Le silence du roi Mohammed choque
«Le Maroc n'est pas un pays du tiers monde qui a besoin d'une aide étrangère massive»

Plus de 60 pays ont proposé leur aide au Maroc, mais seuls quatre ont reçu le feu vert du monarque. Les experts soupçonnent derrière cette attitude de refus une fierté nationale, des raisons politiques, mais aussi des doutes quant à une coopération bien coordonnée.
Publié: 13.09.2023 à 16:15 heures
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Sur le trône du Maroc depuis 1999: le roi Mohammed VI (M.), sur la photo entre son frère le prince Moulay Rachid (D.) et son fils Hassan III lors d'une cérémonie au Palais Royal.
Photo: AFP
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Myrte Müller

La situation dans les montagnes de l'Atlas est désespérée. Les gens continuent à déterrer les personnes ensevelies sous les décombres, parfois à mains nues. Près de 2900 morts ont été retrouvés jusqu'à présent. Plus de 2500 personnes sont blessées. Et le nombre de victimes va augmenter. Trois jours après le séisme du siècle dans le sud-ouest du Maroc, les chances de retrouver des survivants sont quasiment nulles. L'une des raisons de cette tragédie est la lenteur des secours. Il manque des équipes d'intervention, des chiens de recherche, du matériel technique – et un message clair du souverain, le roi Mohammed VI.

Immédiatement après la catastrophe, 60 pays du monde entier ont proposé leur aide. Parmi eux, la France, l'Allemagne, la Suisse, l'Italie, Israël, la Turquie et les Etats-Unis. Mais le monarque n'a réagi que 36 heures après le séisme. Pas personnellement, mais par le biais d'une déclaration écrite.

Au moment de la catastrophe, Mohammed VI se trouve dans sa résidence d'apparat à Paris. Dans un premier temps, il ne se présente pas à son peuple meurtri par le séisme, et ne prononce aucun mot de réconfort. Ce n'est que mardi qu'apparaissent des images de lui visitant un hôpital à Marrakech. Selon l'agence de presse MAP, il y aurait donné son sang.

Mais visiblement, l'aide internationale n'est pas la bienvenue. Le Maroc souhaite gérer la crise autant que possible par ses propres moyens.

Seuls quatre pays peuvent aider le Maroc

Ce n'est que dimanche que le feu vert a été donné aux équipes de secours de quatre pays. L'Espagne et la Grande-Bretagne peuvent envoyer des équipes de recherche et des équipes cynophiles. Le Qatar, pays ami, livre des biens de première nécessité et les Emirats arabes unis établissent un pont aérien. Alors que les gens meurent sous les décombres, beaucoup se demandent: pourquoi le roi hésite-t-il? Le pays est-il trop fier pour accepter de l'aide? Le conflit du Sahara occidental joue-t-il un rôle?

«Le Maroc veut montrer au monde qu'il n'est pas un pays du tiers monde qui a besoin d'une aide étrangère massive», explique Riccardo Fabiani, chef de projet pour l'Afrique du Nord au think tank Crisis Group, au «Handelsblatt». Début octobre, Marrakech accueillera en outre l'assemblée annuelle de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Le message de l'hôte est possiblement le suivant: le Maroc a tout sous contrôle.

Le conflit du Sahara occidental suscite des rancœurs politiques

Mais une certaine rancœur politique pourrait également être à l'origine de cette attitude de refus. Depuis 45 ans, le Maroc revendique le Sahara occidental, qui était auparavant un territoire colonial espagnol. Alors que l'ONU et des Etats membres comme la France, l'Allemagne et la Suisse s'opposent fermement à l'annexion par le Maroc, l'Espagne a récemment cédé. La Grande-Bretagne a également gagné la sympathie du monde entier en appelant à un «dialogue stratégique» pour résoudre le conflit, en proposant des projets concrets dans le territoire contesté.

Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin prend de son côté la défense du monarque. Le Maroc dispose d'une bonne protection civile et est en mesure de maîtriser lui-même la situation, a-t-il déclaré aux médias. C'est également l'argument de Rabat. Dans sa déclaration, le gouvernement a remercié les nombreux Etats pour leur disponibilité et leur sympathie. Mais il s'agit d'abord d'examiner comment et où le Maroc pourrait déployer des unités de sauvetage internationales afin de garantir une coopération bien coordonnée.

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