La Finlande et la Suède ont déposé ce mercredi leur demande d'adhésion à l'alliance militaire protectrice de l'OTAN. Les 30 membres de l'organisation doivent donner leur accord, or un l'un d'entre-eux semble particulièrement réticent: la Turquie.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan et le ministre des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu accusent notamment la Suède d'héberger des groupes kurdes extrémistes ainsi que des partisans du prédicateur Fethullah Gülen qui vit aux Etats-Unis. Le président Erdogan rend le mouvement Gülen responsable de la tentative de putsch en Turquie en 2016.
La Turquie critique en outre le fait que les Etats de l'OTAN ont également limité la livraison de matériel militaire en raison de l'action turque contre ces groupes. Erdogan a menacé lundi de ne pas accepter l'adhésion de pays qui imposent des sanctions à la Turquie. En ce qui concerne la visite prévue d'une délégation finlandaise et suédoise en Turquie, il a déclaré qu'ils ne devaient même pas faire l'effort de ce déplacer.
Erdogan a une «mentalité de bazar».
Les Suédois et les Finlandais frappent-ils donc en vain à la porte de l'OTAN? Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Jean Asselborn doute qu'Erdogan se préoccupe réellement des groupes extrémistes. Selon lui, le président turc a une «mentalité de bazar». Il a spéculé que l'attitude de refus d'Ankara pourrait être liée au fait que la Turquie espère obtenir des concessions en matière de livraison d'armements.
Laurent Goetschel, politologue à l'université de Bâle et directeur de la Fondation suisse pour la paix «Swisspeace», qualifie également les déclarations d'Erdogan de «coup de poker». «Il veut sans doute surtout obtenir quelque chose des Etats-Unis, après que ceux-ci ont retiré la Turquie du programme F-35», explique-t-il à Blick. Les Etats-Unis ne livrent pas ces jets à Ankara parce que la Turquie avait acheté un système de défense antimissile russe.
Mais il est également possible qu'Erdogan veuille s'attirer la sympathie de Vladimir Poutine par son action et renforcer son pouvoir au sein de l'OTAN, estime Laurent Goetschel. Mais il ne croit pas qu'Erdogan prenne vraiment au sérieux son droit de veto.
Les ambassadeurs gardent la tête froide
Les ambassadeurs de Suède et de Finlande en Suisse se montrent eux aussi optimistes. Le Suédois Jan Knutsson l'assure: «La Suède et la Finlande ont toutes deux mené un bon dialogue avec la Turquie sur nos considérations en matière de politique de sécurité. Nous allons continuer ce dialogue afin de trouver une voie pour aller de l'avant».
Pour l'ambassadeur finlandais Valtteri Hirvonen, il est tout à fait naturel de rencontrer quelques embûches sur le chemin. «Mais là, nous devons garder la tête froide et surmonter les obstacles avec nos futurs partenaires, explique-t-il. Nous avons reçu des signaux positifs de la Turquie il y a quelque temps. Bien sûr, nous devons maintenant voir en quoi consistent concrètement les préoccupations sécuritaires turques et comment nous pouvons les aborder».
(Adaptation par Thibault Gilgen)