? A quoi sert un milieu de terrain?) aux plus sophistiqués (utilisation des statistiques avancées ou méandres économico-politiques), en passant par certains repères historiques bien sentis.
Près de 96% du temps sans ballon
«Ce livre est comme un grand supermarché. Quand tu vas faire tes courses, tu ne vas jamais acheter tous les produits disponibles en rayon. Tu peux juste prendre les deux ou trois trucs qui manquent dans ton frigo ou faire les courses pour toute ta semaine, nous explique le journaliste Sebastian Stafford-Bloor, auteur principal de «How to Watch Football». Même si les chapitres ont été appelés «règles», ce sont plutôt des suggestions, en fait.» 52 propositions mises en valeur par les illustrations superbes de la directrice artistique de Tifo, Alice Devine.
Mais revenons à l’accroche de cet article. Pourquoi donc n’avons-nous pas le droit de regarder ce foutu ballon? «C’est un réflexe naturel, même moi, je le fais», nous déculpabilise d’entrée de jeu «Seb» depuis son appartement hambourgeois. «Durant un match de 90 minutes, un joueur ou une joueuse va passer 86 minutes à courir sans le ballon. En regardant autour, on peut se projeter dans sa tête, anticiper ses options de passes, mais aussi voir le pressing adverse, les mouvements tactiques. Idéalement, il faudrait faire sans cesse des allers-retours.»
Au-delà de cette première règle un brin provocatrice, ce guide «so british» est un plongeoir en or massif pour s’immerger dans la culture du football. Un sport aux multiples facettes, sur le terrain comme en dehors. Comme nous le rappelle jour après jour cette absurde Coupe du monde au Qatar.