Initiative sur les pesticides
L'USP traîne les pieds au Parlement

Les opposants à l'initiative sur les pesticides affirment se préoccuper tout autant de l'environnement que leurs adversaires. Mais l'Union suisse des paysans combat toute mesure avec acharnement et tente de passer son obstruction sous le tapis.
Publié: 31.05.2021 à 11:03 heures
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Dernière mise à jour: 31.05.2021 à 16:07 heures
Lea Hartmann

«Vous les reconnaîtrez à leurs actes», dit la Bible. Une maxime que le fervent catholique et patron de l'Union suisse des paysans (USP), Markus Ritter, a certainement déjà entendue. Cependant, dans sa campagne contre l'initiative pour une eau propre et les pesticides de synthèse, d'autres normes que la parole de Dieu semblent s'appliquer.

Le conseiller national du Centre se bat contre ces deux initiatives populaires qui veulent restreindre fortement ou interdire complètement l'utilisation des pesticides phytosanitaires. L'argument central des opposants soutient qu'un non aux initiatives renforcerait la protection de l'environnement. Ritter en veut pour preuve le paquet législatif que le Parlement a élaboré ce printemps dans le but de réduire l'utilisation des pesticides et des engrais en Suisse.

Avec une «mise en œuvre et une application cohérentes de tous les instruments», il existerait déjà «assez de leviers pour rendre l’agriculture suisse encore plus durable et pour relever les défis actuels», écrit le comité du Non, dirigé par l'USP.

Des paroles aux actes

Ce que les opposants ne mentionnent pas, c'est leur tentative d'empêcher cette mise en œuvre et les applications cohérentes qui en découlent. Le conseiller fédéral en charge de l'agriculture Guy Parmelin a en effet récemment présenté des mesures visant à atteindre les objectifs adoptés par le Parlement.

Les agriculteurs auront par exemple moins de marge de manœuvre en ce qui concerne le lisier. Ils sont actuellement autorisés à pulvériser jusqu'à 10% de plus que ce qui est bon pour l'environnement. Parmelin veut abolir ce seuil de tolérance. Parmi les mesures proposées, ce serait celle qui aurait le plus grand effet sur l'environnement, comme le montrent les calculs de la Confédération. Mais le lobby agricole s'y oppose.

Objets reportées dans les deux chambres

Markus Ritter refuse de commenter cette mesure ainsi que les autres propositions de la Confédération. Selon lui, les conséquences doivent d'abord être analysées. La proposition n'est pourtant pas nouvelle et l'opposition de l'USP établie depuis longtemps, ce que les votants ignorent parfois.

Markus Ritter, président de l'USP, à la session de printemps du Conseil national.
Photo: keystone-sda.ch

L'Union des paysans n'a pas l'intention de jouer cartes sur table avant le vote sur les pesticides du 13 juin. Elle tente d'éviter les occasions de porter la thématique dans le débat public et utilise toutes les méthodes possibles pour éviter que le Parlement ne s'y penche trop vite. La session d'été débute aujourd'hui à Bern; pourtant, plusieurs points à l'ordre du jour concernant l'USP ont été reportés, tant au Conseil national qu'au Conseil des États. Deux propositions figuraient initialement à l'ordre du jour de la première semaine de la session, mais ne seront désormais soumises aux élus qu'au cours de la troisième et dernière semaine - et donc après le scrutin.

Contre l'épandage du lisier

Il s'agit par exemple d'une méthode d'épandage du lisier plus respectueuse de l'environnement, que le Conseil fédéral a déjà actée, et consistant en l'obligation d'utilisation de tuyaux d'arrosage. L'objectif est de réduire de 20% les excédents de phosphore et d'azote dans l'eau et le sol d'ici à 2030.

Peter Hegglin (Centre), conseiller aux Etats zougois et président d'IP Lait, l'organisation faîtière du secteur laitier, veut empêcher l'introduction de ce tuyau obligatoire. Le Conseil des États a déjà approuvé la proposition et celle-ci doit maintenant être soumise au Conseil national. Les intentions de vote des conseillers nationaux du camp bourgeois et liés à l'USP font peu de doutes.

La requête visant à ne discuter de la question qu'après le 13 juin a été présentée par le président du Conseil national Andreas Aebi (UDC), agriculteur de profession. Aebi justifie cette demande en disant que l'objet devrait être discuté sur des bases «fondées» et pas durant une campagne «polémique.»

«C'est de la tactique pure»

Un argument mal reçu dans le camp des partisans de l'initiative. «C'est de la tactique pure», déclare la conseillère nationale verte Regula Rytz. Selon elle, la volonté de tromper la population est évidente. «Les milieux agricoles conservateurs promettent ciel et terre dans la campagne référendaire, mais ils ne font rien d'autre que de freiner la protection de l'environnement.»

Tiana Moser, cheffe du groupe parlementaire vert'libérale, accuse également les opposants à l'initiative de faire des promesses en l'air. «L'USP combat tout ce qui pourrait apporter une amélioration sérieuse de la situation», affirme la conseillère nationale.

Regula Rytz regrette également que de telles manœuvres fassent apparaître les agriculteurs sous un mauvais jour. «Beaucoup d'entre eux seraient prêts à aller plus loin en matière d'écologie.»

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