Le ton n'était pas (encore) alarmiste mais grave, ce mardi après-midi au centre des médias du Palais fédéral. Une indication en préambule a donné la température: dorénavant, les experts de la Confédération veulent de nouveau informer de manière hebdomadaire «en raison du développement de la situation». «Malheureusement, nous n’allons pas dans la bonne direction», a reconnu Patrick Mathys, de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP).
Pour retrouver 3000 nouvelles infections au Covid-19 en une journée, il faut remonter à janvier. Ce mardi, le funeste «totomat» s'est établi à 3150. Un chiffre si élevé qu'il a surpris la «task force» de la Confédération, du propre aveu de ses membres.
Tant les infections que les hospitalisations vont vers le haut. Avec les chiffres du jour, nous avons atteint le niveau de la deuxième vague, à la même époque de l’année dernière. Allons-nous vers une quatrième vague? «Nous voyons une augmentation rapide des infections. Cela pourrait tout à fait être le début d’une vague, a reconnu Patrick Mathys. Beaucoup d’indices nous laissent à penser que la tendance haussière va se poursuivre.»
Les comportements individuels vont, comme toujours, avoir une grande importance. Il reste encore beaucoup de personnes non-vaccinées, ce qui ne rend pas optimiste pour la suite.
Risques d'hospitalisation doublés
Avec le variant Delta, les risques d’une hospitalisation sont passés de 5 à 10% chez les personnes infectées. Heureusement, la campagne de vaccination a fait chuter cette proportion à 2%, a expliqué Tanja Stadler, nouvelle cheffe de la task force. «Plus que jamais, il faut se faire vacciner» a enchaîné Patrick Mathys de l’OFSP. Il faut transférer le plus de personnes possibles vers le «pool» des personnes protégées d’une infection, afin d’éloigner le spectre de mesures très interventionnistes.
«Ce qui se passe en ce moment nous inquiète beaucoup, nous les épidémiologistes: les infections sont exponentielles. Si cela continue ainsi, les mesures légères en vigueur actuellement ne suffiront pas à tirer le frein à main», a expliqué Tanja Stadler.
«Or, personne ne veut se retrouver dans un scénario où un lockdown revient sur la table. Il faut donc l’engagement de tous et la volonté de se faire vacciner.»De manière générale, les mesures doivent rester «raisonnables». «Mais si nous arrivons dans une situation où un triage des patients est nécessaire, alors nous devrons prendre des mesures plus importantes et rapides, qu’il s’agisse d’un lockdown ou non. Mais j’espère de tout cœur ne pas avoir à en arriver là.»
Pas plus de 300 patients Covid aux soins intensifs
Le nombre des hospitalisations a fortement augmenté en l’espace d’un mois. L’incidence sur sept jours est passée de 3 à 24, soit une multiplication par huit. «Si cela continue ainsi, nous arriverons vite à une surcharge de nos hôpitaux. Il faut l’éviter à tout prix», a expliqué Tanja Stadler.
La Suisse compte 1000 lits de soins intensifs environ. Si l’on veut éviter des situations problématiques, les patients Covid ne doivent pas occuper plus de 300 lits. Dans le cas contraire, il faudrait de nouveau repousser les opérations non électives. «L’année dernière, nous avons dû repousser 30’000 opérations. Nous ne voulons pas revivre cette situation.» Actuellement, l’OFSP dénombre 122 patients Covid aux soins intensifs.
Heureusement, les décès stagnent, ce que l’on peut attribuer à la vaccination. Les infections augmentent dans toutes les catégories de la population, mais particulièrement chez les jeunes ainsi que chez les enfants de moins de 10 ans, inéligibles au vaccin. Les patients Covid représentent 11% des occupants des lits en soins intensifs. La situation n’est pas encore problématique, mais cette proportion a quadruplé depuis juillet, a relevé Patrick Mathys.
La barrière des 50% de vaccinés franchie
En ce qui concerne la vaccination, la barre symbolique de la moitié de la population a été franchie pour ce qui est des «doubles piqûres». La campagne de vaccination tourne au ralenti en ce qui concerne les Seniors, mais elle continue pour les personnes plus jeunes.
Il est particulièrement important de se faire vacciner en vue de l’automne, puisqu’une «nouvelle vague pandémique nous guette», comme l’a relevé Patrick Mathys. Une nouvelle campagne est en cours. Elle est primordiale si nous voulons «conserver nos libertés», selon lui.
Nouvelle cheffe de la task force, Tanja Stadler a expliqué avoir trois objectifs pour la phase de normalisation: éviter une surcharge du système de santé, protéger les enfants de moins de 12 ans, qui ne peuvent pas se faire vacciner, ainsi que toutes les personnes que le vaccin ne peut pas protéger pour des raisons médicales.
«Le SARS Cov-2 est particulièrement vicieux avec les enfants», a relevé la scientifique. Il faut donc prendre toutes les précautions pour les protéger. Cela comprend des appareils de mesures du CO2₂, des filtres pour l’air, des masques à partir d’un certain âge. Mais les enfants doivent continuer d’aller à l’école, a-t-elle insisté.
De plus en plus d'anticorps dans la population
Tous les interlocuteurs de la conférence de presse ont insisté sur l’importance de la vaccination. Plusieurs études montrent que les anticorps liés à la piqûre sont plus efficaces que ceux présents en raison d’une infection au virus. Même en ce qui concerne de nouveaux variants, la meilleure réponse immunitaire reste donc la vaccination.
Les résultats de «Corona Immunitas», l’enquête sur la présence d’anticorps au sein de la population, ont été révélés. Alors qu’ils étaient entre 3 et 10% l’été dernier, puis entre 10 et 25% au début 2021, les taux de personnes immunisées ont fortement augmenté grâce aux campagnes de vaccination.
Chez les 20 à 64 ans, entre 50 et 80% des gens ont des anticorps. Cette proportion passe à 90% et même jusqu’à 96% chez les personnes âgées, ont relevé les autorités. «Même si vous n’en pouvez plus de l’entendre: la vaccination est la meilleure des protections!», a insisté Rudolf Hauri au nom des médecins cantonaux.