Moins d'une semaine après les grèves les plus importantes depuis une décennie au Royaume-Uni, mobilisant entre autres cheminots et enseignants, le personnel du NHS, le service de santé public et gratuit, a rejoint les piquets de grève tôt lundi matin.
«Sous-effectif. Sous-évalué. Sous-payé», indique une pancarte brandie par deux infirmières de l'hôpital Saint-Thomas à Londres. «Les patients sont malades, nous sommes fatigués», lit-on sur une autre.
Le NHS, qui faisait il y a quelques années encore la fierté des Britanniques, traverse une profonde crise, étranglé par une cure d'austérité qui dure depuis plus de dix ans et les conséquences de la pandémie. Depuis sa création en 1948, il n'avait jamais été confronté à une grève d'une telle ampleur, avec des dizaines de milliers d'infirmières et d'ambulanciers arrêtant de travailler pour la première fois le même jour.
Ils réclament une augmentation de salaire alors que le Royaume-Uni, où l'inflation dépasse les 10%, fait face à une grave crise du coût de la vie. Mais ils se heurtent à un gouvernement conservateur inflexible face à ce mouvement soutenu par l'opinion.
Salaires en baisse en termes réels
Les infirmières seront à nouveau en grève mardi. Les kinésithérapeutes débrayeront jeudi. Et les ambulanciers seront de retour sur les piquets vendredi. Toute la semaine s'annonce donc difficile dans les hôpitaux.
L'organisation qui représente les hôpitaux, NHS Providers, a exhorté le public à utiliser les services d'urgence de manière «raisonnable» et prévenu que le service approchait d'un «point critique».
«Ça va être un véritable défi», selon Saffron Cordery, la directrice adjointe de NHS Providers. Elle a engagé le gouvernement à s'asseoir autour de la table avec les syndicats pour trouver un accord sur les salaires pour 2022-2023 puis pour l'an prochain. «Nous devons reconnaître que le personnel du NHS a dû faire face à une hausse vertigineuse du coût de la vie et de l'inflation», a-t-elle dit sur la télévision Sky News.
Selon le syndicat des infirmiers et infirmières, le Royal College of Nursing (RCN), le salaire des infirmières a baissé de près de 20% en dix ans en termes réels, en raison des politiques d'austérité qui ont frappé durement le NHS. Dans certains hôpitaux, des banques alimentaires ont été ouvertes pour le personnel.
Le gouvernement inflexible
Cependant, le gouvernement conservateur de Rishi Sunak ne semble pas vouloir bouger. «Le gouverneur de la Banque d'Angleterre a prévenu que si nous essayons de battre l'inflation avec des hausses de salaires, la situation ne fera qu'empirer et les gens ne seront pas mieux lotis», a répété le ministre de la Santé, Steve Barclay, dans un communiqué.
«Si nous devons donner une augmentation de salaire aux infirmières, nous devrons aussi regarder du côté des enseignants, des ambulanciers», a déclaré la secrétaire d'État chargée de la Santé mentale, Maria Caulfield, soulignant que de nombreux fonctionnaires réclament des augmentations.
Les enseignants étaient ainsi en grève le 1er février. Le mouvement touche également depuis des mois les cheminots, mais aussi la poste, la police aux frontières, etc. Cela coûterait «des milliards de livres sterling», selon la ministre. Elle-même infirmière, Maria Caulfield a cependant reconnu savoir «combien il est difficile de vivre sur un salaire d'infirmière».
Situation différente en Écosse et au Pays de Galles
Le mouvement de grève des infirmières touche principalement l'Angleterre car des négociations sont en cours ailleurs. «Le gouvernement a choisi de punir les infirmières d'Angleterre au lieu de se mettre autour de la table et de me parler de paie comme ils l'ont fait au Pays-de-Galles et en Écosse», a dénoncé Pat Cullen, la secrétaire générale du RCN.
Du côté des ambulanciers, pour Sharon Graham, la cheffe de Unite union, «le vrai problème, c'est qu'à aucun moment ce gouvernement n'a abordé la question de fond qu'est la rémunération». Elle a prévenu d'un «cycle constant» de grèves si le gouvernement campe sur ses positions.
(ATS)