Les Russes ont changé de stratégie. Désormais, les troupes de Poutine font pleuvoir missiles et drones sur les infrastructures critiques en Ukraine, comme les centrales électriques, les réservoirs de pétrole et de gaz ainsi que les centres de communication.
Et cela a des conséquences: le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a déclaré cette semaine que près de 30% des centrales électriques avaient été détruites. Les infrastructures sont toutefois en cours de réparation. La population en souffre: elle doit vivre sans électricité, à l'approche de la saison froide.
Les Russes semblent désormais avoir un nouvel objectif, et pas des moindres. Selon l’Ukraine, le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka a été miné. L’installation, construite en 1955, se trouve dans la région de Kherson, au sud de l’Ukraine.
La région est au cœur du conflit. Les troupes de Vladimir Poutine y sont en difficulté: elles ne parviennent pas à battre en retraite. Ces dernières semaines, l’armée ukrainienne a rendu les ponts sur le Dniepr impraticables. La Russie devra donc probablement s’appuyer sur un pont temporaire de péniches et sur des bacs de transport militaire.
Kherson et 80 villages seraient inondés
Les Russes sont dans une position délicate. Et c’est précisément pour cette raison qu’ils pourraient faire sauter le barrage. L’objectif serait de ralentir l’avancée ukrainienne. Volodymyr Zelensky a mis en garde contre ce qui pourrait être une «catastrophe de grande ampleur». En cas de rupture du barrage, des centaines de milliers de personnes vivant le long du fleuve Dniepr seraient en danger.
Le lac de retenue est gigantesque: il mesure 240 kilomètres de long pour une capacité de 18,2 milliards de mètres cubes d’eau. A titre de comparaison, le plus grand barrage de Suisse, la Grande Dixence (VS), contient 400 millions de mètres cubes, soit environ 45 fois moins d'eau.
La destruction du barrage de Kakhovka entraînerait un gigantesque raz-de-marée. La ville de Kherson ainsi que 80 villages seraient inondés. Et ce n’est pas tout: une interruption de l’approvisionnement en eau dans le sud de l’Ukraine affecterait également le système de refroidissement de la centrale nucléaire de Zaporijjia. Le canal de Crimée du Nord disparaîtrait tout simplement: celui-ci alimente en eau la péninsule de Crimée, annexée par la Russie en 2014.
Les Ukrainiens doivent économiser de l’électricité
Face à l’avancée des troupes ukrainiennes, les Russes avaient commencé mercredi à se retirer de la ville de Kherson et à «évacuer» les civils. Depuis, 15’000 personnes ont été transportées sur la rive gauche du Dniepr, a expliqué le représentant de l’administration, Kirill Stremousov. Kiev estime que cette action est équivalente à une «déportation» de civils vers la Russie.
Après les nombreuses attaques russes contre l’infrastructure électrique du pays, les Ukrainiens sont appelés, depuis jeudi, à économiser l’électricité. Le maire de Kiev, Vitali Klitschko, a demandé aux habitants de la capitale de ne pas utiliser des appareils électriques à forte consommation entre 7h et 23h. Même une économie mineure d’énergie dans chaque foyer contribuerait à stabiliser le fonctionnement du système énergétique ukrainien, a-t-il souligné.
Dans une allocution vidéo au sommet de l’UE à Bruxelles, Volodymyr Zelensky a accusé la Russie d’avoir transformé l’infrastructure énergétique de son pays en un «champ de bataille». Selon lui, la Russie provoque une nouvelle vague de réfugiés vers les pays de l’Union européenne. Le chef d’Etat ukrainien a par ailleurs demandé à ces pays de l’aide pour équiper Kiev de systèmes de défense aérienne plus nombreux et plus sophistiqués. Il estime que de nouvelles sanctions économiques contre Moscou sont nécessaires.