Lorsque Léonie*, une jeune femme de 30 ans, pose des questions sur le vaccin à l'occasion de son contrôle annuel, son gynécologue lui répond par un message clair: «Vous voudrez peut-être des enfants un jour, alors il vaut mieux attendre.» Les vaccins à ARNm seraient «peu étudiés» - l'on en saurait encore trop peu sur effets secondaires à long terme.
Les rumeurs selon lesquelles la piqûre contre le Covid rendrait les femmes stériles persistent. Et ces dernières ne se propagent plus seulement via les réseaux sociaux et les forums à crédibilité scientifique douteuse. Apparemment, certains cabinets médicaux s'y mettent aussi. Selima*, également jeune trentenaire, n'est elle non plus pas vaccinée - car son gynécologue le lui déconseille. «Je vais chez lui depuis des années, et je lui fais confiance.»
958 pros de la santé pour un moratoire
La Société suisse de gynécologie et d'obstétrique (SSGO) est consciente du problème. «Nous recevons presque quotidiennement des demandes de patientes déstabilisées», déclare le secrétaire général Thomas Eggimann. «Un haut niveau d'éducation ne protège pas toujours des théories du complot et des théories scabreuses.»
Mais de nombreux professionnels de la santé suisses sont allés encore plus loin: 958 d'entre eux ont signé l'appel à un moratoire sur les vaccins à ARNm depuis le début de l'année. Un certain nombre de médecins, dont un gynécologue vaudois, sont également dans les rangs des vaccino-sceptiques.
«Nous comptons plus de 43'000 membres, et parmi eux, 136 médecins ont apparemment signé», confirme Charlotte Schweizer, porte-parole de l'association médicale FMH. Selon elle, «il existe des médecins sceptiques à l'égard des vaccins, mais il s'agit de cas absolument isolés, qui attirent toutefois beaucoup l'attention.» L'écrasante majorité des médecins informent plutôt leurs patients du fait que le Covid comporte plus de risques que le vaccin.
Le risque zéro n'existe pas
«Je me serais laissée vacciner si mon gynécologue m'avait garanti que je n'aurais pas d'effets secondaires graves», rapporte Anja*, elle aussi trentenaire. La porte-parole de la FMH comprend l'inquiétude, mais rétorque: «le désir d'obtenir une garantie absolue de la part du médecin est compréhensible, mais malheureusement, il n'existe aucune certitude à 100% avec aucun médicament.»
Par exemple, n'importe quelle femme enceinte ne peut jamais être absolument certaine - malgré les examens réguliers - que son enfant naîtra sans handicap. Charlotte Schweizer poursuit: «C'est la tâche du médecin d'informer ses patientes avec soin et de manière médicalement correcte, et d'attirer leur attention sur la probabilité des risques.»
Cependant, de nombreux patients veulent plus que de simples informations de la part de leur médecin. Car une chose est claire: les femmes enceintes souffrant de Covid-19 sont nettement plus susceptibles de développer une évolution sévère de la maladie.
Une retenue controversée de la part de l'OFSP
Alors que des pays comme le Royaume-Uni conseillent vivement à leurs femmes enceintes de se faire vacciner, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) ne le recommande qu'aux femmes présentant des risques particuliers - une réticence qui suscite la controverse parmi les experts. Selon l'OFSP, une adaptation des recommandations est en cours de discussion.
*Noms connus de la rédaction