Cela arrive à de plus en plus de personnes âgées en Suisse: un inconnu les contacte par téléphone et leur dit que leur fils ou leur fille a provoqué un grave accident et qu'il est en garde à vue. On leur indique qu'ils doivent payer d'urgence une caution d'un montant de plusieurs dizaines de milliers de francs. Cela semble si dramatique et convaincant que de nombreux seniors se laissent prendre au dépourvu et acceptent de faire la transaction par inquiétude pour leurs proches.
Cette année, au moins 150 personnes ont été escroquées de cette manière en Suisse. Et il ne s'agit là que du nombre de victimes enregistrées prétendant que des membres de la famille sont en danger. Le nombre de cas non recensés est probablement bien plus élevé.
Plus de huit millions de francs
Selon les chiffres officiels, les escrocs ont déjà obtenu près de huit millions de francs suisses avec cette arnaque entre janvier et août. En 2021, le montant des sommes d'argent escroquées par des appels téléphoniques chocs était encore d'un million. En 2022, il était déjà de six.
Selon les autorités de poursuite pénale, les auteurs de l'escroquerie aux appels téléphoniques sont des clans familiaux polonais. La deuxième escroquerie téléphonique qui déferle sur la Suisse, les «faux policiers», est généralement le fait de ressortissants turcs. Dans ce type de cas, les malfaiteurs ont même réussi 170 fois cette année. Ils ont escroqué 3,5 millions de francs.
Les faux policiers sévissent
«Nous avons pu enregistrer une quarantaine d'arrestations dans toute la Suisse dans le cadre de cette affaire de 'faux policiers', explique le procureur bernois chargé des délits économiques, Rolf Rüdisser. En ce qui concerne les autres appels, on compte 16 arrestations dans toute la Suisse.»
Dans le cas des faux policiers, les appelants mettent en garde contre les escrocs et utilisent les victimes comme appât pour de prétendues enquêtes policières. Ce sont par exemple de faux agents de sécurité d'une banque qui peuvent se présenter: «Avez-vous acheté hier un téléviseur pour 6000 francs?», est une question d'entrée typique.
La victime répondrait alors par la négative. «Vous voyez, il y a quelque chose qui ne va pas, dit-on alors à l'autre bout du fil. Nous pouvons clarifier la situation. Nous observons en effet depuis longtemps que des prélèvements étranges ont lieu à l'intérieur de la banque. La police est déjà sur le coup. Mais vous pourriez nous aider en retirant 20'000 euros de votre compte...» C'est ainsi, à quelques détails près, que peut se dérouler cette arnaque.
Par l'annuaire téléphonique aux victimes
Les victimes sont souvent des femmes âgées. «Les escrocs recherchent de manière ciblée des femmes âgées dans l'annuaire téléphonique électronique. Ils le font à partir des prénoms», explique le procureur. Ils viseraient des noms comme Josiane, Rosmarie, Josette ou Ruth – des prénoms dont la probabilité que ce soit une jeune femme est proche de zéro. Pourquoi davantage de victimes femmes que d'hommes? Nous ne pouvons que spéculer sur les raisons.
La plupart du temps, la police ne parvient toutefois qu'à arrêter les «ramasseurs», c'est-à-dire les personnes qui collectent l'argent des victimes de l'escroquerie. Les bandes turques trouvent généralement leurs «ramasseurs» par le biais de petites annonces en Suisse, alors que pour les bandes polonaises, ce sont généralement des membres du clan.
Les autorités collaborent au-delà des frontières
Les autorités suisses ne parviennent que difficilement à s'approcher de ceux que l'on appelle les «coinceurs», c'est-à-dire les personnes qui appellent et qui sont basées en Pologne ou en Turquie. Les «logisticiens» coordonnent les escroqueries entre les «coinceurs» et les «ramasseurs», et les autorités ne parviennent pas non plus à les attraper. Pour atteindre les commanditaires, il faut aller vite. La voie classique de la demande d'entraide judiciaire est donc trop longue.
Mais la situation pourrait maintenant changer: Les ministères publics de Berne et de Zurich ainsi que leurs polices cantonales se sont associés aux autorités de sécurité d'Allemagne, de République tchèque et de Pologne pour former un groupe d'enquête commun. L'Autriche pourrait également s'y joindre.
Bientôt une campagne de prévention
S'il s'agit d'un de ces appels, les autorités de sécurité suisses doivent pouvoir entrer rapidement en contact avec leurs collègues polonais. Les données téléphoniques de l'appel en Suisse permettent éventuellement de trouver son logisticien en Pologne.
Le mieux est toutefois que les gens ne se laissent pas du tout arnaquer par les escrocs au téléphone. Pour ce faire, la Prévention Suisse de la Criminalité et les polices cantonales et municipales lanceront début octobre une campagne nationale de prévention. Car «ces actes doivent cesser», martèle le procureur Rolf Rüdisser.