Le Royaume-Uni s'est réveillé soulagé jeudi, au lendemain d'une soirée où les craintes de violences d'extrême droite, qui secouent le pays depuis une semaine après le meurtre de trois fillettes, se sont dissipées au profit de manifestations antiracistes pacifiques.
Là où les forces de l'ordre redoutaient des dizaines de nouvelles manifestations racistes et islamophobes laissant craindre de nouveaux heurts, elles ont en fait assisté dans la plupart des cas à des rassemblements pacifiques de manifestants opposés au racisme. Dans le quartier londonien de Walthamstow, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées, a constaté un journaliste de l'AFP.
A lire sur les manifestations au Royaume-Uni
Militants de l'association Stand Up To Racism et habitants, arborant parfois des drapeaux palestiniens, ont brandi des pancartes «Stop à l'extrême droite» et «Réfugiés bienvenus», en opposition frontale avec les actes hostiles depuis une semaine ciblant mosquées ou hôtels hébergeant des demandeurs d'asile.
Le chef de la police de Londres Mark Rowley s'est dit jeudi matin «vraiment ravi de la manière dont les choses se sont passées» grâce au déploiement policier et à la population. Il a salué, devant des journalistes, la «démonstration d'unité», même si «dans quelques endroits des délinquants locaux sont venus» pour se livrer à des actes «antisociaux».
Manifs antiracistes dans tout le pays
Plus d'une vingtaine d'arrestations ont été effectuées jeudi à l'aube à la suite de violents heurts la semaine dernière à Londres, a ajouté le chef de Scotland Yard, dénonçant comme «absurde» toute «suggestion que ce sont des patriotes» qui manifestaient «pour une cause»: «ce sont des délinquants». «Je vis dans le quartier et nous ne voulons pas de ces gens (d'extrême droite) dans nos rues... Ils ne nous représentent pas», a affirmé à l'AFP Sara Tresilian, 58 ans, lors de la manifestation à Walthamstow.
A Birmingham (centre), des centaines de personnes se sont rassemblées devant un centre d'aide aux migrants. Sur des vidéos de l'AFP, on entend des slogans comme «Disons-le haut et fort, les réfugiés sont les bienvenus ici». Certains tenaient des pancartes sur lesquelles était écrit «Le fascisme n'est pas le bienvenu». A Brighton, 2000 personnes ont participé à une manifestation «pacifique», selon la police.
D'autres rassemblements ont eu lieu à Bristol (ouest), à Liverpool (nord) aux abords du bâtiment d'une association d'aide aux demandeurs d'asile, Sheffield (nord), Newcastle (nord) ou encore Oxford (centre), et se sont dispersés dans le calme.
Des tensions ont toutefois éclaté sporadiquement, comme à Aldershot (sud) où selon l'agence de presse britannique PA la police a dû s'interposer entre des militants antiracistes et un groupe de personnes qui criaient «Arrêtez les bateaux», en référence aux migrants qui arrivent au Royaume-Uni par la Manche sur des bateaux pneumatiques. La ministre de l'Intérieur Yvette Cooper a salué dès mercredi soir le travail des agents présents sur le terrain «pour protéger et soutenir les communautés locales».
Lourde présence policière
Ces rassemblements se sont tenus sous forte présence policière, alors que les autorités avaient mis en garde les émeutiers qu'ils risquaient de lourdes peines s'ils réitéraient les violences des derniers jours. Plus de 400 personnes ont été arrêtées depuis le début des heurts, et plus de 120 personnes ont été inculpées, selon le parquet. Les premières condamnations sont également tombées.
«Voilà l'action rapide que nous prenons», s'est félicité sur X le Premier ministre Keir Starmer, qui a multiplié les messages de fermeté. Depuis une semaine, le Royaume-Uni a connu des scènes de violences racistes, après la circulation d'informations en partie démenties sur le profil de l'auteur présumé d'une attaque au couteau dans un cours de danse, où trois fillettes de 6 à 9 ans ont été tuées à Southport (nord-ouest de l'Angleterre).
Le suspect a été présenté comme un demandeur d'asile de confession musulmane. Il est en fait né à Cardiff, au Pays de Galles, et sa famille est selon les médias britanniques originaire du Rwanda. Le gouvernement avait indiqué que 6000 policiers supplémentaires spécialisés dans le maintien de l'ordre seraient sur pied cette semaine et que 567 places de prison seraient disponibles pour incarcérer les fauteurs de troubles.