Ses propos interrogent
Avec Trump le retour des Etats-Unis comme «gendarmes du monde»?

Donald Trump menace de se retirer de l'OTAN et de mettre fin à l'aide à l'Ukraine. Dans le même temps, il tient clairement tête au Hamas et à la Chine. Trump jouera-t-il la carte de l'isolationnisme ou les Etats-Unis redeviendront-ils les gardiens de l'ordre mondial?
Publié: 16.12.2024 à 10:30 heures
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Dernière mise à jour: 16.12.2024 à 13:09 heures
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Les Etats-Unis de Trump assumeront-ils à nouveau plus fortement leur rôle de «gendarme du monde»?
Photo: AFP
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Daniel Jung

Les signaux qu'envoie actuellement Donald Trump en matière de politique étrangère sont plutôt contradictoires. Lors de la campagne électorale, il a d'abord évoqué une réduction de l'engagement américain dans le monde. Désormais, il menace même Poutine et le Hamas d'une escalade militaire, tout en exprimant son souhait de renforcer la dissuasion vis-à-vis de la Chine. Comment ces deux positions s'articulent-elles? Les Etats-Unis vont-ils réduire leur engagement en tant que «gendarmes du monde» sous Trump, ou, au contraire, réaffirmer leur position dominante sur la scène internationale?

Des menaces claires et une posture autoritaire

Parfois, Trump adopte un ton martial. Le 2 décembre, il a averti sur son réseau Truth Social que si les otages détenus par le Hamas n’étaient pas libérés avant sa prise de fonction le 20 janvier, les responsables subiraient des représailles d’une ampleur sans précédent.

«Ceux qui en sont responsables seront frappés plus durement que quiconque ne l'a jamais été dans la longue histoire des Etats-Unis». Et d'ajouter, en lettres majuscules: «Libérez les otages maintenant.»

«Il sait que je suis fou»

Selon le «Washington Post», Trump a mis en garde Vladimir Poutine contre le risque d'une escalade militaire en Ukraine lors d'une conversation téléphonique peu après sa réélection et a rappelé la présence militaire américaine considérable en Europe.

Et lorsque le «Wall Street Journal» a demandé à Trump s'il utiliserait la force militaire si le président chinois Xi Jinping menaçait Taïwan d'un blocus, il a répondu: «Je n'aurais pas à le faire, car il me respecte et il sait que je suis complètement fou.» On le comprend aisément: Trump n'hésite pas une seconde à menacer les hommes les plus puissants de ce monde.

«Ce n'est pas notre combat»

Malgré ces déclarations, le prochain président américain a laissé entendre pendant la campagne qu'il souhaitait réduire l'engagement de l'armée américaine dans le monde et diminuer l'aide militaire à l'Ukraine.

Après la chute du dictateur Bachar al-Assad, Trump a commenté: «La Syrie est un gâchis, mais ce n'est pas notre ami, et les Etats-Unis ne devraient pas s'en mêler.» Et de conclure, toujours en lettre majuscules: «Ce n'est pas notre combat.»

Et dimanche dernier, lors d'un entretien télévisé accordé à NBC, Trump a de nouveau évoqué la possibilité d'un retrait des Etats-Unis de l'OTAN, l'alliance militaire occidentale. Les signaux envoyés par Trump sur la politique étrangère américaine à venir sont donc difficiles à interpréter. Qu'est-ce que cela signifie pour les quatre prochaines années?

Il se voit comme un «deal maker»

«Trump n'a pas de philosophie de politique étrangère formulée et cohérente», déclare l'expert des Etats-Unis James Warren Davis, professeur de sciences politiques à l'université de Saint-Gall. Mais ce qui est clair, c'est que «Donald Trump n'aime pas les guerres, et il n'aime pas les missions désespérées des forces armées américaines à l'étranger».

Trump serait sceptique quant aux grandes interventions comme en Irak, où les Américains ont tenté pendant plusieurs années de construire un Etat fonctionnel («Nation building») après la chute de Saddam Hussein. Trump se voit comme un «deal maker», privilégiant les transactions comme le ferait un businessman. Il considère les problèmes de politique étrangère comme des relations commerciales, explique James Warren Davis. On s'assoit autour d'une table et on passe un accord, «du genre donnant-donnant».

En principe, il n'y a rien de mal à avoir une politique étrangère basée sur les intérêts, dit le politologue. «Mais je doute que Trump comprenne vraiment comment les gens définissent leurs intérêts et à quel point certains problèmes sont complexes.»

«Il convoite visiblement le prix Nobel de la paix»

Mais en aucun cas Trump ne veut entrer dans l'histoire comme le président qui a perdu l'Ukraine. «Il convoite visiblement le prix Nobel de la paix», dit James Warren Davis. Et comme Trump veut réussir, il agira de manière pragmatique.

James Warren Davis fait référence au personnel choisi par Trump: ni le ministre des Affaires étrangères désigné, Marco Rubio, ni le conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, ne sont des isolationnistes. «Tous deux sont des faucons de la Chine», déclare James Warren Davis. Ils comptent bien s'opposer avec véhémence à la superpuissance asiatique.

Le fait que Trump ne connaisse pas le contexte historique dans les moindres détails n'est pas forcément un inconvénient, estime-t-il. «Parfois, c'est le débutant naïf qui met quelque chose sur la table qui mène à une percée, parce que personne n'a vu le problème de cette manière auparavant.»

«Il faut une Europe forte»

Le professeur saint-gallois cite en exemple les accords d'Abraham conclus lors du premier mandat de Trump. Le président a ici réussi à établir un rapprochement entre Israël et les Emirats arabes unis et Bahreïn. «Ces accords constituent désormais une pierre angulaire pour d'autres développements», poursuit l'expert.

Le politologue ne s'attend pas à une sortie de l'OTAN. «Les conseillers de Trump voient bien qu'il faut une Europe forte.» En fin de compte, l'objectif de Trump est que les Européens contribuent davantage à la sécurité militaire.

En conclusion, Trump ne devrait pas se mettre la tête dans le sable malgré son scepticisme vis-à-vis des grandes ambitions à l'étranger. Il souhaite équilibrer les intérêts à la table des négociations. Il n'est pas encore certain qu'il y parvienne. Pour James Warren Davis, rien n'est joué d'avance: «Je suis sceptique, mais je suis ouvert à une surprise.»

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