Le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, le ministre de la Défense Sergueï Choïgou ou l'ancien président russe Dmitri Medvedev – ils font tous partie du cercle restreint de Vladimir Poutine. Le président russe peut compter sur ces grandes figures politiques.
Mais Vladimir Poutine possède également un soutien majeur en dehors du monde politique: le patriarche russe Cyrille de Moscou, chef de l'Eglise orthodoxe russe. Un nouveau document stratégique de l'Eglise révèle à quel point les deux hommes sont proches en ce qui concerne la guerre en Ukraine et l'évolution de la société russe. Blick résume les trois points les plus importants de ces fantasmes sur l'avenir.
L'Ukraine doit être entièrement soumise
Dans le document de propagande dit «d'opération militaire spéciale», la guerre en Ukraine est qualifiée de «guerre sainte». Ce terme que l'on connaît habituellement surtout des islamistes radicaux est donc désormais également utilisé par les proches de Vladimir Poutine. Comme on le sait déjà des discours du chef du Kremlin, l'invasion russe en Ukraine est érigée en lutte contre l'Occident tout entier. La campagne russe est «une nouvelle étape dans la lutte de libération nationale du peuple russe contre le régime criminel de Kiev et l'Occident collectif qui se cache derrière».
L'Eglise russe admet ce que de nombreux observateurs savaient depuis longtemps: la conquête planifiée de l'Ukraine n'a pas commencé au printemps 2022, mais en 2014. Jusqu'à présent, la propagande russe avait toujours qualifié de «guerre civile» les combats qui ont duré des années dans l'est de l'Ukraine avant l'invasion.
Quant à l'objectif de cette «opération militaire spéciale», l'Eglise n'en fait pas mystère: «L'ensemble du territoire de l'Ukraine moderne doit tomber dans la zone d'influence exclusive de la Russie.» Poutine ne veut pas seulement s'emparer du Donbass, mais de tout le pays.
Les Ukrainiens peuvent ensuite oublier leur indépendance, comme le montre particulièrement bien un passage. «La possibilité qu'un régime politique russophobe, hostile à la Russie et à son peuple, s'installe sur ce territoire doit être totalement exclue», peut-on lire. Poutine a récemment commencé à étendre ses discours aux pays baltes. La Moldavie pourrait également être une cible.
Les Russes vivant à l'étranger doivent rentrer chez eux
L'objectif principal du document stratégique est de «rétablir l'unité du peuple russe». Cela signifie probablement que les Russes vivant à l'étranger doivent être ramenés chez eux – ce qui pourrait passer par d'autres invasions militaires. En Europe de l'Est, cela s'appliquerait entre autres à la Moldavie et aux pays baltes, qui comptent une proportion importante de Russes et de personnes se considérant comme tels.
Il est également prévu de mettre en place un programme de «retour au pays». «La Russie doit devenir un refuge pour tous les compatriotes du monde qui souffrent de l'assaut du mondialisme occidental, des guerres et de la discrimination.» Cette idée clivante inclut par ailleurs les étrangers qui partagent les «valeurs» russes. L'ensemble des détracteurs de l'Occident devraient donc s'unir en Russie.
Une croissance démographique massive
Ce qui préoccupe également Cyrille de Moscou et Vladimir Poutine, c'est l'évolution démographique de la Russie. Il est question de la «plus grande menace pour l'existence de la Russie», le pays subissant une «catastrophe démographique». Une «croissance démographique intensive et naturelle» est jugée nécessaire.
La manière dont le problème doit être éliminé semble folle: la population russe devrait quadrupler en cent ans, ce qui signifierait que la population russe passerait d'environ 144 millions à près de 600 millions d'habitants. Pour mettre ce plan en pratique, l'Eglise s'engage notamment à mettre en place des incitations financières. Des projets pilotes sont même prévus pour être testés dans certaines régions. Les projets réussis seront ensuite étendus à l'ensemble du pays.
Et comme si cela ne suffisait pas, les générations à venir devront être totalement alignées sur les idées Poutine – et ce, dès la naissance. Dans le document, cela se traduit ainsi: «L'appropriation des idées philosophiques et des valeurs spirituelles et morales de la civilisation russe est l'aspect le plus important de l'éducation des futures générations de citoyens russes.»