Lundi, des rassemblements sont prévus à Magdebourg, où l’extrême droite allemande et des manifestants dénonçant la «récupération» politique du drame comptent protester. Cette mobilisation intervient trois jours après l’attaque à la voiture-bélier sur un marché de Noël, imputée à un médecin saoudien.
Même si les mobiles du suspect restent flous, le carnage qui a fait cinq morts, dont un garçon de 9 ans, et plus de 200 blessés a replacé les questions de la sécurité et de l'immigration au coeur de la campagne pour les élections législatives anticipées du 23 février en Allemagne.
Le psychiatre saoudien de 50 ans Taleb Jawad al-Abdulmohsen, arrêté vendredi soir, a pêle-mêle exprimé des opinions hostiles à l'islam, sa colère contre les fonctionnaires allemands de l'immigration et son soutien aux récits d'extrême droite sur une islamisation de l'Europe.
L'Arabie saoudite avait déjà demandé à Berlin l'extradition du Saoudien, après avoir averti à plusieurs reprises qu'il «pourrait être dangereux», a indiqué lundi à l'AFP une source proche du gouvernement à Ryad.
«Bien que le contexte du terrible attentat de Magdebourg n'ait pas encore été clarifié, une chose est claire: il y aura un 'avant' et un 'après' dans cette campagne électorale», a jugé le journal populaire Bild, estimant que l'attaque va recentrer «la campagne, jusqu'à présent axée sur la situation économique désastreuse de l'Allemagne», sur les questions sécuritaires et migratoires.
Le parti nationaliste a prévu une manifestation
L'Alternative pour l'Allemagne (AfD), parti nationaliste, a prévu de manifester à 16h00 dans cette ville du nord-est du pays toujours sous le choc.
A la même heure, une chaîne humaine organisée par l'initiative «Gib Hass keine Chance» ("Ne donne aucune chance à la haine") doit se former sur les lieux du drame, proche de l'église Johannis dont le parvis est recouvert d'une marée de cierges, fleurs multicolores et peluches en hommage aux victimes.
«Nous constatons avec effroi et colère que des personnes veulent instrumentaliser cet acte cruel pour leur politique», indique l'initiative. Peu après l'attaque, l'AfD avait dénoncé l'accueil de centaines de milliers de réfugiés dans le pays ces dernières années.
Alice Weidel, la co-présidente de ce parti d'opposition, a insisté lundi sur son compte X: «le débat de nouvelles lois de sécurité ne doit pas détourner l'attention du fait que Magdebourg n'aurait pas été possible sans une immigration incontrôlée», a-t-elle écrit.
Scholz sous pression
Le gouvernement d'Olaf Scholz a promis dimanche une enquête rapide et minutieuse pour clarifier d'éventuelles erreurs des autorités dans la prévention de l'attaque.
La ministre de l'Intérieur Nancy Faeser ainsi que des hauts fonctionnaires seront auditionnés le 30 décembre par la commission des affaires intérieures du Bundestag, preuve de la pression accrue des députés sur le chancelier, à deux mois du scrutin anticipé.
Le profil de l'auteur présumé intrigue: Mina Ahadi, présidente du Conseil central des anciens musulmans, le décrit comme un «psychopathe d'ultradroite conspirationniste» haïssant tous ceux qui ne partagent pas sa haine.
Et selon les sources du journal local «Mitteldeutsche Zeitung», ses collègues doutaient de ses compétences médicales et l'avaient surnommé «Docteur Google», car il consultait régulièrement le net avant d'émettre un diagnostic.
Mesures de sécurité critiquées
Le débat porte aussi sur les mesures de sécurité prises par les autorités locales sur place. L'auteur présumé a ainsi pu emprunter une voie d'accès non sécurisée du marché de Noël puis a foncé sur la foule à bord d'un puissant véhicule BMW de location.
La ville de Magdebourg s'est défendue en expliquant que cette ouverture était réservée aux ambulances ou pompiers en cas d'urgence.
La sécurité des marchés de Noël avait pourtant été considérablement renforcée, notamment par l'installation de bornes en béton à leurs accès, après un acte similaire commis il y a huit ans sur un marché de Noël de Berlin, qui avait fait 13 morts.
«Un concept de sécurité est aussi solide que son maillon le plus faible», a jugé Peter Neumann, expert en contre-terrorisme à l'hebdomadaire Der Spiegel. «Si un point d'entrée n'est pas protégé, toutes les autres bornes en béton ne servent à rien».