5 millions de personnes meurent chaque année dans le monde de températures excessives. En Suisse, il existe, par le biais de l’assurance chômage, la possibilité d’obtenir des indemnités en cas d’intempérie (INTEMP). Cette prestation garantit aux travailleurs de certaines branches d’activité, essentiellement dans le domaine de la construction, une compensation convenable des pertes de travail imputables aux conditions météorologiques.
En cas de canicule, quand le travail est techniquement impossible, les INTEMP permettent de garantir un revenu aux personnes les plus touchées par des conditions météo catastrophiques, que cela soit les grands froids, ou les périodes de canicules.
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Cependant, cette législation montre aujourd’hui ses limites. Elle ne concerne que quelques branches d’activité, employant principalement des personnes en extérieur: bâtiment, charpenterie, aménagements extérieurs, etc.
Or, la canicule, contrairement aux températures polaires des hivers rigoureux, ne touche pas que quelques domaines d’activités extérieures. Imaginez:
- Vous bossez en cuisine dans un restaurant, la température atteint les 55 degrés devant les fourneaux.
- Employé de voirie, vous passez la journée à la déchetterie communale. Température sur le bitume, plus de 60 degrés.
- Travailleuse dans un pressing, vous passez l’entier de vos heures de travail devant des stations qui crachent de la vapeur à plus de 100 degrés.
- Pâtissier, il fait 35 degrés dans votre laboratoire le reste de l’année, en canicule la température double.
Etendre les indemnités intempéries
Dans tous ces métiers, la canicule peut perturber l’activité professionnelle avec de la fatigue, des sueurs abondantes, des nausées, des maux de tête, des vertiges, des crampes, mais aussi des troubles plus importants et parfois mortels comme la déshydratation et le coup de chaleur qui peuvent survenir selon la pénibilité de la tâche et la durée de l’exposition.
Au-delà des risques pour la santé pure, l’on doit aussi se poser la question de la qualité du travail produit en cas de forte chaleur. Dans un bureau non climatisé, quand les températures dépassent les 35 degrés, les performances cognitives baissent et cela se ressent sur la concentration et l’efficacité de chacune et chacun d’entre nous.
Il est à ce titre surprenant de constater qu’il n’existe pas dans la législation actuelle de seuil de température ou d’humidité au-delà desquels les employeurs sont contraints de réduire le temps de travail, ou d’adapter celui-ci aux conditions météorologiques. Pourtant, d’autres pays d’Europe ont intégré des interdictions de travailler au-delà d’une certaine température.
Ce sont donc à tout le moins deux lacunes que notre appareil législatif doit combler: le périmètre des professions concernées et des seuils de température au-delà desquels le travail doit être limité et/ou adapté.
Je fais donc un appel au partenariat social afin qu’une extension des indemnités intempéries puissent être envisagée et qu’un cadre contraignant soit mis en place pour la protection des travailleurs et travailleurs concernés. Il en va de leur santé. Et sûrement aussi de la nôtre.