Fuite de contrats secrets
Les accords entre Pfizer et les États font scandale

La société pharmaceutique américaine Pfizer fait un tabac avec le vaccin contre le Covid-19. Pourtant, ses contrats sont très unilatéraux et les différences de prix par pays, énormes. Explications.
Publié: 02.08.2021 à 13:33 heures
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Dernière mise à jour: 11.08.2021 à 18:45 heures
La fuite des contrats secrets de Pfizer provoque des remous.
Photo: DUKAS
Nicola Imfeld, Lauriane Pipoz (adaptation)

La vaccination contre le coronavirus tente de nous ramener à la normalité. Mais les entreprises pharmaceutiques déterminent le prix que coûtera notre retour à la vie «normale» puisqu'elles approvisionnent le monde en vaccins. L'une des plus grandes est la société américaine Pfizer, qui, avec la société allemande Biontech, commercialise un vaccin contre le coronavirus basé sur l'ARNm.

Les contrats de Pfizer avec les pays auxquels elle fournit les vaccins sont restés secrets jusqu'à présent. Récemment, cependant, les accords d'approvisionnement conclus avec plusieurs pays ont été divulgués. Des médias en parlent dans le monde entier. Et les gros titres ont jeté une lumière douteuse sur ce géant pharmaceutique.

Un réseau de recherche albanais a été le premier à faire état de ces contrats secrets. Selon ce rapport, Pfizer assure ses arrières d'une manière pour le moins controversée.

Des contrats unilatéraux

L'un des points de controverse: une longue clause de non-divulgation. Selon les documents rendus publics, Pfizer stipule que les contrats doivent rester secrets pendant dix ans. De plus, ils ne peuvent sous aucun prétexte être résiliés - même si des remèdes efficaces sont trouvés contre le Covid-19.

Un risque apparemment très unilatéral puisque Pfizer ne pourra être incriminé de... presque rien: «En aucun cas, Pfizer ne pourra être tenu responsable d'un retard de livraison», indique par exemple le contrat avec l'Albanie. Selon les journalistes, cette clause s'applique même en cas d'erreurs du fabricant. En outre, aucun retour n'est possible, et des rappels ne sont prévus que si le vaccin lui-même est défectueux.

Notons aussi qu'il est prévu que le risque soit réparti unilatéralement en cas de dommages et intérêts, par exemple, en raison d'effets secondaires. Ainsi, Pfizer, en tant que fabricant, partagerait ce risque avec les acheteurs: les pays qui achètent les vaccins seraient co-responsables. Et ce n'est pas tout: selon les accords, les États devraient même prendre en charge la défense juridique de Pfizer et la payer.

Pfizer fait fortune avec les vaccins

Des différences de prix entre les pays sont enfin déroutantes. Selon les documents qui ont fuité, rapportés dans le «Tages-Anzeiger» d'aujourd'hui, le Brésil et l'Albanie s'en tirent à bien meilleur compte que les États-Unis ou l'UE. Le Brésil paie 10 dollars par dose, l'Albanie 12 dollars. Ce même produit coûte aux Américains 19,50 dollars et 18,50 dollars à l'UE. Et Israël aurait payé jusqu'à 65 dollars par dose en décembre. Quant à la Suisse, on ne sait pas combien d'argent elle a versé pour le vaccin Pfizer. L'Office fédéral de la santé publique ne donne pas de détails sur les contrats.

Ce qui est clair, c'est que même si ses prix sont comparativement bas par rapport à d'autres nouveaux vaccins, Pfizer gagne beaucoup d'argent grâce au coronavirus. Les résultats trimestriels de la semaine dernière ont montré que le vaccin contre le Covid-19 a contribué aux ventes à hauteur de 7,8 milliards de dollars. D'ici la fin de l'année, Pfizer prévoit des ventes de plus de 33 milliards de dollars. Et si une troisième vaccination s'avérait nécessaire, cette piqûre de rappel serait un contrat en or pour le géant pharmaceutique.

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