Imaginez la photo: Volodymyr Zelensky, en tenue de «Top Gun», dans le cockpit d’un avion de chasse américain F-16. L’un des avions de combat les plus vendus dans le monde, entré en service en 1979 et maintes fois modernisé depuis? La propagande militaire ukrainienne tiendrait là son «Graal».
Avec, au sol, les chars lourds M1 Abrams, Léopard 2 et Challenger, les canons Caesar, les batteries de défense anti-aérienne et les missiles américains GLSDB d’une portée de 150 kilomètres que les Alliés ont promis ces jours-ci de livrer, l’armée de Kiev afficherait enfin la force de frappe jugée indispensable par son État-major, confronté après un an de guerre à une offensive russe généralisée.
Biden a dit «non»
Des avions. Et vite. Le président ukrainien l’a encore redit à Bruxelles à ses interlocuteurs européens lors de ses entretiens bilatéraux à Bruxelles le 9 février, comme il l’avait fait la veille à Londres, puis Paris, et auparavant à Washington juste avant Noël.
On connaît la réponse. Joe Biden a dit «non» pour les F-16 le 31 janvier. Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, s’est contenté de déclarer que le sujet «n’est pas écarté», mais sans se prononcer, ouvrant juste la voie à la formation de pilotes. Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont tous deux estimé que «ce n’est pas la priorité».
Sauf que sur le terrain, et dans les bases aériennes de l’OTAN, le décompte a commencé. Quels avions pourraient voler dans le ciel ukrainien? À cette question, un début de réponse existe déjà.
Les premiers appareils disponibles? Les MiG-29 de fabrication... russe
La Pologne a, très tôt, proposé ces avions de combat MiG-29 à l’armée de l’air ukrainienne. Fin janvier, cette offre de service a même été publiée sur le site web du Ministère polonais des Affaires étrangères, sans que les États-Unis ou l’OTAN en aient été préalablement informés.
La formule exacte? La Pologne s’est dite prête «à déployer immédiatement et gratuitement» sa trentaine de jets MiG-29 sur la base aérienne de Ramstein (All) et à les mettre à la disposition du gouvernement américain. Logique: Varsovie demande ainsi à Washington de s’engager à remplacer ces avions. Cette flotte de MiG-29 pourrait être étoffée par les appareils du même type en service en Bulgarie (16) et en Slovaquie (12). L’Allemagne en possède également, hérités de la RDA.
Voici le MiG-29 russe en démonstration:
C’est d’ailleurs au sein de l’armée de l’air allemande que les comparaisons ont été faites avec les autres appareils alliés, type F/A-18. Résultat: «En combat aérien, les MiG-29 de la Luftwaffe se sont révélés très dangereux, notamment dans les engagements rapprochés en manœuvre, note le site Migflug. Grâce à l’affichage monté sur casque (HMD) et au missile air-air à courte portée hors-bord Vympel R-73 (nom de rapport OTAN AA-11 Archer), les MiG-29 Fulcrums avaient un net avantage dans les combats aériens sur leur homologue occidental, le F/A-18 Hornet de l’US Air Force.»
D’autres exercices se sont tenus… dans le ciel helvétique. «Un entraînement similaire a également eu lieu en Suisse, où des F/A-18 des forces aériennes suisses ont affronté des MiG-29 de la Luftwaffe allemande, note le même site. Les pilotes suisses ont été tout aussi surpris par les qualités des MiG-29 dans un combat rapproché.» Avant l’agression russe du 24 février 2022, l’armée de l’air ukrainienne comptait officiellement une cinquantaine de MiG-29. Mais on n'a aucune précision sur leur état actuel ni sur le nombre d’appareils abattus depuis lors…
FA-18 contre MiG-29 dans le ciel suisse:
Deuxième option: Les appareils alliés d’ancienne génération
L’exemple souvent cité, mais jusque-là écarté par Emmanuel Macron, est celui des Mirage 2000C français, officiellement retiré en juin 2022. La France en avait 106 en service en 2021, remplacés soit par des Mirage 2000D (attaque au sol) ou Mirage 2000-5 (intercepteurs) et bien sûr par des Rafale. Avantage: la France n’a pas besoin de demander d’autorisation pour exporter ces matériels. On parle aussi des Mirage F1, plus anciens.
Autres exemples: les Gripen Suédois de la firme Saab, même si les autorités de Stockholm s’y refusent. Les experts ukrainiens ont souvent cité le Gripen JAS 39 comme l’un des meilleurs avions possibles pour cette guerre, car il peut opérer à partir de sites éloignés avec le moins d’infrastructures possible.
On parle aussi des F-15 et F-16 américains. Le F-15E Strike Eagle, en service depuis 1989 (notamment dans l’armée de l’air britannique, qui en a déployé six exemplaires sur la base polonaise de Lask), est conçu pour détruire des cibles au sol. Il renforcerait considérablement la puissance de feu des forces aériennes de l’Ukraine.
Pour le F-16, le quotidien «The Guardian» a fait le tour de la question: «Le F-16 Fighting Falcon est un avion de combat léger mis en service pour la première fois en 1979. Il a été largement utilisé par l’armée de l’air américaine dans les deux guerres d’Irak et en Afghanistan. Il y en a des stocks disponibles en Europe.» L’Ukraine aurait identifié 50 pilotes qu’elle souhaiterait former immédiatement. Un budget de 100 millions de dollars a été voté en décembre 2022 par le Congrès américain, sur proposition du Pentagone.
Pas d’appareils de dernière génération
Hors de question en revanche de fournir aux Ukrainiens des appareils de dernière génération, du type F-35 américains ou Rafale français. À Bruxelles, le président français, Emmanuel Macron, a vigoureusement exclu «tout avion de nature à provoquer une escalade dans le conflit». Des termes très vagues. Car dans les faits, fournir des appareils modernes (même anciens) à l’Ukraine sera déjà une escalade.