Commentaire d'Antoine Hürlimann
Cher Conseil d'État genevois, descendez de votre tas d'or et aidez la population

Genève annonce un excédent record dans ses caisses: une montagne de billets qui frôle les 1,4 milliard de francs! Une bonne nouvelle? Tant s'en faut pour notre journaliste Antoine Hürlimann, qui estime que les autorités doivent arrêter avec leurs calculs fantasques.
Publié: 21.03.2024 à 15:43 heures
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Dernière mise à jour: 21.03.2024 à 15:49 heures
Pour notre journaliste, il n’y a rien de réjouissant à voir l’Exécutif du bout du Léman assis sur un tas d’or (Conseil d'Etat genevois/Magali Girardin).
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

À Genève, l’argent pousse sur les arbres (qu’il reste…). C’est du moins ce que l’on peut penser après que les autorités ont dévoilé l’étendue de leur trésor, ce jeudi 21 mars. Les comptes 2023 du Canton révèlent un excédent record de 1,4 milliard de francs. Vous peinez à visualiser ce que cela représente? 1,4 milliard de francs, c’est 1400 millions de francs.

Vous soupirez. Ces chiffres babyloniens sont impossibles à conceptualiser pour nos cerveaux étriqués. Vous avez raison, essayons autrement. 1,4 milliard de francs, c’est 14 millions de billets de 100 francs, ce petit billet bleu qu’il nous arrive — les bons jours — d’avoir dans nos portemonnaies.

Si on empile ces 14 millions de billets de 100 francs, on forme une colonne… de 1400 mètres de haut. 1400 mètres de haut, c’est l’altitude au sommet des falaises neuchâteloises du célèbre Creux-du-Van. Ou plus de quatre tours Eiffel posées l’une sur l’autre, si cette image parisienne vous sied mieux.

L’État se trompe à répétition

La faute politique du Conseil d’État du bout du Léman est aussi colossale que notre montagne imaginaire de biffetons. Car oui, il n’y a rien de réjouissant à voir l’Exécutif assis sur un tas d’or, qui ferait rougir de jalousie le pingre Balthazar Picsou. Encore moins quand un déficit de 476 millions de francs avait été inscrit au budget 2023.

Dans les faits, en 2023, les autorités se sont donc gourées de… près de deux milliards de francs. Des prévisions à la — très grosse — louche qui se répètent ces dernières années concernant les revenus de l’État. En 2020, ces derniers étaient sous-évalués de 500 millions de francs. En 2021, de 1,5 milliard. En 2022, de deux milliards. Des «recettes extraordinaires» sont systématiquement avancées pour expliquer ces différences. Mais, à force de se répéter, l’extraordinaire devient ordinaire.

Et alors? D’aucuns avancent qu’il vaut mieux des résultats vert vif que teintés de rouge. Passons sur le fait que l’argument du pire est toujours celui des médiocres et allons droit à l’essentiel: ces «approximations» ont des conséquences réelles et regrettables pour la population.

Baisses d’impôts: insuffisant

Concrètement, en prophétisant à chaque fois un cataclysme dans ses tiroirs-caisses qui ne se produit jamais, le collège biaise les débats budgétaires. Davantage d’argent pour la culture alors que le déficit guette? Vous n’avez vraiment pas le sens des priorités! Plus d’argent pour la santé, le social ou l’environnement? Mais ma pauvre dame, vous n’y pensez pas sérieusement!

En ces temps d’inflation, où la classe moyenne tire la langue, ces additions fantasques ne prêtent pas à rire. Il est urgent d’agir et pas seulement en amortissant la recapitalisation de la Caisse de pensions de l’État de Genève. Spoiler: les baisses d’impôts et la gratuité des transports publics proposés ce jour sont un pansement sur une jambe de bois. Les autorités doivent s’attaquer au problème de fond et affûter leur calculette, comme le demandent les Vert-e-s dans une motion déposée au Grand Conseil. Il en va de la crédibilité du gouvernement.

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