Donald Trump contre Jerome Powell. Le président des Etats-Unis face au patron de la Réserve fédérale. Ce mercredi, le duel entre les deux hommes forts de l'économie américaine passe à la vitesse supérieure. La décision de la banque centrale américaine (Fed) sur les taux d'intérêt est prévue à 19 heures (heure suisse). Et tout porte à croire que Jerome Powell laissera son taux directeur inchangé. Une perspective qui déplaît fortement à Trump. Depuis plusieurs semaines, il martèle que des taux élevés freinent l’économie et que la banque centrale doit changer de cap.
Les signaux d’affaiblissement de l’économie américaine sont clairs: la croissance ralentit, tandis que l’inflation persiste. La Fed évolue donc sur une ligne de crête. Une baisse prématurée des taux pourrait raviver la flambée des prix. Mais s’obstiner à maintenir des taux élevés risquerait d’entraîner le pays dans la récession. Ajoutez à cela la politique protectionniste de Trump et les marchés financiers commencent à vaciller. À Wall Street, le climat est nerveux: le Nasdaq a perdu plus de 10% depuis décembre et le S&P 500 accuse des pertes similaires.
Un plan secret?
De son côté, Trump ne cache pas sa position: il faut baisser les taux, et vite. Sur «Fox Business», il déclarait récemment: «Personne ne s'enrichit avec des taux d'intérêt élevés, car les gens ne peuvent pas emprunter d'argent.» Quant à la possibilité d’une récession, il l’admet à demi-mot: «Il y aura une période de transition, car ce que nous faisons est très grand», a-t-il répondu lorsqu’on lui a posé la question.
Dans les milieux financiers, les spéculations vont bon train. Selon des médias américains et britanniques, Trump pourrait sciemment alimenter l’incertitude afin de pousser Jerome Powell à desserrer sa politique monétaire. Si l’économie venait à déraper, la Fed n’aurait d’autre choix que de réduire les taux. Une aubaine pour Trump, car des taux plus bas allégeraient non seulement le fardeau des entreprises et des ménages, mais rendraient aussi plus supportables les colossales dettes publiques américaines. Celles-ci dépassent actuellement les 36'000 milliards de dollars, avec des intérêts annuels supérieurs à 1000 milliards. Un allègement des taux pourrait donner un sérieux coup de pouce à la politique budgétaire du président.
Un rebond à temps pour les élections de mi-mandat?
Marius Brülhart, professeur d’économie à l’Université de Lausanne, voit également dans cette stratégie une possible manœuvre politique. Il a déclaré à Blick que l'administration Trump réagissait de manière remarquablement détendue à l'assombrissement de la conjoncture. «Cela nourrit le soupçon qu’il ne verrait pas d’un mauvais œil une petite récession cette année, dans l’espoir que l’économie reparte juste à temps pour les élections de mi-mandat en 2026, ou au plus tard pour l’élection présidentielle de 2028», poursuit Marius Brülhart.
Trump n’a jamais reculé devant des stratégies peu orthodoxes pour atteindre ses objectifs économiques. Notamment pour imposer ses objectifs de politique économique. Mais serait-il prêt à provoquer sciemment une récession? Il n'existe actuellement aucune preuve à cet égard. Ce qui est en revanche suffisamment prouvé, c'est que Trump et Powell ne s'apprécient pas. Même si c'est le président américain qui a hissé son collègue de parti à la plus haute fonction financière des Etats-Unis en 2018.
Jerome Powell veut y rester jusqu'à la fin de son mandat en mai 2026, comme il l'a clairement indiqué. Combien de baisses de taux d’ici là? Impossible à dire. Mais si Trump pouvait décider, il ne fait aucun doute: il y en aurait autant que possible.