Ceci est un article clivant qui allie musique, drogues, #MeToo et idéalement un sujet d’actualité émotionnel. Oups, désolé, j’ai oublié d’effacer mes notes d’intentions. Autre intention: cette année, se mouiller un peu. En effet, j’ai lu vos retours («té null et iper kon») et je ne vais absolument pas en tenir compte. Mais je vais tâcher d’ajouter un peu de rigueur à ces chroniques.
Je suis donc allé voir un concert qui – d’après l’application Paléo – invite au voyage. Bien vu, j’ai tout de suite eu envie de me casser. Pas plus de rigueur musicale que l’an passé donc, mais GRANDE nouveauté: chaque jour, une immersion avec des gens. Ce soir? Le petit monde incestueux de la culture.
Je retrouve une CEO/#GirlBoss d’une agence artistique active dans d’«autres services de spectacles et d'activités récréatives» (selon le registre du commerce). Après avoir dû réexpliquer le principe de NE PAS FACTURER UNE CAUTION RENDUE à une serveuse française dont c’est le premier Paléo, je me pose donc avec Marion* (*prénom connu de la rédaction et de vous-mêmes puisque c’est le sien) pour discuter de son travail.
Paléo, c’est un peu une mafia
Elle me décrit un milieu musico-culturel en forme de panier d’egos à l’alcoolisme fonctionnel qui enchaînent des discussions mondaines pour éviter de s’avouer qu’ils se détestent. Bref, comme un repas de famille, le côté fonctionnel en plus. Rebref, tout ce que j’aime.
Bon, il y a quand même un embouteillage post-Covid qui engendre une concurrence rude, diminuant le montant des subventions. À part que ça péjore le nombre de bières payées par Marion, ça me fait la même chose qu’à vous: ça me touche une contribution publique sans faire bouger l’autre.
Bref, à ma grande déception, Marion n’a aucune casserole sur Paléo. Enfin rien de plus que ce que nous apprenait «Le Temps» en 2020. À savoir que le festival détient 75% d’une boîte de production et de booking dont de nombreux artistes sont programmés à Paléo.
Flashback: lundi, Daniel Rossellat se plaignait en conférence de presse de la hausse des cachets demandés par les producteurs et bookers pour les concerts. LOL. En même temps, je le comprends: ça fait toujours un peu mal de sortir de la thune de son compte épargne pour la mettre sur son compte courant.
Histoire de vérifier les dires de Marion sur les égos dans le milieu culturel, j’écris à Vincent Sager pour me faire inviter à l’apéro organisé par Opus One (rien à voir avec la boîte de production et de booking précitée). En chemin, je fais un crochet par l’installation artistique de la HES-SO.
Je renonce à tester le tobogan. Après Malley pas sûr que ce soit la période idéale pour monter sur un échafaudage. (Et oui j’irai en enfer, mais pas tout de suite: je ne suis pas monté sur l’échafaudage). DONC: l’apéro d’Opus One et le panier d’egos. Vincent Sager brille, comme une lumière au milieu de tous ces gens qui ne s’aiment pas.
Et qui n’aiment Paléo, selon Vincent Sager: «C’est pas la taille qui compte, mais elle permet de faire certaines choses qui peuvent énerver». Plein de blagues, mais no comment.
Peu de têtes connues à cet apéro (mon alcoolisme est mondain, pas fonctionnel), à part le programmateur Jacques Monnier. De la loge, il observe Patti Smith sur la grande scène. Il y a quelque chose de touchant à voir, dans son œil, le reflet concret de mois de travail. Il la regarde d’un air pénétré. Rien à voir mais juste derrière lui se tient Bastian Baker.
Au menu de l’apéro: la ligne Roset de la bouffe, soit des canapés mais de types comestibles. Notamment une émulsion de quelque chose sur une mousse d’autre chose. Quoiqu’en disent les gens de la branche, la culture ne va pas si mal.
On se fait vieux
Et nous non plus, on ne va pas si mal avec nos canapés émulsifs. Mais comme disait certainement l’Abbé Pierre entre deux mains au cul: «On vieillit, mes aïeux.» Et vite. À peine le temps d’accepter que je suis plus âgé que la plupart des footballeurs, je dois digérer le fait d’avoir fait le gymnase avec un des artistes programmés à Paléo: Sami Galbi. Ma première ride de fierté.
Et à la fin du paragraphe précédent, on est devenus tellement vieux qu’on va voir Sean Paul qui nous a manqué depuis les titres téléchargés sur LimeWire ou twerkés au Loft, à Lausanne. Et là, c'est le drame. Sur la scène de Vega, Sean Paul ne se ressemble plus. Enfin, on ne sait pas parce qu’on est trop loin, le son n’est pas bon, parce que la scène est trop petite pour TOUT CE MONDE QUI VIEILLIT À PALÉO.
Bourde des programmateurs, décalage entre âge fantasmé et âge réel (#AbbayeDeSt-MauriceLikesThat) des festivaliers, ou juste un pari raté de faire de Vega une deuxième grande scène? Possible. Ou peut-être que l’alcoolisme dans la musique n’est pas toujours si fonctionnel que cela.