Où qu’on aille, elles sont partout. Sur Netflix, avec «Stranger Things» bien sûr, qui a semblé amorcer le mouvement, mais aussi plus récemment «That’s 90’s show» – la suite de la sitcom «That’s 70’s show». Sur Disney+, avec «Pam & Tommy», la véritable histoire bien moins sulfureuse qu’il n'y paraît de la sex-tape de Pamela Anderson. Ou encore sur Prime Video, avec la série italienne «Bang bang baby». D'ailleurs, on vous a préparé un petit top 5 de nos recommandations vintage.
Les décennies 1980 et 1990 inspirent encore et toujours le petit écran, comme si, au XXIe siècle, la fiction ne pouvait s’empêcher de regarder son passé. «Plus de la moitié des séries qui nous ont été soumises étaient ancrées dans les années 80-90. C’est impressionnant.», notait Laurence Herszberg, la présidente du festival Séries Mania, il y a quelques semaines. Mais alors, pourquoi est-on aussi accro aux séries rétro?
Un vestiaire coloré
Il faut d’abord reconnaître qu’elles sont visuellement très inspirantes. Quoi de mieux, pour des décorateurs, costumiers ou accessoiristes, que de sortir des couleurs fluo, des voitures vintage ou des perruques permanentées? «C’est quand même très sympa», abonde Laurence Herszberg. «Pour ceux qui étaient là, on a tous porté de l’orange, du violet, du bariolé, qu’on retrouve dans le vintage décoratif actuel.»
Disponible sur OCS, une série comme «Toutouyoutou», qui imagine une histoire mêlant espionnage industriel et cours d’aérobic dans les années 1980, habille ses actrices de bodys colorés du plus bel effet. Et pour les comédiens, c’est souvent une aubaine. «Dès qu’on enfilait nos costumes, on rentrait instantanément dans nos personnages», se souvient ainsi Paul Scarfoglio, l’un des acteurs de «3615 Monique». Dans cette série hilarante sur les débuts du Minitel en 1981, à retrouver également sur OCS, on a vu le jeune homme affublé de vestes improbables, de chemises à fleurs et de (très) courts shorts en nylon. Quand il ne porte pas de perruque mulet, clin d'œil aux crimes capillaires commis sur les terrains de tennis dans ces décennies-là.
Une nouvelle génération de scénaristes
Ce retour aux années 80-90 est aussi cohérent avec l’âge d’une nouvelle génération de scénaristes et de showrunners. «C’est leur enfance», rappelle Laurence Herszberg. Ce ne sont pas les frères Duffer, les créateurs de «Stranger Things», qui vont dire le contraire. Dans cette série Netflix, les héros qui jouent à «Donjons & dragons» et passent leur temps sur leur vélo rappellent l’époque d’«E.T.» et des «Goonies».
«Nous voulions faire quelque chose qui ressemble aux films avec lesquels nous avons grandi, ceux de Steven Spielberg et de John Carpenter en premier lieu», expliquait Matt Duffer à nos confrères de «Télérama» en 2016, lors de la sortie de la première saison. «Sans oublier les livres de Stephen King – en fait, tout ce qui fait à nos yeux le sel de ces années-là.»
Une autre façon de voir le présent
Pour Laurence Herszberg, choisir d’ancrer une série dans les décennies passées est aussi «un angle scénaristique qui interroge». «C’est une manière moins frontale d’interroger des sujets qui font débat actuellement. Autrement dit, il est plus facile de parler de l’avortement et des vents contraires à l’avortement en 1989, avec ‘Désobéir: le choix de Chantale Daigle’ (une série québécoise projetée à Séries Mania, qui raconte la bataille judiciaire entre un homme et son ex-femme, accusée d’avoir avorté pendant leur divorce sans l’avoir consulté). Mais cela évoque très clairement des remises en question actuelles.»
Une série comme «Pam & Tommy», qui s’intéresse à la diffusion, dans les années 1990, de la sex-tape de Pamela Anderson et de son compagnon de l’époque, Tommy Lee, en est un autre bon exemple. Loin de se vautrer dans le voyeurisme, ce portrait sensible d’une actrice dépossédée de son image et de son propre corps invite à s’interroger sur le sexisme d’il y a trente ans… mais aussi sur celui toujours en vigueur.