Impossible aujourd'hui de savoir si la Suisse manquera d'électricité cet hiver. Ni à quel point. Mais une question devient lancinante: en cas de crise énergétique, où faudra-t-il faire des économies? Face à cette question, le secteur du tourisme tremble: si le courant venait à manquer, la Confédération n'hésiterait pas à tirer la prise des remontées mécaniques, comme spécifié dans son plan d'urgence.
Logique: les domaines skiables font exploser les compteurs. Selon les chiffres des Remontées mécaniques suisses, association faîtière, les tire-fesses, les télécabines, les canons à neige ou encore la restauration ont besoin de 183 gigawattheures (GWh) par an pour tourner. «Ce chiffre correspond à peu près à la consommation de 30'000 à 40'000 ménages par an», estime Marius Schwarz, chercheur à l'Energy Science Center de l'École polytechnique fédérale de Zurich. Par rapport à la consommation totale sur le sol helvétique, c'est toutefois moins de 1%.
Conséquences économiques et sociales
Faudra-t-il couper le jus aux sports d'hiver en cas de crise? Pas forcément. Les watts utilisés ne doivent pas être la seule variable à prendre en compte au moment de faire des choix, avertit le chercheur. En clair, il faut aussi évaluer les conséquences économiques et sociales d'une telle décision.
Et puis, il est aussi possible de prendre le problème par l'autre bout. En montagne, il existerait une solution simple: poser des panneaux solaires dans les Alpes pourrait fournir nettement plus de courant que ceux situés en plaine. «Il est toujours moins douloureux de produire plus d'électricité que de devoir intervenir en cas de manque», souligne Marius Schwarz.
Le conseiller national vert valaisan Christophe Clivaz n'est pas tout à fait du même avis. Pour lui, les canons à neige — très gourmands en eau et responsables du tiers de la consommation sur les pistes de ski (environ 60 GWh) — devraient faire partie des premiers visés en cas de pénurie. Il déplore un non-sens écologique. «Ce débat montre une fois de plus que l'usage de la technologie en montagne n'est pas une solution», remarque le politicien.
Arrêter les remontées mécaniques coûterait cher à l'État
Reste qu'empêcher la production de neige artificielle ne serait pas forcément une solution pour faire face à la crise potentielle de cet hiver. Les canons à neige sont surtout actifs en novembre, alors qu'une éventuelle pénurie d'électricité n'interviendrait que plus tard dans la saison, nuance Christophe Clivaz.
L'arrêt des remontées mécaniques pourrait en outre coûter cher à l'État. Pour le parlementaire, un tel cas de figure demanderait des indemnisations, sur le modèle de ce qui s'est fait durant les restrictions due à la pandémie de Covid-19.