«Quand j'ai demandé à le voir, ils m'ont torturée»
Une Syrienne raconte l'enfer qu'elle a vécu pour retrouver son mari détenu à Saidnaya

Après la chute de Bachar al-Assad, l'ampleur de la brutalité de son régime est dévoilée au grand jour. Les détenus racontent la torture qu'ils ont vécue pendant des années. Des Syriens continuent de chercher leurs proches dans les prisons. Voici l'histoire d'Alaa.
Publié: 12.12.2024 à 05:34 heures
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En Syrie, des milliers de personnes sont à la recherche de ceux qu'ils aiment.
Photo: AFP
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Janine Enderli

Les Syriens recherchent leurs proches dans tout le pays à l'aide de photos, cartes d'identité et captures d'écran. Déchirés entre désespoir et espoir, ils profitent de la chute de Bachar al-Assad pour retrouver les membres de leur famille, emprisonnés il y a des années, et libérés entre-temps.

Durant les 13 années de guerre civile, de nombreuses personnes disparues se sont retrouvées dans les geôles du dictateur syrien. Avec des conditions de détention atroces. Des milliers de prisonniers sont morts dans la prison infernale de Saidnaya – dite «l'abattoir humain». 

Alaa, mère de six enfants, fait partie de ceux qui ont eu de la chance: son mari Muhammed, 38 ans, a pu être libéré samedi de cette prison située au nord de Damas. L'ancien détenu a enfin rejoint son foyer, mais il n'en est pas encore tout à fait conscient.

Un retour forcé au pays

Il y a huit mois, Muhammed a été transféré dans la prison infernale de Saidnaya. Il était censé servir dans l'armée de Bachar al-Assad, mais a déserté à plusieurs reprises. «Il y a été torturé», confie Alaa au quotidien britannique «The Independent».

Après le début de la guerre civile syrienne, la famille a d'abord fui au Liban voisin. Mais elle a dû rapidement retourner en Syrie, en 2014, à cause du manque de nourriture et des possibilités d'éducation pour les enfants. À son retour au pays, son mari a été immédiatement enrôlé dans l'armée syrienne, avant d'être emmené à Saidnaya.

Alaa a, elle aussi, subi de la torture. «Chaque fois que je demandais des nouvelles de l'état de mon mari, ils me torturaient. Je n'ai jamais pu le voir», raconte-t-ell. Lorsque Muhammed a été libéré, toute la famille a éclaté en sanglots. «Nous étions tellement heureux! Mes enfants avaient retrouvé leur père.»

Prêtes à tout pour retrouver leurs proches

Malheureusement, pas toutes les familles syriennes ne connaissent de happy end. Des centaines de personnes campent actuellement devant la centaine de prisons que compte la Syrie, certaines fouillent même à mains nues dans les égouts. Leur espoir: retrouver ne serait-ce que les maigres possessions de leurs proches. 

Des Syriens tentent désespérément d'entrer en contact avec leurs frères emprisonnés via des portails en ligne. «Il y a environ un mois, j'ai reçu un message d'un soldat m'informant que mon frère était détenu à Saidnaya. Le contact est désormais rompu et je n'ai aucune idée de l'endroit où il se trouve», déplore une femme.

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