Pour le président américain Donald Trump, ce mercredi 2 avril marque une étape clé de sa deuxième présidence. Il l’a proclamé sans détours: c’est le «Jour de la libération». À cette occasion, Donald Trump a lancé une nouvelle offensive dans la guerre commerciale en instaurant de nouveaux droits de douane. Une décision qui, dès aujourd’hui, secoue les investisseurs. En ce début de semaine, les marchés financiers plongent sur un large front.
Une réaction peu surprenante au vu de la rhétorique musclée du président. «Nous allons punir des pays pour avoir fait des affaires dans notre pays et nous avoir pris des emplois, notre prospérité et bien d'autres choses», a-t-il déclaré. Les nouvelles taxes douanières devraient concerner l’ensemble des pays – et non pas seulement une dizaine à quinze nations affichant les déséquilibres commerciaux les plus marqués. Trump prévoit d’annoncer les détails du tarif d’ici mercredi.
Dans un commentaire, le quotidien libéral suédois Dagens Nyheter reflète l’inquiétude générale sur les marchés à la veille du «Jour de la libération»: «Ce sera une semaine d’enfer pour l’économie mondiale», écrit-il.
Que va-t-il se passer exactement le 2 avril?
Donald Trump mettra en vigueur ce mercredi une série de droits de douane punitifs, appliqués sur un large front. Parmi les mesures phares: une taxe de 25% sur toutes les importations de voitures, une décision qui fait déjà grincer des dents du côté des constructeurs automobiles allemands.
Selon un reportage diffusé dimanche par la chaîne NBC, le président américain menace également d’imposer des droits de douane de 25% aux acheteurs de pétrole russe – une mesure qui pourrait entrer en vigueur à tout moment. Le secteur pharmaceutique serait aussi dans le viseur.
Par ailleurs, des taxes punitives sont prévues à l’encontre des pays qui importent du pétrole et du gaz en provenance du Venezuela. La Chine et l’Inde seraient particulièrement affectées par ces nouvelles restrictions commerciales. Un aperçu des principaux droits de douane est à découvrir ici.
Les droits de douane réciproques, qu'est-ce que c'est?
Trump mise régulièrement sur le principe des droits de douane réciproques. Le concept est simple: si un pays taxe un produit américain, les États-Unis appliquent en retour un droit de douane équivalent. Exemple concret: si la Chine impose une taxe de 20% sur les machines américaines, alors les machines chinoises seront elles aussi soumises à un droit de 20% à leur entrée sur le sol américain. Une logique de représailles commerciales, que Trump résume par une formule bien à lui: «l’équité par la réciprocité».
Pourquoi Trump mise-t-il sur les droits de douane?
Donald Trump souhaite que le maximum de biens soient fabriqués aux États-Unis plutôt qu’à l’étranger. Pour y parvenir, il mise sur des droits de douane punitifs, destinés à rendre les importations plus coûteuses et à protéger ainsi les producteurs locaux. Dans des secteurs industriels clés comme l’acier, l’aluminium ou l’automobile, il promet de faire revenir des emplois sur le sol américain grâce à ces mesures.
Par ailleurs, Trump veut réduire le déficit commercial américain, jugé excessif face à des pays comme la Chine, l’Allemagne, le Mexique ou le Canada. Pour lui, ce déséquilibre représente une «injustice», qu’il entend corriger à coup de taxes douanières. Mais ces droits ne servent pas uniquement à rééquilibrer les échanges, Trump les utilise aussi comme levier de négociation pour pousser d’autres pays à signer de meilleurs accords commerciaux. Avec un mot d’ordre sans équivoque: «Si vous ne faites pas d’efforts, vous en payez le prix.»
Quelles sont les conséquences pour la Suisse?
Même si la Suisse n’est pas directement visée par les droits de douane punitifs imposés par Donald Trump, elle en subit nettement les répercussions. Du côté des entreprises, qu’il s’agisse de PME ou de multinationales, l’incertitude est bien réelle. À l’image de Kühne+Nagel, basée à Schindellegi (SZ), depuis plusieurs semaines, les lignes téléphoniques du géant de la logistique sont saturées. Ses clients cherchent des solutions pour limiter les dégâts.
En tant que pays fortement tourné vers l’exportation, la Suisse souffre elle aussi des tensions croissantes sur le commerce mondial. L’industrie des machines, l’horlogerie ou encore les secteurs de la sous-traitance figurent parmi les plus touchés. À cela s’ajoute la vigueur du franc suisse, perçu comme une valeur refuge, qui renchérit les produits helvétiques à l’étranger et affaiblit leur compétitivité. Résultat: l’économie suisse subit une nouvelle pression, et le conflit commercial initié par les États-Unis pèse désormais sur sa croissance.
Les droits de douane punitifs ne sont-ils qu'un bluff?
Donald Trump agit avec une grande rapidité lorsqu’il s’agit d’instaurer de nouveaux droits de douane… et parfois avec encore plus de vitesse pour les lever. À plusieurs reprises, il a laissé entendre qu’il pourrait faire preuve de souplesse en matière tarifaire. Une attitude qui nourrit le débat: ces taxes sont-elles vraiment conçues pour durer, ou ne servent-elles que de levier dans les négociations commerciales? Trump et son entourage entretiennent volontairement le flou, envoyant des signaux contradictoires, comme le souligne l’agence Associated Press.
Un regard dans le passé montre toutefois que Trump ne plaisante pas. Pour rendre ses menaces crédibles, il doit passer à l’acte, et il l’a déjà fait! C’est un jeu risqué, car il comporte toujours le danger d’une escalade incontrôlée. Son premier mandat (2017–2021) en avait déjà donné un avant-goût, avec un bras de fer commercial contre l’Union européenne. Il avait notamment imposé des droits de douane sur l’acier et l’aluminium en provenance de la quasi-totalité des pays partenaires.
Va-t-on vers une grande récession?
La guerre commerciale lancée par Donald Trump agit comme un poison pour la croissance mondiale et pèse lourdement sur les marchés financiers. Son approche agressive en matière de droits de douane alimente les craintes d’un conflit commercial généralisé, avec à la clé un risque accru de récession.
L’expert Ajay Rajadhyaksha, cité par l’agence Reuters, tire la sonnette d’alarme: pour la première fois depuis des années, «les investissements à risque suscitent de sérieuses inquiétudes. Et d’ajouter: Si le chaos politique et les guerres commerciales s’aggravent encore, une récession est désormais un risque réaliste dans les grandes économies.»
Cette politique fait également sourciller les économistes en Suisse. «Selon le livre de recettes traditionnel de la politique économique, le gouvernement Trump fait jusqu’à présent à peu près tout de travers», constate Marius Brülhart, professeur d’économie à l’Université de Lausanne, dans un entretien accordé à Blick.