Laits végétaux dans le viseur
«Le canton de Vaud manque de vaches, il faut les remettre au milieu du village»

Il faut «remettre la vache au milieu du village vaudois». Voilà ce qu'a déclaré Pascal Hottinger, chef de Direction de l'agriculture et de la viticulture (DGAV), dans une publication sur LinkedIn. Il s'explique en répondant à cinq questions de Blick.
Publié: 20.09.2023 à 16:48 heures
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Dernière mise à jour: 20.09.2023 à 19:17 heures
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La publication LinkedIn de Pascal Hottinger sur le manque de vaches dans le canton de Vaud a fait réagir.
Photo: LinkedIn, Fabrice COFFRINI/AFP
Thibaud Mabut

Lundi dernier, Pascal Hottinger publie un texte sur LinkedIn: il y explique pourquoi le canton de Vaud «manque de vaches» et tance au passage l'engouement pour les laits végétaux. La publication du chef de la Direction de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV) rencontre un certain succès, dont lui-même se dit surpris.

Blick le contacte pour une interview et de nombreux internautes lui transmettent des commentaires. De peur d'être «mal compris» et «perçu comme provocant», Pascal Hottinger réalise un rétropédalage et modifie sa publication LinkedIn. Il s'explique aujourd'hui en répondant à cinq questions.

Vous dites qu’il faut «remettre la vache au milieu du village vaudois». C’est un slogan de Swissmilk?
Non, pas du tout. Avec cette formule, j'ai voulu mettre en lumière un aspect particulier d'une problématique plus vaste. Les vaches jouent un rôle clé dans la valorisation des alpages impropres à d’autres formes d’agriculture (plus de 60'000 hectares dans le canton). Nous avons besoin de vaches pour l’alimentation de la population et la qualité des sols (taux d’humus, séquestration du CO2, absorption de l’eau). Je souhaite présenter avec mesure et impartialité la complexité des enjeux liés à ce sujet sensible. Je suis au service de mon canton et de sa population et je m’engage pour soutenir tous les types d’agriculture.

Les vaches laitières sont responsables d’un tiers des émissions de l’agriculture suisse, selon le WWF. Peut-on vraiment atteindre nos objectifs de réduction sans réduire la taille du cheptel?
Ça dépend. Je ne peux pas répondre brièvement sans risquer des erreurs d’appréciation. Selon les calculs de Quantis, les émissions des vaches vaudoises représentent 3 à 6% des gaz à effet de serre du canton. Voilà pour le contexte et le défi. La densité des vaches sur notre territoire est une des plus basses de Suisse. Le fumier et les urines qu’elles produisent contribuent à la qualité et fertilité naturelle des sols. Des recherches sont en cours pour réduire les gaz à effet de serre émis par litre de lait. La problématique doit aussi s'articuler à un niveau national et international, d'entente avec les professionnels des cycles de vie des produits et des filières pour définir les meilleures stratégies agricoles locales.

Vous tancez «certains scientifiques ou experts» dans votre publication. Êtes-vous anti-science? De quels scientifiques parlez-vous?
Je ne peux pas me passer de l’expertise scientifique, cette question est absurde. Les travaux scientifiques sont indispensables à la planification du futur de l'agriculture. En revanche, je crains que les conclusions scientifiques soient parfois sorties de leur contexte et potentiellement instrumentalisées à des fins commerciales ou partisanes. C’était le sens que je souhaitais donner à mon propos. A mon avis, il faudrait davantage donner la parole aux travailleuses et travailleurs de la terre. Ce sont eux qui sont chargés d'appliquer les politiques agricoles nationales et qui connaissent la réalité du terrain.

Selon l’Office fédéral de l'agriculture, le développement des laits végétaux représente un potentiel important en particulier pour la production de matières premières. Vous n’êtes pas d’accord?
Si, il faut s’intéresser aux boissons végétales. Mais personnellement, je recommande de ne pas les confondre avec du lait. Pour avoir moi-même œuvré à la production d'un prototype de boisson à base d'avoine dans le passé, je suis convaincu de l’intérêt de la filière des protéines végétales. Le canton de Vaud est le principal producteur de céréales panifiables et de protéines végétales de Suisse. Le paradoxe, c'est que la majorité des boissons végétales est importée, sans profiter au secteur agricole et alimentaire local.

Comment le canton de Vaud devrait-il soutenir son secteur laitier?
Le canton de Vaud soutient déjà son secteur laitier et va continuer de le faire. En plus des paiements directs – financés par la Confédération –, les améliorations foncières contribuent à concilier la production nutritive locale pour la population avec la santé animale et la préservation de l’environnement. Ces investissements favorisent la modernisation des quelque 740 fermes laitières vaudoises et sont financées par la Confédération, le Canton et les entrepreneurs agricoles.

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