L'armée russe n'a pas réussi à remporter une victoire en quelques jours, comme l'avait imaginé le président Vladimir Poutine en lançant l'invasion de l'Ukraine. Au lieu de cela, les troupes ont commis une série d'erreurs qui leur ont coûté des armes et des soldats. Mais on apprend de ses erreurs. La série de défaillances embarrassantes sur le front est à présent terminée, affirme l'ex-général et stratège militaire australien Mick Ryan dans une analyse de la revue de politique étrangère «Foreign Affairs». Selon lui, la Russie aura un avantage stratégique en 2024.
Après l'invasion, Kiev a réussi en très peu de temps à développer de nouvelles méthodes de combat. «La Russie, en revanche, tâtonnait dans l'obscurité, tel un gros ours arrogant et lourd qui était trop sûr de sa victoire rapide», explique Mick Ryan. Entre-temps, la situation s'est inversée, explique-t-il.
«L'écart de qualité entre l'Ukraine et la Russie s'est réduit», poursuit l'analyste militaire. Le grand avantage de l'Ukraine reste sa structure militaire. Grâce à elle, les nouvelles techniques et les nouvelles armes entrent rapidement en action. Toutefois, l'Ukraine ne peut pas garantir que ces techniques soient appliquées partout.
Des troupes d'élite soutiennent des soldats mal formés
Du côté russe, les revers sont rarement signalés. Mais si des leçons sont tirées des erreurs, elles peuvent être appliquées systématiquement à grande échelle dans toute l'armée et même au sein de l'industrie de l'armement. La Russie a conquis des territoires ces derniers mois, surtout dans l'est de l'Ukraine.
Il n'y a plus eu d'attaques spontanées et non coordonnées, mais des attaques chronométrées. Au début de la guerre, la Russie a envoyé des bataillons composés de troupes aériennes et terrestres. Mais celles-ci étaient trop petites et trop faibles, ce qui a entraîné de nombreuses pertes. L'année dernière, l'armée russe a combiné des troupes d'élite avec des fantassins mal formés.
Les soldats se sont alors transformés en chair à canon. «Des troupes mal formées, avançant par vague, à sens unique, capables de submerger et d'épuiser les soldats ukrainiens avant l'arrivée de troupes russes mieux formées», explique Mick Ryan, décrivant cette approche mise en place par les combattants de Wagner. Désormais, l'Ukraine ne cible plus aussi précisément les troupes avec ses missiles de précision, car celles-ci se dispersent sur le terrain.
La Russie a renforcé ses lignes de défense entre fin 2022 et début 2023. Tous les efforts de l'Ukraine pour percer ces lignes n'ont guère eu d'effet – malgré une excellente formation.
La Russie a des drones et des armes à sous-munitions en stock
L'Ukraine a formé d'excellents pilotes de drones – mais cela ne servirait pas à grand-chose, estime Mick Ryan. «Aujourd'hui, Moscou est supérieure à l'Ukraine en matière de drones et d'armes à sous-munitions». Poutine contourne les sanctions en se procurant des pièces de rechange à l'étranger. Les véhicules sont protégés par des blindages que les drones ne peuvent pas détruire. Selon Ryan, l'amélioration de l'utilisation des drones a été la principale raison de l'échec de la contre-offensive de l'Ukraine.
Avantage décisif pour l'armée russe: l'Etat a compris comment utiliser au mieux les ressources. Selon Mick Ryan, c'est «le plus important pour gagner des guerres». Au fil des années, Moscou pourrait se doter d'une force armée plus efficace et moderne. L'Ukraine n'a pratiquement rien pu reconquérir l'année dernière et a même perdu de nouveaux territoires au profit de la Russie.
Mais les Ukrainiens ont également amélioré leurs capacités. Ils se sont considérablement améliorés dans les attaques de longue portée. «L'année dernière, l'Ukraine a ainsi développé sa capacité à mener des attaques supplémentaires de longue portée contre les aérodromes russes, les usines d'armement et les infrastructures énergétiques», décrit Mick Ryan. Et la flotte maritime est également dans le collimateur de l'Ukraine. De plus en plus de flottes russes coulent au fond de la mer grâce aux drones marins.
Attaques sur Kharkiv prévues d'ici mars
un problème subsiste selon l'expert: «Comme dans d'autres domaines, la Russie va probablement s'adapter aux développements ukrainiens.» Selon lui, il est urgent que l'Ukraine apprenne à tirer les conclusions du front et les aplliquer à une plus grande échelle, tout en échangeant davantage d'informations. Selon lui, avant que la Russie puisse tirer des leçons du champ de bataille, l'Ukraine doit déjà exploiter leus points faibles.
Le temps presse. «La Fédération de Russie prévoit de s'emparer de l'ensemble des régions de Donetsk et de Lougansk ainsi que d'une partie de la région de Kharkiv jusqu'à la rivière Oskil d'ici mars 2024», indique le Centre ukrainien de stratégies de défense. Ce n'est pas une date choisie au hasard – car les élections présidentielles auront également lieu en mars. Comme l'écrit «Forbes», les forces russes ont déjà commencé à Koupiansk.