«La conquête de Kaboul a prouvé une fois de plus que personne ne peut contrôler la fière nation afghane et qu'aucun envahisseur ne sera autorisé à menacer l'indépendance et la liberté du pays», a salué dans communiqué le gouvernement taliban qui n'est pas reconnu par la communauté internationale.
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Au cours des deux années écoulées, les autorités talibanes ont imposé leur interprétation austère de l'islam et multiplié les mesures à l'encontre des femmes, exclues de l'espace public, constituant une pierre d'achoppement dans les négociations.
Mardi, les drapeaux blanc et noir de l'Emirat islamique d'Afghanistan, nom donné au pays par ses nouveaux dirigeants, flottaient aux points de contrôle de sécurité de la capitale, tombée le 15 août 2021 lorsque le gouvernement soutenu par les Etats-Unis s'est effondré et que ses dirigeants se sont exilés.
«C'est le jour où les Afghans ont libéré leur sol»
Les rues calmes de la capitale ont été investies dans la journée par les partisans des talibans qui se sont rassemblés par centaines au rond-point Massoud, en face de l'ancienne ambassade américaine. Aucune femme n'était présente, et certains hommes prenaient, tout sourire, des selfies pendant que des chants rendant «gloire à Allah» retentissaient.
Des véhicules militaires de fabrication américaine, abandonnés par les forces internationales après leur retrait chaotique du pays, ont défilé devant les portes entrouvertes de l'enceinte fortifiée américaine.
«C'est le jour où les Afghans ont libéré leur sol de ceux qui l'avaient envahi et occupé, et c'est aujourd'hui que nous avons obtenu cette indépendance», s'est félicité Adil, 22 ans, interrogé par l'AFP. «Il y a beaucoup d'espoirs et du bonheur» a-t-il ajouté, en assurant que «la corruption» qui avait gangrené le précédent gouvernement et les institutions avait disparu.
«Aujourd'hui est un jour heureux», «c'est la date de la fin de l'occupation de notre pays», s'est également réjoui Mortaza, 21 ans, étudiant en médecine à Kaboul. Des études impossibles pour les filles qui n'ont plus accès à l'université.
La situation des femmes demeure catastrophique
Le défilé militaire prévu à Herat (ouest) a été annulé et celui à Kandahar, berceau du mouvement taliban et d'où le chef suprême reclus, Hibatullah Akhundzada, gouverne par décret, a été déplacé à l'intérieur d'un camp militaire.
«Mort aux Européens! Mort aux Occidentaux! Vive l'Emirat islamique d'Afghanistan! Mort aux Américains!», ont scandé mardi matin une cinquantaine de défenseurs des talibans dans les rues de Hérat.
Les restrictions des droits des femmes – exclues de la vie publique ainsi que des voies d'accès à l'emploi et à l'éducation – constituent un obstacle majeur dans les négociations sur la reconnaissance du gouvernement par la communauté internationale et l'aide qu'elle pourrait apporter.
Un groupe d'experts de l'ONU a dénoncé lundi les promesses non tenues faites par les autorités talibanes d'instaurer un régime plus souple que celui qu'elles avaient mis en place lors de leur premier passage au pouvoir, de 1996 à 2001.
Une des pires crises humanitaires au monde
«Malgré les assurances données par les autorités talibanes de facto selon lesquelles toute restriction, notamment en terme d'accès à l'éducation, serait temporaire, les faits sur le terrain ont démontré l'existence d'un système accéléré, systématique et global de ségrégation, de marginalisation et de persécution», ont pointé les experts. «Toutes les filles et les femmes d'Afghanistan veulent retrouver leur liberté», a témoigné Hamasah, une ex-étudiante en médecine.
Les manifestations de femmes sont sévèrement réprimées en Afghanistan, mais à l'approche de cet anniversaire, de petits groupes de femmes ont organisé de rares et brèves manifestations contre le régime des talibans, en se couvrant le visage de masques. Dans le pays voisin, au Pakistan, une manifestation a rassemblé plus d'une centaine de personnes à Islamabad : «15 août, journée noire en Afghanistan», pouvait-on lire sur une pancarte brandie par une manifestante.
L'ONG Human Rights Watch a exhorté de son côté les pays donateurs à «trouver des moyens d'atténuer la crise humanitaire actuelle sans renforcer les politiques répressives des talibans à l'égard des femmes». Le pays aux plus de 38 millions d'habitants fait face à l'une des pires crises humanitaires au monde
(ATS)