Un nouvel ordre mondial
Quelle est la force de l'alliance entre la Russie et la Chine contre Trump?

Le 47e président des Etats-Unis Donald Trump n'avait cessé de souligner sa stratégie «America First» bien avant son investiture. En face, il existe une alliance entre Vladimir Poutine et Xi Jingping - du moins c'est ce qu'il semble. Mais le monde est bien plus complexe.
Publié: 25.01.2025 à 06:31 heures
|
Dernière mise à jour: 25.01.2025 à 13:41 heures
1/5
Donald Trump poursuit une stratégie: America First.
Photo: imago/MediaPunch
RMS_Portrait_AUTOR_1055.JPG
Denis Molnar

«Les États-Unis connaîtront à nouveau la croissance et la prospérité. Nous porterons le drapeau vers de nouveaux horizons et enverrons des astronautes dans l'espace pour hisser les 'Stars and Stripes' sur la planète Mars». Lors de son discours d'investiture en tant que 47e président des Etats-Unis lundi à Washington, Donald Trump n'a laissé planer aucun doute sur la direction que prendra sa politique au cours des quatre prochaines années: «America First».

Le lendemain du discours d'investiture de Trump, le chef d'Etat russe Vladimir Poutine et son homologue chinois Xi Jinping ont souligné les liens étroits qui unissent leurs pays. Lors d'un entretien téléphonique, ils ont parlé de politique internationale et le chef du Kremlin a souligné leurs intérêts communs. Ils sont d'accord sur «ce que devraient être les relations entre les grands Etats». La Chine est le principal partenaire commercial de la Russie, qui lui fournit la majeure partie de son pétrole. On aurait pu croire que la Russie et la Chine étaient les meilleures amies du monde pour l'éternité. Une telle image déforme toutefois la réalité.

Le multilatéralisme est soumis à une forte pression

«Il est important de comprendre que tous les États souverains de ce monde poursuivent en premier lieu leurs propres intérêts», explique Christoph Frei, professeur de sciences politiques à l'université de Saint-Gall, dans un entretien avec Blick. «Environ 200 Etats souverains regardent d'abord vers eux-mêmes. On s'associe avec d'autres lorsque les intérêts coïncident, lorsque toutes les parties peuvent se procurer un avantage et en profiter.»

Professeur Christoph Frei de la HSG.
Photo: Philippe Rossier

Aujourd'hui, le multilatéralisme, longtemps dominant, qui réunit de nombreux acteurs autour d'une grande table et recherche des accords et des solutions, est plus sous pression que jamais. «Les Etats puissants préfèrent mettre en avant la taille de leur marché, leur puissance économique et militaire dans des constellations bilatérales – un contre un – afin de faire valoir leurs intérêts.» Mais le fait est aussi que l'interdépendance économique reste énorme dans le monde entier. «Tout le monde profite de la division mondiale du travail et des chaînes internationales de création de valeur, car les biens et les services sont moins chers.»

«Politiquement, l'Europe manque d'unité»

En attendant, l'Europe a toujours énormément de mal à parler d'une seule voix, comme l'explique Christoph Frei. «Il y a certes un marché intérieur fort, l'UE est une superpuissance réglementaire dont tous ceux qui veulent y vendre quelque chose doivent se méfier. Sur le plan politique en revanche, l'Europe manque toujours d'unité et d'une volonté politique clairement identifiable. Et Trump en profite.»

La liste des invités à l'investiture de Trump a donné un petit avant-goût de ce qui pourrait attendre l'Europe. La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le chancelier allemand Olaf Scholz ou le président français Emmanuel Macron n'étaient pas présents au Capitole. Ils représentent la vieille Europe, à laquelle Trump ne veut plus tenir la main dans un monde multipolaire.

Le nationalisme empoisonné comme plus grand défi

Ce qui est nouveau, c'est que le Sud s'émancipe de plus en plus. Alors qu'il était encore possible d'exercer une pression sur les pays d'Amérique du Sud, d'Afrique ou d'Asie, plus de 130 anciennes colonies sont devenues entre-temps des acteurs sûrs d'eux, «qui revendiquent leur place légitime dans le monde». Elles aussi poursuivent leurs propres intérêts et veulent éviter «d'être accaparées par l'une ou l'autre superpuissance».

Christoph Frei voit le plus grand défi dans un nationalisme empoisonné qui n'a plus rien à voir avec un patriotisme sain. «Si nous commençons à rompre les interdépendances économiques sous le drapeau 'my country first', à protéger nos propres marchés par des droits de douane ou d'autres barrières commerciales, voire à les cloisonner, alors des temps difficiles nous attendent et moins de prospérité.»

«La manière douce ou la manière forte»

Dans le même ordre d'idées, Trump a écrit mercredi sur son réseau en ligne Truth Social que si un «accord» n'était pas rapidement conclu pour mettre fin à la guerre, il n'aurait pas d'autre choix que «d'imposer des taxes, des droits de douane et des sanctions sur tout ce qui est vendu par la Russie aux États-Unis». Le président américain a également écrit: «Nous pouvons le faire de la manière la plus simple ou la plus dure, et la plus simple est toujours préférable.»

Mardi déjà, il avait menacé Poutine d'un durcissement des sanctions contre la Russie. Dans le même temps, il a juré qu'il aimait le peuple russe et qu'il n'était pas dans son intention de nuire à la Russie. «Il est temps de conclure un accord», a conclu Trump.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la