L'armée ukrainienne est désormais autorisée à utiliser des missiles à longue portée en provenance des Etats-Unis contre des cibles en Russie – et elle l'a déjà fait ce mardi. Un dépôt de munitions russe a ainsi été attaqué près de Karatchev. Selon les informations russes, six missiles ATACMS de fabrication américaine ont été utilisés.
Selon plusieurs médias, le président Joe Biden avait autorisé cette action auparavant, bien que la Maison Blanche n'ait ni confirmé ni infirmé ces informations. Il semble clair que cette autorisation pourrait aider l'Ukraine à renforcer sa position lors de prochaines négociations. Mais l'autorisation du système d'armement par Biden va-t-elle aussi aider Donald Trump à tenir sa promesse électorale centrale de mettre rapidement fin à la guerre? La réponse à cette question est également d'une grande importance pour l'Ukraine.
Le fils de Trump parle de la troisième guerre mondiale
Donald Trump lui-même ne s'est pas encore exprimé, mais son camp a réagi de manière très critique. Richard Grenell, l'ancien ambassadeur américain en Allemagne, a reproché à Joe Biden d'avoir provoqué une escalade de la guerre. «C'est comme s'il commençait une toute nouvelle guerre», a-t-il déclaré.
De son côté, Donald Trump Jr. a écrit sur la plate-forme X: «Le complexe militaro-industriel semble vouloir s'assurer que la troisième guerre mondiale commence avant que mon père n'ait eu l'occasion de faire la paix et de sauver des vies».
«Manœuvre de perturbation de Biden»
«Trump peut en fait considérer cette décision comme une manœuvre de perturbation», déclare l'expert militaire allemand Ralph D. Thiele qui reste très critique vis-à-vis de l'utilisation de ces systèmes de missiles par l'Ukraine. «De façon générale, ce genre de stratégie peut s'avérer très dangereuse, confie le militaire. Le gros problème, c'est que la Russie peut toujours surenchérir, étendre la guerre dans l'espace ou même utiliser de petites armes nucléaires. Dans ce contexte, la décision de Joe Biden représente une escalade claire.»
Vladimir Poutine a en effet diverses options pour réagir. Lundi, la rupture d'un câble sous-marin «Cinia C-Lion1» entre la Finlande et l'Allemagne était-elle un avant-goût avant de futures réactions? Pour Ralph D. Thiele, il pourrait s'agir d'un acte de guerre hybride de la part de la Russie. «Il y a là beaucoup de dommages possibles que Poutine peut obtenir à peu de frais.»
Mardi, le chef du Kremlin a en outre mis en vigueur une nouvelle doctrine d'armement nucléaire. La Russie menace de représailles nucléaires non seulement en cas d'attaque nucléaire, mais aussi en cas d'attaque conventionnelle contre elle ou son allié biélorusse si celle-ci «constitue une menace critique pour leur souveraineté ou leur intégrité territoriale.»
Un problème pour Trump
Le feu vert donné à l'utilisation de missiles par Biden peut donner à Trump une opportunité de désescalade, en revenant simplement sur cette décision, mais il est également possible que la situation s'envenime au point qu'un cessez-le-feu ne soit pas envisageable pour le moment. Selon Ralph D. Thiele, la décision de Biden pourrait donc encore poser un problème à Trump, et pas seulement pour lui, bien évidemment: «Cela augmentera encore le nombre de victimes», craint-il.
Les missiles livrés par les États-Unis peuvent pénétrer plus profondément en Russie et ainsi entraver le ravitaillement de Moscou en troupes et en équipement. «Poutine doit désormais déplacer les postes de commandement, le matériel et les avions hors de la portée des 300 kilomètres que ces missiles peuvent parcourir», explique l'expert.
Koursk, un précieux gage?
On s'attend à ce que l'Ukraine utilise les nouvelles armes pour sécuriser la région russe de Koursk qu'elle a conquise cet été. Le contrôle de cette région pourrait-il être d'une importance décisive lors des négociations, comme un gage pour Volodymyr Zelensky?
«Non», répond Ralph D. Thiele. Car il n'y a ni matières premières ni points stratégiques dans la région de Koursk. «Un échange contre la Crimée, par exemple, serait aussi complètement absurde.»
Près de cette ville, la Russie a rassemblé des troupes et du matériel, dont environ 50'000 de ses propres soldats et quelques 10'000 recrues nord-coréennes.
Alors, avantage ou inconvénient?
Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden, a parlé à la chaîne américaine PBS d'une «grande escalade» de la part de la Russie en raison de la présence de soldats nord-Coréens sur le champ de bataille. Les Etats-Unis ont toujours été clairs sur les conséquences de l'implication d'un pays tiers dans la guerre.
«La libération est donc en premier lieu une réaction américaine», a expliqué le politologue allemand Frank Sauer à Blick. «On peut en outre encore spéculer sur le fait que le timing pourrait aussi être dû au fait que l'administration Biden ne voulait pas annoncer la décision pendant la campagne électorale américaine.»
Il n'est pas possible de répondre sérieusement à la question de savoir si cela constitue plutôt un avantage ou un inconvénient pour Donald Trump. «Déjà parce que nous ne savons pas ce que Trump a réellement l'intention de faire», dit Frank Sauer. En effet, le futur président américain a déjà souvent dit qu'il mettrait rapidement fin à la guerre, mais il est resté muet jusqu'à présent sur les conditions et les moyens d'y parvenir.