«Un ordre inconstitutionnel»
Un juge suspend le décret de Trump pour abolir le droit du sol

Le droit du sol, principe fondateur américain, est menacé par Trump. Un juge fédéral bloque temporairement cette mesure anti-immigration controversée. Plus de 22 États, dont la Californie et New York, s'opposent à cette décision présidentielle.
Publié: 23.01.2025 à 20:33 heures
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Dernière mise à jour: 23.01.2025 à 21:36 heures
Trump veut abolir un fondement de la constitution des Etats-Unis.
Photo: IMAGO/UPI Photo
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AFP Agence France-Presse

Un juge américain a suspendu temporairement jeudi la remise en cause du droit du sol ordonnée par le nouveau président Donald Trump, mesure emblématique de son offensive anti-immigration.

«Il s'agit d'un ordre manifestement inconstitutionnel», a estimé le magistrat fédéral John Coughenour, cité par des médias locaux lors d'une audience à Seattle. Joint par téléphone, un greffier du tribunal a confirmé la suspension à l'AFP.

Dans la foulée de son investiture lundi, Donald Trump a signé un décret revenant sur le droit du sol, un principe fondateur consacré par le 14e amendement de la constitution américaine et appliqué depuis plus de 150 ans aux Etats-Unis.

Une décision anti-constitutionnelle

Cette mesure a immédiatement a été contestée en justice par 22 États américains, dont la Californie et New York, qui pointaient son inconstitutionnalité. «Je suis juge depuis plus de quarante ans et je ne me souviens pas d'une autre affaire dans laquelle la question posée est aussi claire que celle-ci», a ajouté le juge Coughenour, en suspendant le décret.

Le décret devait interdire au gouvernement fédéral de délivrer des passeports, des certificats de citoyenneté ou d'autres documents aux enfants dont la mère séjourne illégalement ou temporairement aux Etats-Unis, et dont le père n'est pas citoyen américain ou résident permanent – titulaire de la fameuse carte verte.

Donald Trump a déclaré que son administration ferait appel de la décision. «Evidemment, nous ferons appel», a déclaré le président américain à la presse depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche sur cette suspension.

Le droit du sol est un principe «ridicule»

Selon de nombreux juristes, ce décret présidentiel risque de déclencher une bataille judiciaire susceptible de remonter jusqu'à la Cour suprême. En le signant, Trump avait lui-même reconnu s'attendre à des contestations devant les tribunaux.

«Je pense que nous avons de bonnes justifications, mais vous pourriez avoir raison», avait-il reconnu, face à un journaliste qui l'interrogeait sur d'éventuelles procédures. Le président avait également jugé que le droit du sol est un principe «ridicule», et avait faussement affirmé que les Etats-Unis seraient «les seuls» à l'appliquer. En réalité, des dizaines de pays reconnaissent le droit du sol, dont le Canada, le Mexique et la France.

La procédure jugée jeudi à Seattle était portée par les procureurs généraux de quatre Etats: celui de Washington, l'Arizona, l'Oregon et l'Illinois. Ils soulignaient que ce décret pourrait priver de droit 150'000 nouveaux-nés chaque année aux Etats-Unis, et risquaient de rendre certains d'entre eux apatrides.

«Une victoire pour l'État de droit»

«Il faut espérer que ce décret anticonstitutionnel et antiaméricain n'entrera jamais en vigueur», a estimé le procureur général de l'Etat de Washington, Nick Brown, dans un communiqué saluant la suspension. «La citoyenneté ne peut pas être conditionnée par la race, l'appartenance ethnique ou l'origine des parents», a ajouté le démocrate. «C'est la loi de notre nation, reconnue par des générations de juristes, de législateurs et de présidents, jusqu'à l'action illégale du président Trump.»

La procureure générale d'Arizona, Kris Mayes, a de son côté salué «une victoire pour l'État de droit» «Aucun président ne peut modifier la Constitution sur un coup de tête et la décision d'aujourd'hui l'affirme», a ajouté cette élue démocrate, dans un communiqué. Selon elle, cette décision «est la première de nombreuses victoires à venir (...) contre les cas d'excès de pouvoir de l'exécutif».

Prochaine cible: le droit d'asile

Outre la remise en cause du droit du sol, M. Trump a signé d'autres décrets lundi pour lancer une vaste offensive anti-immigration, qu'il a érigé en priorité absolue de son retour au pouvoir. Il a notamment déclaré l'état d'urgence à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, et y a envoyé l'armée pour en assurer la surveillance. Il compte également s'attaquer au droit d'asile.

«L'administration va vraiment essayer de repousser les limites» et voir si ses mesures «survivent aux tribunaux», avait expliqué lundi à l'AFP Cris Ramon, de l'ONG UnidosUS, en rappelant que le rôle de l'armée est lui aussi circonscrit par la loi. Le premier mandat du président républicain avait déjà été marqué par de nombreuses passes d'armes judiciaires sur l'immigration avec plusieurs Etats dirigés par des démocrates et les associations de défense des migrants.

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